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L'art d'être grand-père (1877) - Victor Hugo

Chủ đề trong 'Pháp (Club de Francais)' bởi Angelique, 25/11/2001.

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  1. Angelique

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    ENFANTS, OISEAUX ET FLEURS
    I
    J'aime un groupe d'enfants qui rit et qui s'assemble;
    J'ai remarqué qu'ils sont presque tous blonds, il semble
    Qu'un doux soleil levant leur dore les cheveux.
    Lorsque Roland, rempli de projets et de voeux,
    Était petit, après l'escrime et les parades,
    Il jouait dans les champs avec ses camarades
    Raymond le paresseux et Jean de Pau; tous trois
    Joyeux; un moine un jour, passant avec sa croix,
    Leur demanda, c'était l'abbé de la contrée:
    ??"Quelle est la chose, enfants, qui vous plaît déchirée ?
    ??"La chair d'un boeuf saignant, répon*** Jean de Pau.
    ??"Un livre, *** Raymond.??"Roland ***: Un drapeau.
    II
    Je suis des bois l'hôte fidèle,
    Le jardinier des sauvageons.
    Quand l'automne vient, l'hirondelle
    Me *** tout bas: Déménageons.
    Après frimaire, après nivôse,
    Je vais voir si les bourgeons frais
    N'ont pas besoin de quelque chose
    Et si rien ne manque aux forêts.
    Je dis aux ronces: Croissez, vierges !
    Je dis: Embaume! au serpolet;
    Je dis aux fleurs bordant les berges:
    Faites avec soin votre ourlet.
    Je surveille, entr'ouvrant la porte,
    Le vent soufflant sur la hauteur;
    Car tromper sur ce qu'il apporte
    C'est l'usage de ce menteur.
    Je viens dès l'aube, en diligence,
    Voir si rien ne fait dévier
    Toutes les mesures d'urgence
    Que prend avril contre janvier.
    Tout finit, mais tout recommence,
    Je m'intéresse au procédé
    De rajeunissement immense,
    Vainement par l'ombre éludé.
    J'aime la broussaille mouvante,
    Le lierre, le lichen vermeil,
    Toutes les coiffures qu'invente
    Pour les ruines le soleil.
    Quand mai fleuri met des panaches
    Aux sombres donjons mécontents,
    Je crie à ces vieilles ganaches:
    Laissez donc faire le printemps!
  2. Angelique

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    DANS LE JARDIN
    Jeanne et Georges sont là. Le noir ciel orageux
    Devient rose, et répand l'aurore sur leurs jeux;
    Ô beaux jours! Le printemps auprès de moi s'empresse;
    Tout ver***; la forêt est une enchanteresse;
    L'horizon change, ainsi qu'un décor d'opéra;
    Appelez ce doux mois du nom qu'il vous plaira,
    C'est mai, c'est floréal; c'est l'hyménée auguste
    De la chose tremblante et de la chose juste,
    Du nid et de l'azur, du brin d'herbe et du ciel;
    C'est l'heure où tout se sent vaguement éternel;
    C'est l'éblouissement, c'est l'espoir, c'est l'ivresse;
    La plante est une femme, et mon vers la caresse;
    C'est, grâce aux frais glaïeuls, grâce aux purs liserons,
    La vengeance que nous poètes nous tirons
    De cet affreux janvier, si laid; c'est la revanche
    Qu'avril contre l'hiver prend avec la pervenche;
    Courage, avril! Courage, ô mois de mai! Ciel bleu,
    Réchauffe, resplendis, sois beau ! Bravo, bon Dieu !
    Ah! jamais la saison ne nous fait banqueroute.
    L'aube passe en semant des roses sur sa route.
    Flamme! ombre! tout est plein de ténèbres et d'yeux;
    Tout est mystérieux et tout est radieux;
    Qu'est-ce que l'alcyon cherche dans les tempêtes ?
    L'amour; l'antre et le nid ayant les mêmes fêtes,
    Je ne vois pas pourquoi l'homme serait honteux
    De ce que les lions pensifs ont devant eux,
    De l'amour, de l'hymen sacré, de toi, nature!
    Tout cachot aboutit à la même ouverture,
    La vie; et toute chaîne, à travers nos douleurs,
    Commence par l'airain et finit par les fleurs.
    C'est pourquoi nous avons d'abord la haine infâme,
    La guerre, les tourments, les fléaux, puis la femme,
    La nuit n'ayant pour but que d'amener le jour.
    Dieu n'a fait l'univers que pour faire l'amour.
    Toujours, comme un poète aime, comme les sages
    N'ont pas deux vérités et n'ont pas deux visages,
    J'ai laissé la beauté, fier et suprême attrait,
    Vaincre, et faire de moi tout ce qu'elle voudrait;
    Je n'ai pas plus caché devant la femme nue
    Mes transports, que devant l'étoile sous la nue
    Et devant la blancheur du cygne sur les eaux.
    Car dans l'azur sans fond les plus profonds oiseaux
    Chantent le même chant, et ce chant, c'est la vie.
    Sois puissant, je te plains; sois aimé, je t'envie.
  3. Angelique

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    LE TROUBLE-FÊTE
    Les belles filles sont en fuite
    Et ne savent où se cacher.
    Brune et blonde, grande et petite,
    Elles dansaient près du clocher;
    Une chantait, pour la cadence;
    Les garçons aux fraîches couleurs
    Accouraient au bruit de la danse,
    Mettant à leurs chapeaux des fleurs;
    En revenant de la fontaine,
    Elles dansaient près du clocher.
    J'aime Toinon, disait le chêne;
    Moi, Suzon, disait le rocher.
    Mais l'homme noir du clocher sombre
    Leur a crié:??"Laides! fuyez!??"
    Et son souffle brusque a dans l'ombre
    Éparpillé ces petits pieds.
    Toute la danse s'est enfuie,
    Les yeux noirs avec les yeux bleus,
    Comme s'envole sous la pluie
    Une troupe d'oiseaux frileux.
    Et cette déroute a fait taire
    Les grands arbres tout soucieux,
    Car les filles dansant sur terre
    Font chanter les nids dans les cieux.
    ??"Qu'a donc l'homme noir ? disent-elles.??"
    Plus de chants; car le noir témoin
    A fait bien loin enfuir les belles,
    Et les chansons encor plus loin.
    Qu'a donc l'homme noir ???"Je l'ignore,
    Répond le moineau, gai ban***;
    Elles pleurent comme l'aurore.
    Mais un myosotis leur ***:
    ??"Je vais vous expliquer ces choses.
    Vous n'avez point pour lui d'appas;
    Les papillons aiment les roses,
    Les hiboux ne les aiment pas.
  4. Angelique

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    ORA, AMA
    Le long des berges court la perdrix au pied leste.
    Comme pour l'entra?đner dans leur danse c?âleste,
    Les nuages ont pris la lune au milieu d'eux.
    Petit Georges, veux-tu ? nous allons tous les deux
    Nous en aller jouer là-bas sous le vieux saule.
    La nuit tombe; on se baigne; et, la faulx sur l'?âpaule,
    Le faucheur rentre au g?đte, essuyant sa sueur.
    Le cr?âpuscule jette une vague lueur
    Sur des formes qu'on voit rire dans la rivi?ăre.
    Monsieur le cur?â passe et ferme son br?âviaire;
    Il est trop tard pour lire, et ce reste de jour
    Conseille la pri?ăre à qui n'a plus l'amour.
    Aimer, prier, c'est l'aube et c'est le soir de l'?Âme.
    Et c'est la m?ême chose au fond; aimer la femme,
    C'est prier Dieu; pour elle on s'agenouille aussi.
    Un jour tu seras homme et tu liras ceci.
    En attendant, tes yeux sont grands, et je te parle,
    Mon Georges, comme si je parlais à mon Charle.
    Quand l'aile rose meurt, l'aile bleue a son tour.
    La pri?ăre a la m?ême audace que l'amour,
    Et l'amour a le m?ême effroi que la pri?ăre.
    Il fait presque grand jour encor dans la clairi?ăre.
    L'ang?âlus sonne au fond de l'horizon bruni.
    ?" ciel sublime ! sombre ?âdifice infini!
    Muraille inexprimable, obscure et rayonnante!
    Oh ! comment p?ân?âtrer dans la maison tonnante ?
    Le jeune homme est pensif, le vieillard est troubl?â,
    Et devant l'inconnu, vaguement ?âtoil?â,
    Le soir tremblant ressemble à l'aube frissonnante.
    La pri?ăre est la porte et l'amour est la cl?â.
  5. Angelique

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    LA MISE EN LIBERTÉ
    Après ce rude hiver, un seul oiseau restait
    Dans la cage où jadis tout un monde chantait.
    Le vide s'était fait dans la grande volière.
    Une douce mésange, autrefois familière,
    Était là seule avec ses souvenirs d'oiseau.
    N'être jamais sans grain, sans biscuit et sans eau,
    Voir entrer quelquefois dans sa cage une mouche,
    C'était tout son bonheur. Elle en était farouche.
    Rien, pas même un serin, et pas même un pierrot.
    La cage, c'est beaucoup; mais le désert, c'est trop.
    Triste oiseau! dormir seul, et, quand l'aube s'allume,
    Être seul à fouiller de son bec sous sa plume!
    Le pauvre petit être était redevenu
    Sauvage, à faire ainsi tourner ce perchoir nu.
    Il semblait par moments s'être donné la tâche
    De grimper d'un bâton à l'autre sans relâche;
    Son vol paraissait fou; puis soudain le reclus
    Se taisait, et, caché, morne, ne bougeait plus.
    À voir son gonflement lugubre, sa prunelle,
    Et sa tête ployée en plein jour sous son aile,
    On devinait son deuil, son veuvage, et l'ennui
    Du joyeux chant de tous dans l'ombre évanoui.
    Ce matin j'ai poussé la porte de la cage.
    J'y suis entré.
    Deux mâts, une grotte, un bocage,
    Meublent cette prison où frissonne un jet d'eau;
    Et l'hiver on la couvre avec un grand rideau.
    Le pauvre oiseau, voyant entrer ce géant sombre,
    A pris la fuite en haut, puis en bas, cherchant l'ombre,
    Dans une anxiété d'inexprimable horreur;
    L'effroi du faible est plein d'impuissante fureur;
    Il voletait devant ma main épouvantable.
    Je suis, pour le saisir, monté sur une table.
    Alors, terrifié, vaincu, jetant des cris,
    Il est allé tomber dans un coin; je l'ai pris.
    Contre le monstre immense, hélas, que peut l'atome ?
    À quoi bon résister quand l'énorme fantôme
    Vous tient, captif hagard, fragile et désarmé ?
    Il était dans mes doigts inerte, l'oeil fermé,
    Le bec ouvert, laissant pendre son cou débile,
    L'aile morte, muet, sans regard, immobile,
    Et je sentais bondir son petit coeur tremblant.
    Avril est de l'aurore un frère ressemblant;
    Il est éblouissant ainsi qu'elle est vermeille.
    Il a l'air de quelqu'un qui rit et qui s'éveille.
    Or, nous sommes au mois d'avril, et mon gazon,
    Mon jardin, les jardins d'à côté, l'horizon,
    Tout, du ciel à la terre, est plein de cette joie
    Qui dans la fleur embaume et dans l'astre flamboie:
    Les ajoncs sont en fête, et dorent les ravins
    Où les abeilles font des murmures divins;
    Penché sur les cressons, le myosotis goûte
    À la source, tombant dans les fleurs goutte à goutte;
    Le brin d'herbe est heureux; l'âcre hiver se dissout;
    La nature parait contente d'avoir tout,
    Parfums, chansons, rayons, et d'être hospitalière.
    L'espace aime.
    Je suis sorti de la volière,
    Tenant toujours l'oiseau; je me suis approché
    Du vieux balcon de bois par le lierre caché;
    Ô renouveau! Soleil ! tout palpite, tout vibre,
    Tout rayonne; et j'ai ***, ouvrant la main: Sois libre!
    L'oiseau s'est évadé dans les rameaux flottants,
    Et dans l'immensité splendide du printemps;
    Et j'ai vu s'en aller au loin la petite âme
    Dans cette clarté rose où se mêle une flamme,
    Dans l'air profond, parmi les arbres infinis,
    Volant au vague appel des amours et des nids,
    Planant éperdument vers d'autres ailes blanches,
    Ne sachant quel palais choisir, courant aux branches,
    Aux fleurs, aux flots, aux bois fraîchement reverdis,
    Avec l'effarement d'entrer au paradis.
    Alors, dans la lumière et dans la transparence,
    Regardant cette faite et cette délivrance,
    Et ce pauvre être, ainsi disparu dans le port,
    Pensif, je me suis ***: Je viens d'être la mort.
  6. Angelique

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    JEANNE LAPIDÉE
    BRUXELLES. ??" NUIT DU 27 MAI
    Je regardai.
    Je vis, tout près de la croisée,
    Celui par qui la pierre avait été lancée;
    Il était jeune; encor presque un enfant, déjà
    Un meurtrier.
    Jeune homme, un dieu te protégea,
    Car tu pouvais tuer cette pauvre petite!
    Comme les sentiments humains s'écroulent vite
    Dans les coeurs gouvernés par le prêtre qui ment,
    Et comme un imbécile est féroce aisément!
    Loyola sait changer Jocrisse en Schinderhanne,
    Car un tigre est toujours possible dans un âne.
    Mais Dieu n'a pas permis, sombre enfant, que ta main
    Fit cet assassinat catholique et romain;
    Le coup a manqué. Va, triste spectre éphémère,
    Deviens de l'ombre. Fuis! Moi, je songe à ta mère.
    Ô femme, ne sois pas mau***e! Je reçois
    Du ciel juste un rayon clément. Qui que tu sois,
    Mère, hélas ! quel que soit ton enfant, sois bénie!
    N'en sois pas responsable et n'en sois pas punie!
    Je lui pardonne au nom de mon ange innocent!
    Lui-même il fut jadis l'être humble en qui descend
    L'immense paradis, sans pleurs, sans deuils, sans voiles,
    Avec tout son sourire et toutes ses étoiles.
    Quand il naquit, de joie et d'amour tu vibras.
    Il dormait sur ton sein comme Jeanne en mes bras;
    Il était de ton toit le mystérieux hôte;
    C'était un ange alors, et ce n'est pas ta faute,
    Ni la sienne, s'il est un ban*** maintenant.
    Le prêtre, infortuné lui-même, et frissonnant,
    À qui nous confions la croissance future,
    Imposteur, a rempli cette âme d'imposture;
    L'aveugle a dans ce coeur vidé l'aveuglement.
    À ce lugubre élève, à ce maître inclément
    Je pardonne; le mal a des pièges sans nombre;
    Je les plains; et j'implore au-dessus de nous l'ombre.
    Pauvre mère, ton fils ne sait pas ce qu'il fait.
    Quand Dieu germait en lui, le prêtre l'étouffait.
    Aujourd'hui le voilà dans cette Forêt-noire,
    Le dogme! Ignace ordonne; il est prêt à tout boire,
    Le faux, le vrai, le bien, le mal, l'erreur, le sang!
    Tout! Frappe ! il obéit. Assassine! il consent.
    Hélas ! comment veut-on que je lui sois sévère ?
    Le sommet qui fait grâce au gouffre est le Calvaire.
    Mornes bourreaux, à nous martyrs vous vous fiez;
    Et nous, les lapidés et les crucifiés,
    Nous absolvons le vil caillou, le clou stupide;
    Nous pardonnons. C'est juste. Ah! ton fils me lapide,
    Mère, et je te bénis. Et je fais mon devoir.
    Un jour tu mourras, femme, et puisses-tu le voir
    Se frapper la poitrine, à genoux sur ta fosse!
    Puisse-t-il voir s'éteindre en lui la clarté fausse,
    Et sentir dans son coeur s'allumer le vrai feu,
    Et croire moins au prêtre et croire plus à Dieu!
  7. Angelique

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    JEANNE ENDORMIE. ??" III
    Jeanne dort; elle laisse, ô pauvre ange banni,
    Sa douce petite âme aller dans l'infini;
    Ainsi le passereau fuit dans la cerisaie;
    Elle regarde ailleurs que sur terre, elle essaie,
    Hélas, avant de boire à nos coupes de fiel,
    De renouer un peu dans l'ombre avec le ciel.
    Apaisement sacré! ses cheveux, son haleine,
    Son teint, plus transparent qu'une aile de phalène,
    Ses gestes indistincts, son calme, c'est exquis.
    Le vieux grand-père, esclave heureux, pays conquis,
    La contemple.
    Cet être est ici-bas le moindre
    Et le plus grand; on voit sur cette bouche poindre
    Un rire vague et pur qui vient on ne sait d'où;
    Comme elle est belle! Elle a des plis de graisse au cou;
    On la respire ainsi qu'un parfum d'asphodèle;
    Une poupée aux yeux étonnés est près d'elle,
    Et l'enfant par moments la presse sur son coeur.
    Figurez-vous cet ange obscur, tremblant, vainqueur,
    L'espérance étoilée autour de ce visage,
    Ce pied nu, ce sommeil d'une grâce en bas âge.
    Oh! quel profond sourire, et compris de lui seul,
    Elle rapportera de l'ombre à son aïeul!
    Car l'âme de l'enfant, pas encor dédorée,
    Semble être une lueur du lointain empyrée,
    Et l'attendrissement des vieillards, c'est de voir
    Que le matin veut bien se mêler à leur soir.
    Ne la réveillez pas. Cela dort, une rose.
    Jeanne au fond du sommeil mé***e et se compose
    Je ne sais quoi de plus céleste que le ciel.
    De lys en lys, de rêve en rêve, on fait son miel,
    Et l'âme de l'enfant travaille, humble et vermeille,
    Dans les songes ainsi que dans les fleurs l'abeille.
  8. Angelique

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    LE PALADIN
    Un lion avait pris un enfant dans sa gueule,
    Et, sans lui faire mal, dans la forêt, aïeule
    Des sources et des nids, il l'avait emporté.
    Il l'avait, comme on cueille une fleur en été,
    Saisi sans trop savoir pourquoi, n'ayant pas même
    Mordu dedans, mépris fier ou pardon suprême;
    Les lions sont ainsi, sombres et généreux.
    Le pauvre petit prince était fort malheureux;
    Dans l'antre, qu'emplissait la grande voix bourrue,
    Blotti, tremblant, nourri d'herbe et de viande crue.
    Il vivait, presque mort et d'horreur hébété.
    C'était un frais garçon, fils du roi d'à côté;
    Tout jeune, ayant dix ans, âge tendre où l'oeil brille;
    Et le roi n'avait plus qu'une petite fille
    Nouvelle-née, ayant deux ans à peine; aussi
    Le roi qui vieillissait n'avait-il qu'un souci,
    Son héritier en proie au monstre; et la province
    Qui craignait le lion plus encor que le prince
    Était fort effarée.
    Un héros qui passait
    Dans le pays fit halte, et ***: Qu'est-ce que c'est ?
    On lui *** l'aventure; il s'en alla vers l'antre.
    *
    Un creux où le soleil lui-même est pâle, et n'entre
    Qu'avec précaution, c'était l'antre où vivait
    L'énorme bête, ayant le rocher pour chevet.
    Le bois avait, dans l'ombre et sur un marécage,
    Plus de rameaux que n'a de barreaux une cage;
    Cette forêt était digne de ce consul ;
    Un menhir s'y dressait en l'honneur d'Irmensul;
    La forêt ressemblait aux halliers de Bretagne;
    Elle avait pour limite une rude montagne,
    Un de ces durs sommets où l'horizon finit;
    Et la ****rne était taillée en plein granit,
    Avec un entourage orageux de grands chênes;
    Les antres, aux cités rendant haines pour haines,
    Contiennent on ne sait quel sombre talion.
    Les chênes murmuraient: Respectez le lion!
    *
    Le héros pénétra dans ce palais sauvage;
    L'antre avait ce grand air de meurtre et de ravage
    Qui sied à la maison des puissants, de l'effroi,
    De l'ombre, et l'on sentait qu'on était chez un roi;
    Des ossements à terre indiquaient que le maître
    Ne se laissait manquer de rien; une fenêtre
    Faite par quelque coup de tonnerre au plafond
    L'éclairait; une brume où la lueur se fond,
    Qui semble aurore à l'aigle et nuit à la chouette,
    C'est toute la clarté qu'un conquérant souhaite;
    Du reste c'était haut et fier; on comprenait
    Que l'être altier couchait sur un lit de genêt
    Et n'avait pas besoin de rideaux de guipure,
    Et qu'il buvait du sang, mais aussi de l'eau pure,
    Simplement, sans valet, sans coupe et sans hanap.
    Le chevalier était armé de pied en cap.
    Il entra.
    *
    Tout de suite il vit dans la tanière
    Un des plus grands seigneurs couronnés de crinière
    Qu'on pût voir, et c'était la bête; elle pensait;
    Et son regard était profond, car nul ne sait
    Si les monstres des bois n'en sont pas les pontifes;
    Et ce lion était un maître aux larges griffes,
    Sinistre, point facile à décontenancer.
    Le héros approcha, mais sans trop avancer.
    Son pas était sonore, et sa plume était rouge.
    Il ne fit remuer rien dans l'auguste bouge.
    La bête était plongée en ses réflexions.
    Thésée entrant au gouffre où sont les Ixions
    Et les Sisyphes nus et les flots de l'Averne,
    Vit à peu près la même implacable ****rne.
    Le paladin, à qui le devoir disait: va!
    Tira l'épée. Alors le lion souleva
    Sa tête doucement d'une façon terrible.
    Et le chevalier ***:??"Salut, ô bête terrible!
    Tu caches dans les trous de ton antre un enfant;
    J'ai beau fouiller des yeux ton repaire étouffant,
    Je ne l'aperçois pas. Or, je viens le reprendre.
    Nous serons bons amis si tu veux me le rendre;
    Sinon, je suis lion aussi, moi, tu mourras;
    Et le père étreindra son enfant dans ses bras,
    Pendant qu'ici ton sang fumera, tiède encore;
    Et c'est ce que verra demain la blonde aurore.
    Et le lion pensif lui ***:??"Je ne crois pas.
    *
    Sur quoi le chevalier farouche fit un pas,
    Bran*** sa grande épée, et ***: Prends garde, sire!
    On vit le lion, chose effrayante, sourire.
    Ne faites pas sourire un lion. Le duel
    S'engagea, comme il sied entre géants, cruel,
    Tel que ceux qui de l'Inde ensanglantent les jungles.
    L'homme allongea son glaive et la bête ses ongles;
    On se prit corps à corps, et le monstre écumant
    Se mit à manier l'homme effroyablement;
    L'un était le vaillant et l'autre le vorace;
    Le lion étreignit la chair sous la cuirasse,
    Et, fauve, et sous sa griffe ardente pétrissant
    Ce fer et cet acier, il fit jaillir le sang
    Du sombre écrasement de toute cette armure,
    Comme un enfant rougit ses doigts dans une mûre;
    Et puis l'un après l'autre il ôta les morceaux
    Du casque et des brassards, et mit à nu les os.
    Et le grand chevalier n'était plus qu'une espèce
    De boue et de limon sous la cuirasse épaisse;
    Et le lion mangea le héros. Puis il mit
    Sa tête sur le roc sinistre et s'endormit.
  9. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    L'ERMITE
    Alors vint un ermite.
    Il s'avan?Đa vers l'antre;
    Grave et tremblant, sa croix au poing, sa corde au ventre,
    Il entra. Le h?âros tout rong?â gisait là
    Informe, et le lion, se r?âveillant, b?Âilla.
    Le monstre ouvrit les yeux, enten*** une haleine,
    Et, voyant une corde autour d'un froc de laine,
    Un grand capuchon noir, un homme là dedans,
    Acheva de b?Âiller, montrant toutes ses dents;
    Puis, auguste, et parlant comme une porte grince,
    Il ***:õ?"Que veux-tu, toi ?õ?"Mon roi.õ?"Quel roi ? õ?"Mon prince.
    õ?"Qui ?õ?"L'enfant.õ?"C'est cela que tu nommes un roi!
    L'ermite salua le lion.õ?"Roi, pourquoi
    As-tu pris cet enfant ?õ?"Parce que je m'ennuie.
    Il me tient compagnie ici les jours de pluie.
    õ?"Rends-le-moi.õ?"Non. Je l'ai.õ?"Qu'en veux-tu faire enfin ?
    Le veux-tu donc manger?õ?"Dame ! si j'avais faim !
    õ?"Songe au p?ăre, à son deuil, à sa douleur am?ăre.
    õ?"Les hommes m'ont tu?â la lionne, ma m?ăre.
    õ?"Le p?ăre est roi, seigneur, comme toi.õ?"Pas autant.
    S'il parle, c'est un homme, et moi, quand on m'entend,
    C'est le lion.õ?"S'il perd ce fils...õ?"Il a sa fille.
    õ?"Une fille, c'est peu pour un roi.õ?"Ma famille
    A moi, c'est l'?Âpre roche et la fauve for?êt,
    Et l'?âclair qui parfois sur ma t?ête appara?đt;
    Je m'en contente.õ?"Sois cl?âment pour une altesse.
    õ?"La cl?âmence n'est pas; tout est de la tristesse.
    õ?"Veux-tu le paradis? Je t'offre le blanc-seing
    Du bon Dieu.õ?"Va-t'en, vieil imb?âcile de saint!
    L'ermite s'en alla.
  10. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    LA CHASSE ET LA NUIT
    Le lion solitaire,
    Plein de l'immense oubli qu'ont les monstres sur terre,
    Se rendormit, laissant l'intègre nuit venir.
    La lune parut, fit un spectre du menhir,
    De l'étang un linceul, du sentier un mensonge,
    Et du noir paysage inexprimable un songe;
    Et rien ne bougea plus dans la grotte, et, pendant
    Que les astres sacrés marchaient vers l'occident
    Et que l'herbe abritait la taupe et la cigale,
    La respiration du grand lion, égale
    Et calme, rassurait les bêtes dans les bois.
    Tout à coup des clameurs, des cors et des abois.
    Un de ces bruits de meute et d'hommes et de cuivres,
    Qui font que brusquement les forêts semblent ivres,
    Et que la nymphe écoute en tremblant dans son lit,
    La rumeur d'une chasse épouvantable emplit
    Toute cette ombre, lac, montagne, bois, prairie,
    Et troubla cette vaste et fauve rêverie.
    Le hallier s'empourpra de tous les sombres jeux
    D'une lueur mêlée à des cris orageux.
    On entendait hurler les chiens chercheurs de proies;
    Et des ombres couraient parmi les claires-voies.
    Cette altière rumeur d'avance triomphait.
    On eût *** une armée; et c'était en effet
    Des soldats envoyés par le roi, par le père,
    Pour délivrer le prince et forcer le repaire,
    Et rapporter la peau sanglante du lion.
    De quel côté de l'ombre est la rébellion,
    Du côté de la bête ou du côté de l'homme ?
    Dieu seul le sait; tout est le chiffre, il est la somme.
    Les soldats avaient fait un repas copieux,
    Étaient en bon état, armés d'arcs et d'épieux,
    En grand nombre, et conduits par un fier capitaine.
    Quelques-uns revenaient d'une guerre lointaine,
    Et tous étaient des gens éprouvés et vaillants.
    Le lion entendait tous ces bruits malveillants,
    Car il avait ouvert sa tragique paupière;
    Mais sa tête restait paisible sur la pierre,
    Et seulement sa queue énorme remuait.
    *
    Au dehors, tout autour du grand antre muet,
    Hurlait le brouhaha de la foule indignée;
    Comme un essaim bourdonne autour d'une araignée,
    Comme une ruche autour d'un ours pris au lacet,
    Toute la légion des chasseurs frémissait;
    Elle s'était rangée en ordre de bataille.
    On savait que le monstre était de haute taille,
    Qu'il mangeait un héros comme un singe une noix,
    Qu'il était plus hautain qu'un tigre n'est sournois,
    Que son regard faisait baisser les yeux à l'aigle;
    Aussi lui faisait-on l'honneur d'un siège en règle.
    La troupe à coups de hache abattait les fourrés;
    Les soldats avançaient l'un sur l'autre serrés,
    Et les arbres tendaient sur la corde les flèches.
    On fit silence, afin que sur les feuilles sèches
    On entendît les pas du lion, s'il venait.
    Et les chiens, qui selon le moment où l'on est
    Savent se taire, allaient devant eux, gueule ouverte,
    Mais sans bruit. Les flambeaux dans la bruyère verte
    Rôdaient, et leur lumière allongée en avant
    Éclairait ce chaos d'arbres tremblant au vent;
    C'est ainsi qu'une chasse habile se gouverne.
    On voyait à travers les branches la ****rne,
    Sorte de masse informe au fond du bois épais,
    Béante, mais muette, ayant un air de paix
    Et de rêve, et semblant ignorer cette armée.
    D'un âtre où le feu couve il sort de la fumée,
    D'une ville assiégée on entend le beffroi;
    Ici rien de pareil; avec un vague effroi,
    Tous observaient, le poing sur l'arc ou sur la pique,
    Cette tranquillité sombre de l'antre épique;
    Les dogues chuchotaient entre eux je ne sais quoi;
    De l'horreur qui dans l'ombre obscure se tient coi,
    C'est plus inquiétant qu'un fracas de tempête.
    Cependant on était venu pour cette bête,
    On avançait, les yeux fixés sur la forêt,
    Et non sans redouter ce que l'on désirait;
    Les éclaireurs guettaient, élevant leur lanterne;
    On regardait le seuil béant de la ****rne;
    Les arbres frissonnaient, silencieux témoins;
    On marchait en bon ordre, on était mille au moins...
    Tout à coup apparut la face formidable.
    *
    On vit le lion.
    Tout devint inabordable
    Sur-le-champ, et les bois parurent agrandis;
    Ce fut un tremblement parmi les plus hardis;
    Mais, fût-ce en frémissant, de vaillants archers tirent,
    Et sur le grand lion les flèches s'abattirent,
    Un tourbillon de dards le cribla. Le lion,
    Pas plus que sous l'orage Ossa ni Pélion
    Ne s'émeuvent, fronça son poil, et grave, austère,
    Secoua la plupart des flèches sur la terre;
    D'autres, sur qui ces dards se seraient enfoncés,
    Auraient certes trouvé qu'il en restait assez,
    Ou se seraient enfuis; le sang rayait sa croupe;
    Mais il n'y prit point garde, et regarda la troupe;
    Et ces hommes, troublés d'être en un pareil lieu,
    Doutaient s'il était monstre ou bien s'il était dieu.
    Les chiens muets cherchaient l'abri des fers de lance.
    Alors le fier lion poussa, dans ce silence,
    A travers les grands bois et les marais dormants,
    Un de ces monstrueux et noirs rugissements
    Qui sont plus effrayants que tout ce qu'on vénère,
    Et qui font qu'à demi réveillé, le tonnerre
    *** dans le ciel profond: Qui donc tonne là-bas ?
    Tout fut fini. La fuite emporte les combats
    Comme le vent la brume, et toute cette armée,
    Dissoute, aux quatre coins de l'horizon semée,
    S'évanouit devant l'horrible grondement.
    Tous, chefs, soldats, ce fut l'affaire d'un moment,
    Croyant être en des lieux surhumains où se forme
    On ne sait quel courroux de la nature énorme,
    Disparurent, tremblants, rampants, perdus, cachés.
    Et le monstre cria:?"Monts et forêts, sachez
    Qu'un lion libre est plus que mille hommes esclaves.
    *
    Les bêtes ont le cri comme un volcan les laves;
    Et cette éruption qui monte au firmament
    D'ordinaire suffit à leur apaisement;
    Les lions sont sereins plus que les dieux peut-être;
    Jadis, quand l'éclatant Olympe était le maître,
    Les Hercules disaient:?"Si nous étranglions
    A la fin, une fois pour toutes, les lions ?
    Et les lions disaient:?"Faisons grâce aux Hercules.
    Pourtant ce lion-ci, fils des noirs crépuscules,
    Resta sinistre, obscur, sombre; il était de ceux
    Qui sont à se calmer rétifs et paresseux,
    Et sa colère était d'une espèce farouche.
    La bête veut dormir quand le soleil se couche;
    Il lui déplaît d'avoir affaire aux chiens rampants;
    Ce lion venait d'être en butte aux guet-apens;
    On venait d'insulter la forêt magnanime;
    Il monta sur le mont, se dressa sur la cime,
    Et reprit la parole, et, comme le semeur
    Jette sa graine au loin, prolongea sa clameur
    De façon que le roi l'enten*** dans sa ville:
    ?"Roi! tu m'as attaqué d'une manière vile!
    Je n'ai point jusqu'ici fait mal à ton garçon;
    Mais, roi, je t'avertis, par-dessus l'horizon
    Que j'entrerai demain dans ta ville à l'aurore,
    Que je t'apporterai l'enfant vivant encore,
    Que j'invite à me voir entrer tous tes valets,
    Et que je mangerai ton fils dans ton palais.
    La nuit passa, laissant les ruisseaux fuir sous l'herbe
    Et la nuée errer au fond du ciel superbe.
    Le lendemain on vit dans la ville ceci:
    L'aurore; le désert; des gens criant merci,
    Fuyant, faces d'effroi bien vite disparues;
    Et le vaste lion qui marchait dans les rues.

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