1. Tuyển Mod quản lý diễn đàn. Các thành viên xem chi tiết tại đây

HAMLET - ACTE QUATRIÈME

Chủ đề trong 'Pháp (Club de Francais)' bởi despi, 23/08/2001.

  1. 1 người đang xem box này (Thành viên: 0, Khách: 1)
  1. despi

    despi Thành viên rất tích cực

    Tham gia ngày:
    29/04/2001
    Bài viết:
    1.990
    Đã được thích:
    1
    HAMLET - ACTE QUATRIÈME

    ACTE QUATRIẩME

    ---------------------------------

    SCẩNE I

    LA SALLE D'ẫTAT DANS LE CHTEAU
    Entrent LE ROI, LA REINE,ROSENCRANTZ et GUILDENSTERN

    LE ROI
    Il y a une cause ces soupirs, ces palpitations profondes : il faut que vous l'expliquiez; il convient que nous la connaissions. Oự est votre fils?

    LA REINE, Rosencrantz et Guildenstern
    Laissez-nous ici un moment.
    (Rosencrantz et Guildenstern sortent.)
    Ah! mon bon seigneur, qu'ai-je vu cette nuit!

    LE ROI
    Quoi donc, Gertrude ?... Comment est Hamlet?

    LA REINE
    Fou comme la mer et comme la tempờte, quand elles luttent qui sera la plus forte. Dans un de ses accốs effrộnộs, entendant remuer quelque chose derriốre la tapisserie, il a fait siffler son ộpộe en criant:ô Un rat! un rat! ằ et, dans le trouble de sa cervelle, il a tuộ sans le voir le bon vieillard.

    LE ROI
    O accablante action! Nous aurions eu le mờme sort, si nous avions ộtộ l. Sa libertộ est pleine de menaces pour tous, pour vous-mờme, pour nous, pour le premier venu. Hộlas! qui rộpondra de cette action sanglante? C'est sur nous qu'elle retombera, sur nous dont la prộvoyance aurait dỷ tenir de prốs et isoler du monde ce jeune fou. Mais telle ộtait notre tendresse, que nous n'avons pas voulu comprendre la chose la plus raisonnable. Nous avons fait comme l'homme atteint d'une maladie hideuse, qui, par crainte de la divulguer, lui laisse dộvorer sa vie jusqu' la moelle. Oự est-il allộ?

    LA REINE
    Mettre l'ộcart le corps qu'il a tuộ. Dans sa folie mờme, comme l'or dans un gisement de vils mộtaux, son õme reste pure. Il pleure sur ce qu'il a fait.

    LE ROI
    ễ Gertrude, sortons ! Dốs que le soleil aura touchộ les montagnes, nous le ferons embarquer. Quant cette odieuse action, il nous faudra toute notre majestộ et notre habiletộ pour la couvrir et l'excuser. Hol! Guildenstern!
    (Rentrent Rosencrantz et Guildenstern.)
    Mes amis, prenez du renfort. Hamlet, dans sa folie, a tuộ Polonius, et l'a traợnộ hors du cabinet de sa mốre. Allez le trouver, parlez-lui nettement, et transportez le corps dans la chapelle. Je vous en prie, hõtez-vous. (Sortent Rosencrantz et Guildenstern.)
    Viens, Gertrude. Nous allons convoquer nos amis les plus sages pour leur faire savoir ce que nous comptons faire, et l'imprudence qui a ộtộ commise. Ainsi la calomnie qui traverse le monde, comme un canon atteint la cible de son boulet empoisonnộ, pourra manquer notre nom, et ne frapper que l'air invulnộrable. Oh! partons... Mon õme est pleine de discorde et d'ộpouvante. (Ils sortent.)

    SCẩNE II

    -----------------------------

    UN APPARTEMENT DANS LE CHTEAU
    Entre HAMLET

    HAMLET
    Dộposộ en lieu sỷr!

    VOIX, derriốre le thộõtre
    Hamlet! seigneur Hamlet!

    HAMLET
    Quel est ce bruit? Qui appelle Hamlet? Oh! on vient ici! (Entrent Rosencrantz et Guildenstern.)

    ROSENCRANTZ
    Qu'avez-vous fait du cadavre, monseigneur?

    HAMLET
    Confondu avec la poussiốre dont il est parent.

    ROSENCRANTZ
    ***es-nous oự il est, que nous puissions le retirer et le porter la chapelle.

    HAMLET
    N'allez pas croire cela.

    ROSENCRANTZ
    Quoi?

    HAMLET
    Que je puisse garder votre secret, et pas le mien. Et puis, ờtre questionnộ par une ộponge! Quelle rộponse peut lui faire le fils d'un roi?

    ROSENCRANTZ
    Me prenez-vous pour une ộponge, monseigneur?

    HAMLET
    Oui, monsieur, une ộponge qui absorbe les grõces du roi, ses rộcompenses, son autoritộ. Du reste, de tels officiers finissent par rendre au roi les plus grands services. Il les garde comme un singe garde des noix, dans le coin de sa mõchoire, pour les mõcher avant de les avaler. Quand il aura besoin de ce que vous aurez glanộ, il n'aura qu' vous presser, ộponges, et vous redeviendrez sec.

    ROSENCRANTZ
    Je ne vous comprends pas, monseigneur.

    HAMLET
    J'en suis bien aise. Un mộchant propos se niche dans une sotte oreille.

    ROSENCRANTZ
    Monseigneur, vous devez nous dire oự est le corps, et venir avec nous chez le roi.

    HAMLET
    Le corps est avec le roi, mais le roi n'est pas avec le corps. Le roi est une crộature...

    GUILDENSTERN
    Une crộature, monseigneur?

    HAMLET
    De rien. Conduisez-moi vers lui. Nous allons jouer cache-cache.

    SCẩNE III

    ----------------------------------

    LA SALLE D'ẫTAT DANS LE CHTEAU
    Entre LE ROI avec sa suite

    LE ROI
    J'ai envoyộ sa recherche et la dộcouverte du corps.
    (A part.)
    Combien il est dangereux que cet homme soit libre! Pourtant ne le soumettons pas la loi rigoureuse il est adorộ de la multitude en dộlire, qui aime, non par le jugement, mais par les yeux; et, dans ce cas-l, c'est le chõtiment du criminel qu'elle pốse, jamais le crime. Pour que tout se passe doucement et sans bruit, il faut que cet embarquement soudain paraisse une dộcision rộflộchie. Aux maux dộsespộrộs il faut des remốdes dộsespộrộs,

    Entre ROSENCRANTZ

    ou il n'en faut pas du tout. Eh bien! que s'est-il passộ?

    ROSENCRANTZ
    Oự le cadavre est dộposộ, monseigneur, c'est ce que nous n'avons pu savoir de lui.

    LE ROI
    Mais oự est-il lui-mờme?

    ROSENCRANTZ
    Ici prốs, monseigneur; gardộ, en attendant votre bon plaisir.

    LE ROI
    Amenez-le devant nous.

    ROSENCRANTZ
    Hol! Guildenstem, amenez monseigneur.

    Entrent HAMLET et GUILDENSTERNI

    LE ROI
    Eh bien! Hamlet, oự est Polonius?

    HAMLET
    A souper.

    LE ROI
    A souper! Oự donc?

    HAMLET
    Quelque part oự il ne mange pas, mais oự il est mangộ: une certaine rộunion de vers politiques est attablộe autour de lui. Le ver, voyez-vous, est votre empereur pour la bonne chốre. Nous engraissons toutes les autres crộatures pour nous engraisser; et nous nous engraissons nous-mờmes pour les infusoires. Le roi gras et le mendiant maigre ne sont qu'un service diffộrent, deux plats pour la mờme table. Voil la fin.

    LE ROI
    Hộlas! hộlas!

    HAMLET
    Un homme peut pờcher avec un ver qui a mangộ d'un roi, et manger du poisson qui s'est nourri de ce ver.

    LE ROI
    Que veux-tu dire par l?

    HAMLET
    Rien. Je veux seulement vous montrer comment un roi peut faire un voyage travers les boyaux d'un mendiant.

    LE ROI
    Oự est Polonius?

    HAMLET
    Au ciel. Envoyez-y voir: si votre messager ne l'y trouve pas, cherchez-le vous-mờme dans l'endroit opposộ. Mais, ma foi! Si vous ne le trouvez pas d'ici un mois, vous le flairerez en montant l'escalier de la galerie.

    LE ROI, des gens de sa suite
    Allez l'y chercher.

    HAMLET
    Il attendra que vous veniez. (Les gens sortent.)

    LE ROI
    Hamlet, dans l'intộrờt de ta santộ, qui nous est aussi chốre que nous est douloureux ce que tu as fait, ton action exige que tu partes d'ici avec la rapi***ộ de l'ộclair. Va donc te prộparer. Le navire est prờt, et le vent vient l'aide; tes compagnons t'attendent, et tout est disposộ pour ton voyage en Angleterre.

    HAMLET
    En Angleterre?

    LE ROI
    Oui, Hamlet.

    HAMLET
    C'est bien.

    LE ROI
    Tu parles comme si tu connaissais nos projets.

    HAMLET
    Je vois un chộrubin qui les voit. Mais, allons en Angleterre! Adieu, chốre mốre!

    LE ROI
    Et ton pốre qui t'aime, Hamlet?

    HAMLET
    Ma mốre ! Pốre et mốre, c'est mari et femme ; mari et femme, c'est mờme chair. Donc, ma mốre! En Angleterre, allons! (Il sort.)

    LE ROI, Rosencrantz et Guildenstern
    Suivez-le pas pas; attirez-le vite bord. Pas de dộlai! Je le veux parti ce soir. Allez! J'ai expộdiộ et scellộ tout ce qui se rapporte l'affaire. Hõtez-vous, je vous prie. (Sortent Rosencrantz et Guildenstern.) Et maintenant, frốre d'Angleterre, si tu estimes mon amitiộ autant que te le conseille ma grande puissance, s'il est vrai que tu portes encore, vive et rouge, la cicatrice faite par l'ộpộe danoise, et que tes libres terreurs nous rendent hommage... tu n'accueilleras pas froidement notre message souverain, qui exige formellement, par lettres pressantes, la mort immộdiate d'Hamlet. Obộis, Angleterre! car il me brỷle le sang comme la fiốvre, et il faut que tu me guộrisses. Jusqu' ce que je sache la chose faite, quoi qu'il m'arrive, la joie ne me reviendra jamais. (Il sort.)

    SCẩNE IV

    -------------------------------

    UNE PLAINE EN DANEMARK
    Entre FORTINBRAS, suivi d'une armộe

    FORTINBRAS
    Allez, capitaine, saluer de ma part le roi danois. ***es-lui qu'avec son agrộment, Fortinbras rộclame l'autorisation promise pour passer travers son royaume. Vous savez oự est le rendez-vous. Si Sa Majestộ veut quelque chose de nous, nous irons lui rendre hommage en personne; faites-le-lui savoir.

    LE CAPITAINE
    J'obộirai, monseigneur.

    FORTINBRAS
    Avancez avec prộcaution.
    (Fortinbras et son armộe sortent.)

    Entrent HAMLET, ROSENCRANTZ, GUILDENSTERN

    HAMLET
    A qui sont ces forces, mon bon monsieur?

    LE CAPITAINE
    la Norvốge, monsieur.

    HAMLET
    Oự sont-elles dirigộes, monsieur, je vous prie?

    LE CAPITAINE
    Contre certain point de la Pologne.

    HAMLET
    Qui les commande, monsieur?

    LE CAPITAINE
    Le neveu du vieux roi de Norvốge, Fortinbras.

    HAMLET
    Marche-t-il au coeur de la Pologne, monsieur, ou sur quelque frontiốre?

    LE CAPITAINE
    A parler vrai, et sans exagộration, nous allons conquộrir un petit morceau de terre qui a un revenu purement nominal. Pour cinq ducats, cinq, je ne le prendrais pas ferme; et ni la Norvốge, ni la Pologne, n'en retireraient un profit plus beau, s'il ộtait vendu en toute propriộtộ.

    HAMLET
    Eh bien! alors, les Polonais ne le dộfendront jamais.

    LE CAPITAINE
    Si; il y a dộj une garnison.

    HAMLET
    Deux mille õmes et vingt mille ducats ne suffiront pas dộcider la question de ce fộtu. Voil un abcốs causộ par trop d'abondance et de paix, qui crốve intộrieurement, et qui, sans montrer de cause apparente, va faire mourir son homme... Je vous remercie humblement; monsieur.

    LE CAPITAINE
    Dieu soit avec vous, monsieur!
    (Sort le capitaine.)

    ROSENCRANTZ
    Vous plaợt-il de repartir, monseigneur?

    HAMLET
    Je serai avec vous dans un instant. Marchez un peu en avant. (Sortent Rosencrantz et Guildenstern.) Comme toutes les circonstances dộposent contre moi ! Comme elles ộperonnent ma vengeance rộtive! Qu'est-ce que l'homme, si le bien suprờme, l'aubaine de sa vie est uniquement de dormir et de manger ?... Une bờte, rien de plus. Certes celui qui nous a faits avec cette vaste intelligence, avec ce regard dans le passộ et dans l'avenir, ne nous a pas donnộ cette capacitộ, cette raison divine, pour qu'elles moisissent en nous inactives. Eh bien! est-ce l'effet d'un oubli bestial ou d'un scrupule poltron qui me fait rộflộchir trop prộcisộment aux consộquences, rộflexion qui, mise en quatre, contient un quart de sagesse et trois quarts de lõchetộ ?... Je ne sais pas pourquoi j'en suis encore me dire: Ceci est faire; puisque j'ai motif, volontộ, force et moyen de le faire. Des exemples, gros comme la terre, m'exhortent : tộmoin cette armộe aux masses imposantes, conduite par un prince dộlicat et adolescent, dont le courage, enflộ d'une ambition divine, fait la grimace l'invisible ộvộnement, et qui expose une existence mortelle et fragile tout ce que peuvent oser la fortune, la mort et le danger, pour une coquille d'oeuf !... Pour ờtre vraiment grand, il faut ne pas s'ộmouvoir sans de grands motifs; mais il faut aussi trouver grandement une querelle dans un brin de paille, quand l'honneur est en jeu. Que suis-je donc moi qui ai l'assassinat d'un pốre, le dộshonneur d'une mốre, pour exciter ma raison et mon sang, et qui laisse tout dormir? Tandis qu' ma honte je vois vingt mille hommes marcher une mort imminente, et, pour une fantaisie, pour une gloriole, aller au sộpulcre comme au lit, se battant pour un champ, oự il leur est impossible de se mesurer tous et qui est une tombe trop ộtroite pour couvrir les tuộs! Oh! que dộsormais mes pensộes soient sanglantes, pour n'ờtre pas dignes du nộant! (Il sort.)

    SCẩNE V

    -------------------------------------

    LA SALLE D'ARMES DANS LE CHTEAU
    Entrent LA REINE, HORATIO et UN GENTILHOMME

    LA REINE
    Je ne veux pas lui parler.

    LE GENTILHOMME
    Elle est exigeante; pour sỷr, elle divague; elle est dans un ộtat faire pitiộ.

    LA REINE
    Que veut-elle?

    LE GENTILHOMME
    Elle parle beaucoup de son pốre; elle *** qu'elle sait qu'il n'y a que fourberies en ce monde; elle soupire et se bat la poitrine; elle frappe du pied avec rage pour un fộtu; elle *** des choses vagues qui n'ont de sens qu' moitiộ. Son langage ne signifie rien; et cependant, dans son incohộrence, il fait rộflộchir ceux qui l'ộcoutent: on en cherche la suite, et on relie par la pensộe les mots dộcousus. Les clignements d'yeux, les hochements de tờte, les gestes qui l'accompagnent, feraient croire vraiment qu'il y a l une pensộe bien douloureuse, quoique non arrờtộe.

    HORATIO
    Il serait bon de lui parler; car elle pourrait semer de dangereuses conjectures dans les esprits fộconds
    en mal.

    LA REINE
    Qu'elle entre! (Sort Horatio.) Telle est la vraie nature du pộchộ : mon õme malade la moindre niaiserie semble le prologue d'un grand malheur. Le crime est si plein de maladroite mộfiance, qu'il se divulgue lui-mờme par crainte d'ờtre divulguộ.

    HORATIO rentre avec OPHẫLIA

    OPHẫLIA
    Oự est la belle Majestộ du Danemark?

    LA REINE
    Qu'y a-t-il, Ophộlia?

    OPHẫLIA, chantant
    Comment puis-je reconnaợtre votre amoureux
    D'un autre?
    son chapeau de coquillages, son bõton,
    ses sandales.

    LA REINE
    Hộlas! dame bien-aimộe, que signifie cette chanson?

    OPHẫLIA
    Vous ***es? Eh bien! attention, je vous prie!
    (Elle chante.)
    Il est mort et parti, madame,
    Il est mort et parti.
    sa tờte une motte de gazon vert,
    ses talons une pierre.

    LA REINE
    Mais voyons, Ophộlia!

    OPHẫLIA
    Attention, je vous prie! (Elle chante.)
    Son linceul blanc comme la neige des monts...

    Entre LE ROI

    LA REINE, au roi
    Hộlas! regardez, seigneur.

    OPHELIA, continuant
    Est tout garni de suaves fleurs.
    Il est allộ au tombeau sans recevoir l'averse
    Des larmes de l'amour.

    LE ROI
    Comment allez-vous, jolie dame?

    OPHẫLIA
    Bien. Dieu vous rộcompense! On *** que la chouette a ộtộ jadis la fille d'un boulanger. Seigneur, nous savons ce que nous sommes, mais nous ne savons pas ce que nous pouvons ờtre. Que Dieu soit votre table!

    LE ROI
    Quelque allusion son pốre!

    OPHẫLIA
    Ne parlons plus de cela, je vous prie; mais quand on vous demandera ce que cela signifie, rộpondez:
    (elle chante)
    Bonjour! c'est la Saint-Valentin.
    Tous sont levộs de grand matin.
    Me voici, vierge, votre fenờtre,
    Pour ờtre votre Valentine.

    Alors, il se leva et mit ses habits,
    Et ouvrit la porte de sa chambre;
    Et vierge elle y entra, et puis oncques vierge
    Elle n'en sortit.

    LE ROI
    Jolie Ophộlia!

    OPHẫLIA
    En vộritộ, je finirai sans blasphốme.
    Par Jộsus ! par sainte Charitộ!
    Au secours ! Ah ! fi ! quelle honte!
    Tous les jeunes gens font ỗa, quand ils en viennent l.
    Par Priape, ils sont blõmer!

    Avant de me chiffonner, ***-elle,
    Vous me promợtes de m'ộpouser.
    C'est ce que j'aurais fait, par ce beau soleil l-bas,
    Si tu n'ộtais venue dans mon lit.

    LE ROI
    Depuis combien de temps est-elle ainsi?

    OPHẫLIA
    J'espốre que tout ira bien. Il faut avoir de la patience ; mais je ne puis m'empờcher de pleurer, en pensant qu'ils l'ont mis dans une froide terre. Mon frốre le saura; et sur ce, je vous remercie de votre bon conseil.
    Allons, mon coche! Bonne nuit, mes dames ; bonne nuit, mes douces dames ; bonne nuit, bonne nuit! (Elle sort.)

    LE ROI, Horatio
    Suivez-la de prốs; veillez bien sur elle, je vous prie. (Horatio sort.) Oh! c'est le poison d'une profonde douleur; il jaillit tout entier de la mort de son pốre. O Gertrude, Gertrude, quand les malheurs arrivent, ils ne viennent pas en ộclaireurs solitaires, mais en bataillons. D'abord, c'ộtait le meurtre de son pốre; puis, le dộpart de votre fils, auteur par sa propre violence de son juste exil. Maintenant, voici le peuple boueux qui s'ameute, plein de pensộes et de rumeurs dangereuses, propos de la mort du bon Polonius. Nous avons ộtourdiment agi en l'enterrant secrốtement... Puis, voici la pauvre Ophộlia sộparộe d'elle-mờme et de ce noble jugement sans lequel nous sommes des effigies, ou de simples bờtes. Enfin, ce qui est aussi gros de troubles que tout le reste, voici son frốre, secrốtement revenu de France, qui se repaợt de sa stupeur, s'enferme dans des nuages, et trouve partout des ờtres bourdonnants qui lui empoisonnent l'oreille des rộcits envenimộs de la mort de son pốre, oự leur misộrable argumentation n'hộsite pas, pour ses besoins, nous accuser d'oreille en oreille. O ma chốre Gertrude, tout cela tombe sur moi comme une mitraille meurtriốre, et me donne mille morts superflues. (Bruit derriốre le thộõtre.)

    LA REINE
    Dieu! quel est ce bruit?

    Entre UN GENTILHOMME

    LE ROI
    Oự sont mes Suisses? Qu'ils gardent la porte! De quoi s'agit-il?

    LE GENTILHOMME
    Sauvez-vous, monsieur. L'Ocộan, franchissant ses limites, ne dộvore pas la plaine avec une rapi***ộ plus impitoyable que le jeune Laertes, portộ sur le flot de l'ộmeute, ne renverse vos officiers. La populace l'acclame roi; et comme si le monde ne faisait que commencer, comme si l'Antiquitộ qui ratifie tous les titres, la coutume qui les soutient, ộtaient oubliộes et inconnues, elle crie : A nous de choisir! Laertes sera roi! Les chapeaux, les mains, les voix applaudissent jusqu'aux nuages ce cri : Laertes sera roi! Laertes roi!

    LA REINE
    Avec quelle joie ils jappent sur une piste menteuse! Oh! vous faites fausse route, infidốles chiens danois.

    LE ROI
    Les portes sont enfoncộes! (Bruit derriốre le thộõtre.)

    Entre LAERTES, suivi d'une foule de Danois

    LAERTES
    Oự est ce roi ?... Messieurs, tenez-vous tous dehors.

    LES DANOIS
    Non, entrons.

    LAERTES
    Je vous en prie, laissez-moi faire.

    LES DANOIS
    Oui! oui! (Ils se retirent dehors.)

    LAERTES
    Je vous remercie... Gardez la porte... ễ toi, roi vil, rends-moi mon pốre.

    LA REINE
    Du calme, mon bon Laertes!

    LAERTES
    Chaque goutte de sang qui se calme en moi me proclame bõtard, crie mon pốre: Cocu! et marque du mot: Prostituộe! le front chaste et immaculộ de ma vertueuse mốre.

    LE ROI
    Par quel motif, Laertes, ta rộbellion prend-elle ces airs de gộant? Lõchez-le, Gertrude ; ne craignez rien pour notre personne : une telle divinitộ fait la haie autour d'un roi que la trahison ne fait qu'entrevoir ses projets et reste impuissante... Dis-moi, Laertes, pourquoi tu es si furieux. Lõchez-le, Gertrude. Parle, l'ami!

    LAERTES
    Oự est mon pốre?

    LE ROI
    Mort.

    LA REINE
    Mais pas par la faute du roi.

    LE ROI
    Laissez-le faire toutes ses questions.

    LAERTES
    Comment se fait-il qu'il soit mort? Je ne veux pas qu'on jongle avec moi. Aux enfers, l'allộgeance! Au plus noir dộmon, la foi jurộe! Conscience, religion, au fond de l'abợme! J'ose la damnation... Je suis rộsolu sacrifier ma vie dans les deux mondes; advienne que pourra! je ne veux qu'une chose, venger jusqu'au bout mon pốre.

    LE ROI
    Qui donc vous arrờtera?

    LAERTES
    Ma volontộ, non celle du monde entier. Quant mes moyens, je les mộnagerai si bien que j'irai loin avec peu.

    LE ROI
    Bon Laertes, parce que vous dộsirez savoir la vộritộ sur la mort de votre cher pốre, est-il ộcrit dans votre vengeance que vous ruinerez par un coup suprờme amis et ennemis, ceux qui perdent et ceux qui gagnent cette mort?

    LAERTES
    Je n'en veux qu' ses ennemis.

    LE ROI
    Eh bien! voulez-vous les connaợtre?

    LAERTES
    Quant ses bons amis, je les recevrai bras tout grands ouverts; et, comme le pộlican qui s'arrache la vie par bontộ, je les nourrirai de mon sang.

    LE ROI
    Ah! voil que vous parlez comme un bon enfant, comme un vrai gentilhomme. Que je suis innocent de la mort de votre pốre et que j'en ộprouve une douleur bien profonde, c'est ce qui apparaợtra votre raison aussi clairement que le jour vos yeux.

    LES DANOIS, derriốre le thộõtre
    Laissez-la entrer.

    LAERTES
    Qu'y a-t-il? Quel est ce bruit?


    Entre OPHẫLIA, bizarrement coiffộe de fleurs et
    de brins de paille

    ễ incendie, dessốche ma cervelle! Larmes sept fois salộes, brỷlez mes yeux jusqu' les rendre insensibles et impuissants! Par le ciel, ta folie sera payộe si cher que le poids de la vengeance retournera le flộau. ễ rose de mai! chốre fille, bonne soeur, suave Ophộlia! O cieux! est-il possible que la raison d'une jeune fille soit aussi mortelle que la vie d'un vieillard ? Sa nature s'est dissoute en amour; et, devenue subtile, elle envoie les plus prộcieuses ộmanations de son essence vers l'ờtre aimộ.

    OPHẫLIA, chantant
    Ils l'ont portộ tờte nue sur la civiốre.
    Hey no nonny! nonny hey nonny!
    Et sur son tombeau il a plu bien des larmes.
    Adieu, mon tourtereau!

    LAERTES
    Tu aurais ta raison et tu me prờcherais la vengeance, que je serais moins ộmu.

    OPHẫLIA
    Il faut que vous chantiez:
    bas ! bas ! jetez-le bas!
    Oh! comme ce refrain est propos. Il s'agit de l'intendant perfide qui a volộ la fille de son maợtre.

    LAERTES
    Ces riens-l en disent plus que bien des choses.

    OPHẫLIA, Laertes
    Voici du romarin; c'est comme souvenir : de grõce, amour, souvenez-vous; et voici des pensộes, en guise de pensộes.

    LAERTES
    Leỗon donnộe par la folie! Les pensộes et les souvenirs
    rộunis.

    OPHẫLIA, au roi
    Voici pour vous du fenouil et des colombines. ( la reine.) Voil de la rue pour vous, et en voici un peu pour moi; nous pouvons bien toutes deux l'appeler herbe de grõce, mais elle doit avoir votre main un autre sens qu' la mienne... Voici une põquerette. Je vous aurais bien donnộ des violettes, mais elles se sont toutes fanộes, quand mon pốre est mort... On *** qu'il a fait une bonne fin. (Elle chante.)
    Car le bon cher Robin est toute ma joie.

    LAERTES
    Mộlancolie, affliction, frộnộsie, enfer mờme, elle donne tout je ne sais quel charme et quelle grõce.

    OPHẫLIA, chantant
    Et ne reviendra-t-il pas?
    Et ne reviendra-t-il pas?
    Non! Non! il est mort.
    Va ton lit de mort.
    Il ne reviendra jamais.

    Sa barbe ộtait blanche comme neige,
    Toute blonde ộtait sa tờte.
    Il est parti! il est parti!
    Et nous perdons nos cris.
    Dieu ait pitiộ de son õme!
    Et de toutes les õmes chrộtiennes! Je prie Dieu. Dieu
    soit avec vous! (Sort Ophộlia.)

    LAERTES
    Voyez-vous ceci, ụ Dieu?

    LE ROI
    Laertes, il faut que je raisonne avec votre douleur; sinon, c'est un droit que vous me refusez. Retirons-nous un moment; faites choix de vos amis les plus sages; ils nous entendront et jugeront entre vous et moi. Si directement ou indirectement ils nous trouvent compromis, nous vous abandonnerons notre royaume, notre couronne, notre vie et tout ce que nous appelons nụtre, en rộparation. Sinon, rộsignez-vous nous accorder votre patience, et nous travaillerons d'accord avec votre ressentiment, pour lui donner une juste satisfaction.

    LAERTES
    Soit! L'ộtrange mort de mon pốre, ses mystộrieuses funộrailles, oự tout a manquộ : trophộe, panoplie, ộcusson au-dessus du corps, rite nobiliaire, apparat d'usage, me crient, comme une voix que le ciel ferait entendre la terre, que je dois faire une enquờte.

    LE ROI
    Faites-la, et que la grande hache tombe l oự est le crime! Venez avec moi, je vous prie. (Ils sortent.)

    SCẩNE VI

    ------------------------------------
    UNE CHAMBRE CHEZ HORATIO
    Entrent HORATIO et UN SERVITEUR

    HORATIO
    Qui sont ceux qui voudraient me parler?

    LE SERVITEUR
    Des matelots, monsieur; ils disent qu'ils ont des lettres pour vous.

    HORATIO
    Qu'ils entrent! (Sort le serviteur.) J'ignore de quelle partie du monde ce salut peut me venir, si ce n'est du seigneur Hamlet.

    (Entrent les matelots.)

    PREMIER MATELOT
    Dieu vous bộnisse, seigneur!

    HORATIO
    Qu'il te bộnisse aussi!

    PREMIER MATELOT
    Il le fera, monsieur, si ỗa lui plaợt. Voici une lettre pour vous, monsieur; elle est de l'ambassadeur qui s'ộtait embarquộ pour l'Angleterre; si toutefois votre nom est Horatio, ainsi qu'on me l'a fait savoir.

    HORATIO, lisant
    "Horatio, quand tu auras parcouru ces lignes, donne ces gens les moyens d'arriver jusqu'au roi: ils ont des lettres pour lui. A peine ộtions-nous vieux de deux jours en mer, qu'un pirate, armộ en guerre, nous a donnộ la chasse. Voyant que nous ộtions moins bons voiliers que lui, nous avons dộployộ la hardiesse du dộsespoir. Le grappin a ộtộ jetộ et je suis montộ l'abordage ; tout coup leur navire s'est dộgagộ du nụtre, et seul, ainsi, je suis restộ leur prisonnier. Ils ont agi avec moi en ban***s misộricordieux, mais ils savaient ce qu'ils faisaient : je suis destinộ leur ờtre d'un bon rapport. Fais parvenir au roi les lettres que je lui envoie, et viens me rejoindre aussi vite que si tu fuyais la mort. J'ai te dire l'oreille des paroles qui te rendront muet ; pourtant elles seront encore trop faibles pour le calibre de la vộritộ. Ces braves gens te conduiront oự je suis. Rosencrantz et Guildenstern continuent leur route vers l'Angleterre. J'ai beaucoup te parler sur leur compte. Adieu! Celui que tu sais ờtre toi."

    ôHAMLET. ằ
    Venez, je vais vous donner le moyen de remettre ces lettres, et dộpờchez-vous, pour que vous puissiezme conduire plus vite vers celui de qui vous les tenez. (Ils sortent.)

    SCẩNE VII

    ---------------------------------------
    DANS LE CHTEAU
    Entrent LE ROI et LAERTES

    LE ROI
    Maintenant il faut que votre conscience scelle mon acquittement, et que vous m'inscriviez dans votre coeur comme ami, puisque vous savez par des renseignements certains que celui qui a tuộ votre noble pốre en voulait ma vie.

    LAERTES
    Cela paraợt ộvident. Mais ***es-moi pourquoi vous n'avez pas fait de poursuite contre des actes d'une nature si criminelle et si grave, ainsi que votre sỷretộ, votre sagesse, tout enfin devait vous y exciter?

    LE ROI
    Oh! pour deux raisons spộciales qui peut-ờtre vous sembleront puộriles, mais qui pour moi sont fortes. La reine, sa mốre, ne vit presque que par ses yeux; et quant moi, est-ce une vertu? est-ce une calamitộ? elle est tellement liộe ma vie et mon õme que, comme l'astre qui ne peut se mouvoir que dans sa sphốre, je ne puis me mouvoir que par elle. L'autre motif pour lequel j'ai ộvitộ une accusation publique, c'est la grande affection que le peuple lui porte. Celui-ci plongerait toutes les fautes d'Hamlet dans son amour, et, comme la source qui change le bois en pierre, ferait de ses chaợnes des reliques; si bien que mes flốches, faites d'un bois trop lộger pour un vent si violent, retourneraient vers mon arc au lieu d'atteindre le but.

    LAERTES
    J'ai perdu un noble pốre; ma soeur est rộduite un ộtat dộsespộrộ, elle dont le mộrite, si elle pouvait recouvrer ses facultộs, se porterait la face du siốcle entier le champion de son incomparable perfection. Ah ! je serai vengộ!

    LE ROI
    Ne troublez pas vos sommeils pour cela. Ne nous croyez pas d'une ộtoffe si plate et si moutonniốre que nous puissions nous laisser tirer la barbe par le danger et regarder cela comme un passe-temps. Vous en saurez bientụt davantage. J'aimais votre pốre, et nous nous aimons nous-mờmes, et cela, j'espốre, peut vous faire imaginer...

    (Entre un messager.)

    Qu'est-ce? Quelle nouvelle?

    LE MESSAGER
    Monseigneur, des lettres d'Hamlet celle-ci pour Votre Majestộ; celle-l pour la reine.

    LE ROI
    D'Hamlet! Qui les a apportộes?

    LE MESSAGER
    Des matelots, ce qu'on ***, monseigneur je ne les ai pas vus. Elles m'ont ộtộ transmises par Claudio qui les a reỗues le premier.

    LE ROI
    Laertes, vous allez les entendre. Laissez-nous.
    (Sort le messager.)

    LE ROI, lisant
    "Haut et puissant Seigneur, vous saurez que j'ai ộtộ dộposộ nu sur la terre de votre royaume. Demain je demanderai la faveur de voir votre royale personne, et alors, aprốs avoir rộclamộ votre indulgence, je vous raconterai ce qui a occasionnộ mon retour soudain et plus ộtrange encore."

    "HAMLET"
    Qu'est-ce que cela signifie? Est-ce que tous les autres sont de retour? Ou est-ce une plaisanterie, et n'y a-t-il rien de vrai?

    LAERTES
    Reconnaissez-vous la main?

    LE ROI
    C'est l'ộcriture d'Hamlet. Nu! Et en post-scriptum, ici, il ajoute : Seul! Pouvez-vous m'expliquer cela?

    LAERTES
    Je m'y perds, monseigneur. Mais qu'il vienne! Je sens se rộchauffer mon coeur malade, l'idộe de vivre et de lui dire en face: Voil ce que tu as fait!

    LE ROI
    S'il en est ainsi, Laertes... comment peut-il en ờtre ainsi ?... Comment peut-il en ờtre autrement ?... Laissez-vous mener par moi, voulez-vous?

    LAERTES
    Oui, monseigneur, pourvu que vous ne me meniez pas faire la paix.

    LE ROI
    Si fait, la paix avec toi-mờme. S'il est vrai qu'il soit de retour, et que, reculant devant ce voyage, il soit rộsolu ne plus l'entreprendre... je le soumettrai une ộpreuve, maintenant mỷre dans ma pensộe, a laquelle il ne peut manquer de succomber. Sa mort ne fera pas murmurer un souffle de blõme, et sa mốre elle-mờme en absoudra la cause et n'y verra qu'un accident.

    LAERTES
    Monseigneur, je me laisse mener; d'autant plus volontiers, si vous faites en sorte que je sois l'instrument.

    LE ROI
    Voil qui tombe bien. Depuis votre voyage, on vous a beaucoup vantộ, et cela en prộsence d'Hamlet, pour un talent oự vous brillez, ***-on; toutes vos qualitộs rộunies ont arrachộ de lui moins de jalousie que celle-l seule qui, mon avis, est de l'ordre le plus insignifiant.

    LAERTES
    Quelle est cette qualitộ, monseigneur?

    LE ROI
    Un simple ruban au chapeau de la jeunesse, mais nộcessaire pourtant; car un costume frivole et dộbraillộ ne sied pas moins la jeunesse qu' l'õge mỷr les sombres fourrures qui sauvegardent la santộ et la gravitộ. Il y a quelque deux mois, se trouvait ici un gentilhomme de Normandie; j'ai vu moi-mờme les Franỗais, j'ai servi contre eux, et je sais qu'ils montent bien cheval.., mais celui-ci ộtait un cavalier magique : il prenait racine en selle, et il faisait exộcuter son cheval des choses si merveilleuses qu'il semblait faire corps et se confondre moitiộ avec la noble bờte; il dộpassait tellement mes idộes, que tout ce que je pouvais imaginer d'exercices et de tours d'adresse, ộtait au-dessous de ce qu'il faisait.

    LAERTES
    Un Normand, ***es-vous?

    LE ROI
    Un Normand.

    LAERTES
    Sur ma vie, c'est Lamond.

    LE ROI
    Lui-mờme.

    LAERTES
    Je le connais bien : vraiment, il est le joyau, la perle de son pays.

    LE ROI
    C'est lui qui vous rendait hommage : il vous dộclarait maợtre dans la pratique de l'art de la dộfense, l'ộpộe spộcialement; il s'ộcriait que ce serait un vrai miracle si quelqu'un vous pouvait tenir tờte. Il jurait que les escrimeurs de son pays n'auraient ni ộlan, ni parade, ni coup d'oeil, si vous ộtiez leur adversaire. Ces propos, mon cher, avaient tellement envenimộ la jalousie d'Hamlet qu'il ne faisait que dộsirer et demander votre prompt retour, pour faire assaut avec vous. Eh bien! en tirant parti de ceci...

    LAERTES
    Quel parti, monseigneur?

    LE ROI
    Laertes, votre pốre vous ộtait-il cher? Ou n'ờtes-vous que la douleur en effigie, un visage sans coeur?

    LAERTES
    Pourquoi me demandez-vous cela?

    LE ROI
    Ce n'est pas que je pense que vous n'aimiez pas votre pốre; mais je sais que l'amour est l'oeuvre du temps, et j'ai vu, par les exemples de l'expộrience, que le temps amoindrit l'ộtincelle et la chaleur. Il y a la flamme mờme de l'amour une sorte de mốche, de lumignon, qui finit par s'ộteindre. Rien ne garde jamais la mờme perfection. La perfection, poussộe l'excốs, meurt de plộthore. Ce que nous voulons faire, faisons-le quand nous le voulons, car la volontộ change; elle a autant de dộfaillances et d'entraves qu'il y a de langues, de bras, d'accidents; et alors le devoir faire n'est plus qu'un soupir ộpuisant, qui fait du mal exhaler... Mais allons au vif de l'ulcốre: Hamlet revient. Qu'ờtes-vous prờt entreprendre pour vous montrer le fils de votre pốre en action plus qu'en paroles?

    LAERTES
    lui couper la gorge l'ộglise.

    LE ROI
    Il n'est pas, en effet, de sanctuaire pour le meurtre; il n'y a pas de barriốre pour la vengeance. Eh bien! mon bon Laertes, faites ceci : tenez-vous renfermộ dans votre chambre. Hamlet, en revenant, apprendra que vous ờtes de retour. Nous lui enverrons des gens qui vanteront votre supộrioritộ et mettront un double vernis la renommộe que ce Franỗais vous a faite; enfin, nous vous mettrons face face, et nous ferons des paris sur vos tờtes. Lui, qui est confiant, trốs gộnộreux et dộnuộ de tout calcul, n'examinera pas les fleurets : vous pourrez donc aisộment, avec un peu de prestesse, choisir une ộpộe non mouchetộe, et, par une passe vous connue, venger sur lui votre pốre.

    LAERTES
    Je ferai cela. Et, dans ce dessein, j'empoisonnerai mon ộpộe. J'ai achetộ un charlatan une drogue si meurtriốre que, pour peu qu'on y trempe un couteau, une fois que le sang a coulộ, le cataplasme le plus rare, composộ de tous les simples qui ont quelque vertu sous la lune, ne pourrait pas sauver de la mort l'ờtre le plus lộgốrement ộgratignộ. Je tremperai ma pointe dans ce poison; et, pour peu que je l'ộcorche, c'est la mort.

    LE ROI
    Rộflộchissons-y encore; pesons bien, et quant au temps et quant aux moyens, ce qui peut convenir le plus notre plan. Si celui-ci devait ộchouer, et qu'une mauvaise exộcution laissõt voir notre dessein, mieux vaudrait n'avoir rien tentộ. Il faut donc que nous ayons un projet de rechange qui puisse servir au cas oự le premier ferait long feu. Doucement! Voyons! Nous ộtablirons un pari solennel sur les coups portộs. J'y suis! Quand l'exercice vous aura ộchauffộs et altộrộs, et dans ce but vous ferez vos attaques les plus violentes, il demandera boire; j'aurai prộparộ un calice tout exprốs : une gorgộe seulement, et si, par hasard, il a ộchappộ votre lame empoisonnộe, notre but est encore atteint.

    Entre la REINE

    Qu'est-ce donc, ma douce reine?

    LA REINE
    Un malheur marche sur les talons d'un autre, tant ils se suivent de prốs : votre soeur est noyộe, Laertes.

    LAERTES
    Noyộe!Oh!Oự donc?

    LA REINE
    Il y a en travers d'un ruisseau un saule qui mire ses feuilles grises dans la glace du courant. C'est l qu'elle est venue, portant de fantasques guirlandes de renoncules, d'orties, de marguerites et de ces longues fleurs pourpres que les bergers licencieux nomment d'un nom plus grossier, mais que nos froides vierges appellent doigts d'hommes morts. L, tandis qu'elle grimpait pour suspendre sa sauvage couronne aux rameaux inclinộs, une branche envieuse s'est cassộe, et tous ses trophộes champờtres sont, comme elle, tombộs dans le ruisseau en pleurs. Ses vờtements se sont ộtalộs et l'ont soutenue un moment, nouvelle sirốne, pendant qu'elle chantait des bribes de vieilles chansons, comme insensible sa propre dộtresse, ou comme une crộature naturellement formộe pour cet ộlộment. Mais cela n'a pu durer longtemps : ses vờtements, alourdis par ce qu'ils avaient bu, ont entraợnộ la pauvre malheureuse de son chant mộlodieux une mort fangeuse.

    LAERTES
    Hộlas! elle est donc noyộe?

    LA REINE
    Noyộe, noyộe.

    LAERTES
    Tu n'as dộj que trop d'eau, pauvre Ophộlia; je retiendrai donc mes larmes... Et pourtant... (Il sanglote,) c'est un tic chez nous : la nature garde ses habitudes, quoi qu'en dise la honte. Quand ces pleurs auront coulộ, plus de femmelette en moi! Adieu, monseigneur! j'ai des paroles de feu qui flamboieraient, si cette folle douleur ne les ộteignait pas. (Il sort.)

    LE ROI
    Suivons-le, Gertrude. Quelle peine j'ai eue calmer sa rage! Je crains bien que ceci ne lui donne un nouvel ộlan. Suivons-le donc. (Ils sortent.)



    Sayonara!!! Good Night, sleep tight, don't let the bed bugs bite.

Chia sẻ trang này