Les habitants du Bau de l'Aubésier, hommes préhistoriques étonnamment évolués

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Les habitants du Bau de l'Aubésier, hommes préhistoriques étonnamment évolués
PARIS, 13 oct (AFP) - Quasi sédentaires, "altruistes", fabricants d'outils "modernes", les ancêtres de l'homme de Néandertal qui ont habité voici 200.000 ans un abri rocheux du Vaucluse, le Bau de l'Aubésier, ont laissé d'étonnants vestiges aux préhistoriens travaillant sur ce site.

Cet abri situé près de Monieux, au fond des Gorges de la Nesque, a été fouillé pour la première fois en 1904, puis dans les années soixante, sans livrer de fossiles notables. Les travaux y ont repris en 1987-1988 et, pendant les deux premières années, les préhistoriens se sont demandé s'il fallait bien y revenir, avoue l'archéologue canadien Serge Lebel (Université du Québec à Montréal), qui y dirige une équipe internationale.

Leur persévérance a porté ses fruits: les scientifiques ont pu mettre au jour notamment une mandibule humaine édentée suite à une grave infection buccale. Comme les cavités laissées par la chute des dents ont eu le temps de se refermer, cela signifie que le (ou la) malade, incapable de mastiquer, a été assisté(e) pendant plusieurs mois, sinon plusieurs années, par les autres membres de sa tribu.

Cette mandibule, qui a fait l'objet d'une publication récente dans une revue scientifique, a enfin fait parler de ce site peu connu, mais cette découverte, effectuée l'été 2000, n'en est qu'une parmi beaucoup d'autres, a assuré vendredi le chercheur québécois, lors d'une conférence à Paris.

"Il est vrai, explique-t-il, que le Bau de l'Aubésier n'est pas un site facile à explorer. Les différents niveaux contenant des fossiles sont séparés par des couches de roche extrêmement dure, provenant de l'écroulement progressif du plafond de l'abri, auxquelles il faut s'attaquer au marteau-piqueur, avant d'atteindre une couche noire qui correspond aux cendres issues de foyers et mélangées à des restes liés à la présence humaine."


Troisième main


L'abri contient plusieurs couches de ce type, dont la plus profonde explorée à ce jour a plus de 200.000 ans. Ce niveau a livré la mandibule qui repousse de 150.000 ans la plus ancienne preuve de forme de "compassion" ou d'"altruisme" chez les hommes préhistoriques.

Selon l'hypothèse avancée par les scientifiques, les habitants du Bau de l'Aubésier devaient nourrir la personne malade en découpant d'abord sa viande avec leurs propres dents - technique qui a survécu jusqu'à une date récente chez les Inuit, pour qui la bouche étaient une sorte de troisième main -, avant de la faire cuire et de la mastiquer pour pouvoir lui servir une sorte de bouillie.

Par ailleurs, les fouilles ont permis de trouver également des dents d'autres pré-néandertaliens, dont une porte une marque très prononcée de carie. Ceci démontre, estime Serge Lebel, que ces chasseurs avaient un régime alimentaire plus varié que l'on ne pensait et qu'ils devaient manger fréquemment des végétaux. En outre, l'épaisseur de la couche noire correspond à une occupation prolongée, une "récurrence de l'habitat", sinon à une quasi-sédentarisation.

"De toute manière, souligne l'archéologue, je suis sûr que, sur ce site à haut potentiel archéologique, nous n'en sommes pas à la dernière grande surprise. Une des pièces que nous avons déjà trouvées est une lame de pierre, dont la finition correspond curieusement à la technique de débitage Levallois."

Le problème, c'est que l'élaboration de cette méthode de fabrication d'outils de pierre, dont le nom est tiré du site de Levallois-Perret, en région parisienne, et qui permet d'obtenir des éclats, des lames ou des pointes de forme prédéterminée, est attribuée seulement à l'homme de Néandertal "classique", descendant lointain des habitants du Bau de l'Aubésier.

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