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Manifeste du Parti communiste

Chủ đề trong 'Pháp (Club de Francais)' bởi Angelique, 19/05/2001.

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  1. Angelique

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    <TITRE Manifeste du Parti communiste (1848)>
    K. MARX, F. ENGELS
    =============================
    MANIFESTE DU PARTI COMMUNISTE

    Rộdigộ par Marx et Engels de dộcembre 1847 janvier 1848. Publiộ pour la premiốre fois en brochure Londres, en fộvrier 1848.


    PREFACE A L'E***ION ALLEMANDE DE 1872

    La Ligue des communistes, association ouvriốre internationale qui, dans les circonstances d'alors, ne pouvait ờtre ộvidemment que secrốte, chargea les soussignộs, dộlộguộs au congrốs tenu Londres en novembre 1847, de rộdiger un programme dộtaillộ, la fois thộorique et pratique, du Parti et destinộ la publicitộ. Telle est l'origine de ce Manifeste dont le manuscrit, quelques semaines avant la Rộvolution de Fộvrier, fut envoyộ Londres pour y ờtre imprimộ. Publiộ d'abord en allemand, il a eu dans cette langue au moins douze ộ***ions diffộrentes en Allemagne, en Angleterre et en Amộrique. Traduit en anglais par Miss Hộlốne Macfarlane, il parut en 1850, Londres, dans le Red Republican, et, en 1871, il eut, en Amộrique, au moins trois traductions anglaises. Il parut une premiốre fois en franỗais Paris, peu de temps avant l'insurrection de juin 1848, et, rộcemment, dans Le Socialiste de New York. Une traduction nouvelle est en prộparation. On en fit une ộ***ion en polonais Londres, peu de temps aprốs la premiốre ộ***ion allemande. Il a paru en russe, Genốve, aprốs 1860. Il a ộtộ ộgalement traduit en danois peu aprốs sa publication.

    Bien que les circonstances aient beaucoup changộ au cours des vingt-cinq derniốres annộes, les principes gộnộraux exposộs dans ce Manifeste conservent dans leurs grandes lignes, aujourd'hui encore, toute leur exactitude. Il faudrait revoir, ỗ et l, quelques dộtails. Le Manifeste explique lui-mờme que l'application des principes dộpendra partout et toujours des circonstances historiques donnộes, et que, par suite, il ne faut pas attribuer trop d'importance aux mesures rộvolutionnaires ộnumộrộes la fin du chapitre II. Ce passage serait, bien des ộgards, rộdigộ tout autrement aujourd'hui. Etant donnộ les progrốs immenses de la grande industrie dans les vingt-cinq derniốres annộes et les progrốs parallốles qu'a accomplis, dans son organisation en parti, la classe ouvriốre, ộtant donnộ les expộriences pratiques, d'abord de la Rộvolution de Fộvrier, ensuite et surtout de la Commune de Paris qui, pendant deux mois, mit pour la premiốre fois aux mains du prolộtariat le pouvoir politique, ce programme est aujourd'hui vieilli sur certains points. La Commune, notamment, a dộmontrộ que ôla classe ouvriốre ne peut pas se contenter de prendre telle quelle la machine de l'Etat et de la faire fonctionner pour son propre compteằ (voir ô Adresse du Conseil gộnộral de l'Association internationale des Travailleursằ, La Guerre civile en France, oự cette idộe est plus longuement dộveloppộe). En outre, il est ộvident que la critique de la littộrature socialiste prộsente une lacune pour la pộriode actuelle, puisqu'elle s'arrờte 1847. Et, de mờme, si les remarques sur la position des communistes l'ộgard des diffộrents partis d'opposition (chapitre IV) sont exactes aujourd'hui encore dans leurs principes, elles sont vieillies dans leur application parce que la situation politique s'est modifiộe du tout au tout et que l'ộvolution historique a fait disparaợtre la plupart des partis qui y sont ộnumộrộs.

    Cependant, le Manifeste est un document historique que nous ne nous reconnaissons plus le droit de modifier Une ộ***ion ultộrieure sera peut-ờtre prộcộdộe d'une introduction qui pourra combler la lacune entre 1847 et nos jours ; la rộimpression actuelle nous a pris trop l'improviste pour nous donner le temps de l'ộcrire.

    Karl Marx, Friedrich Engels ; Londres, 24 juin 1872


    PREFACE A L'E***ION RUSSE DE 1882

    La premiốre ộ***ion russe du Manifeste du Parti communiste, traduit par Bakounine, parut peu aprốs 1860 l'imprimerie du Kolokol. A cette ộpoque, cela (l'ộ***ion russe de l'ouvrage) avait tout au plus pour l'Occident l'importance d'une curiositộ littộraire. Aujourd'hui, il n'en va plus de mờme.

    Combien ộtait ộtroit le terrain oự se propageait le mouvement prolộtarien cette ộpoque (dộcembre 1847), c'est ce qui ressort parfaitement du dernier chapitre : ôPosition des communistes envers les diffộrents partis d'opposition dans les divers paysằ. La Russie et les Etats-Unis notamment n'y sont pas mentionnộs. C'ộtait le temps oự la Russie formait la derniốre grande rộserve de la rộaction europộenne, et oự l'ộmigration aux Etats-Unis absorbait l'excộdent des forces du prolộtariat europộen. Ces deux pays fournissaient l'Europe des matiốres premiốres et lui offraient en mờme temps des dộbouchộs pour l'ộcoulement de ses produits industriels. Tous deux servaient donc, de l'une ou l'autre maniốre, de contrefort l'organisation sociale de l'Europe.

    Que tout cela est changộ aujourd'hui ! C'est prộcisộment l'ộmigration europộenne qui a rendu possible le dộveloppement colossal de l'agriculture en Amộrique du Nord, dộveloppement dont la concurrence ộbranle dans ses fondements la grande et la petite propriộtộ fonciốre en Europe. C'est elle qui a, du mờme coup, donnộ aux Etats-Unis la possibilitộ de mettre en exploitation ses ộnormes ressources industrielles, et cela avec une ộnergie et une ộchelle telles que le monopole industriel de l'Europe occidentale, et notamment celui de l'Angleterre, disparaợtra bref dộlai. Ces deux circonstances rộagissent leur tour de faỗon rộvolutionnaire sur l'Amộrique elle- mờme. La petite et la moyenne propriộtộ des farmers, cette assise de tout l'ordre politique amộricain, succombe peu peu sous la concurrence de fermes gigantesques, tandis que, dans les districts industriels, il se constitue pour la premiốre fois un nombreux prolộtariat cụtộ d'une fabuleuse concentration du Capital.

    Passons la Russie. Au moment de la Rộvolution de 1848-1849, les monarques d'Europe, tout comme la bourgeoisie d'Europe, voyaient dans l'intervention russe le seul moyen de les sauver du prolộtariat qui venait tout juste de s'ộveiller. Le tsar fut proclamộ chef de la rộaction europộenne. Aujourd'hui, il est, Gatchina, le prisonnier de guerre de la rộvolution, et la Russie est l'avant-garde du mouvement rộvolutionnaire de l'Europe.

    Le Manifeste communiste avait pour tõche de proclamer la disparition inộvitable et prochaine de la propriộtộ bourgeoise. Mais en Russie, cụtộ de la spộculation capitaliste qui se dộveloppe fiộvreusement et de la propriộtộ fonciốre bourgeoise en voie de formation, plus de la moitiộ du sol est la propriộtộ commune des paysans. Il s'agit, dốs lors, de savoir si la communautộ paysanne russe, cette forme dộj dộcomposộe de l'antique propriộtộ commune du sol, passera directement la forme communiste supộrieure de la propriộtộ commune, ou bien si elle doit suivre d'abord le mờme processus de dissolution qu'elle a subi au cours du dộveloppement historique de l'Occident.

    La seule rộponse qu'on puisse faire aujourd'hui cette question est la suivante : si la rộvolution russe donne le signal d'une rộvolution prolộtarienne en Occident, et que toutes deux se complốtent, la propriộtộ commune actuelle de la Russie pourra servir de point de dộpart une ộvolution communiste.

    Karl Marx, Friedrich Engels ; Londres, 21 janvier I882


    PREFACE A L'E***ION ALLEMANDE DE 1883

    Il me faut malheureusement signer seul la prộface de cette ộ***ion. Marx, l'homme auquel toute la classe ouvriốre d'Europe et d'Amộrique doit plus qu' tout autre, Marx repose au cimetiốre de Highgate, et sur sa tombe ver*** dộj le premier gazon. Aprốs sa mort, il ne saurait ờtre question moins que jamais de remanier ou de complộter le Manifeste. Je crois d'autant plus nộcessaire d'ộtablir expressộment, une fois de plus, ce qui suit.

    L'idộe fondamentale et directrice du Manifeste, savoir que la production ộconomique et la structure sociale qui en rộsulte nộcessairement forment, chaque ộpoque historique, la base de l'histoire politique et intellectuelle de cette ộpoque ; que, par suite (depuis la dissolution de la propriộtộ commune du sol des temps primitifs), toute l'histoire a ộtộ une histoire de luttes de classes, de luttes entre classes exploitộes et classes exploitantes, entre classes dominộes et classes dominantes, aux diffộrentes ộtapes de leur dộveloppement social ; mais que cette lutte a actuellement atteint une ộtape oự la classe exploitộe et opprimộe (le prolộtariat) ne peut plus se libộrer de la classe qui l'exploite et l'opprime (la bourgeoisie), sans libộrer en mờme temps et tout jamais la sociộtộ entiốre de l'exploitation, de l'oppression et des luttes de classes ; cette idộe maợtresse appartient uniquement et exclusivement Marx.

    Je l'ai souvent dộclarộ, mais il faut maintenant que cette dộclaration figure aussi en tờte du Manifeste.

    Friedrich Engels ; Londres, 28 juin 1883


    PREFACE A L'E***ION ANGLAISE DE 1888

    Le Manifeste est le programme de la Ligue des communistes, association ouvriốre, d'abord exclusivement allemande, ensuite internationale et qui, dans les con***ions politiques qui existaient sur le continent avant 1848, ne pouvait qu'ờtre une sociộtộ secrốte. Au congrốs de la Ligue qui s'est tenu Londres, en novembre 1847, Marx et Engels se voient confier la tõche de rộdiger, aux fins de publication, un ample programme thộorique et pratique du Parti. Travail achevộ en janvier 1848, et dont le manuscrit allemand fut envoyộ Londres pour y ờtre imprimộ, quelques semaines de la rộvolution franỗaise du 24 fộvrier. La traduction franỗaise vit le jour Paris, peu avant l'insurrection de juin 1848. La premiốre traduction anglaise, due Miss Hộlốne Macfarlane, parut dans le Red Republican de George Julian Harney, Londres 1850. Ont paru ộgalement les ộ***ions danoise et polonaise.

    La dộfaite de l'insurrection parisienne de juin 1848 -< la premiốre grande bataille entre prolộtariat et bourgeoisie <- devait de nouveau, pour une certaine pộriode, refouler l'arriốre-plan les revendications sociales et politiques de la classe ouvriốre europộenne. Depuis lors, seuls les divers groupes de la classe possộdante s'affrontaient de nouveau dans la lutte pour la domination, tout comme avant la Rộvolution de Fộvrier ; la classe ouvriốre a dỷ combattre pour la libertộ d'action politique et s'aligner sur les positions extrờmes de la partie radicale des classes moyennes. Tout mouvement prolộtarien autonome, pour peu qu'il continuõt donner signe de vie, ộtait ộcrasộ sans merci. Ainsi, la police prussienne rộussit dộpister le Comitộ central de la Ligue des communistes, qui cette ộpoque avait son siốge Cologne. Ses membres furent arrờtộs et, aprốs dix-huit mois de dộtention, dộfộrộs en jugement, en octobre 1852. Ce fameux ôprocốs des communistes Cologneằ dura du 4 octobre au 12 novembre ; sept personnes parmi les prộvenus furent condamnộes des peines allant de trois six ans de forteresse. Immộdiatement aprốs le verdict, la Ligue fut officiellement dissoute par les membres demeurộs en libertộ. Pour ce qui est du Manifeste, on l'eỷt cru depuis lors vouộ l'oubli.

    Lorsque la classe ouvriốre d'Europe eut repris suffisamment de forces pour un nouvel assaut contre les classes dominantes, naquit l'Association internationale des travailleurs. Cependant, cette Association qui s'ộtait constituộe dans un but prộcis <- fondre en un tout les forces combatives du prolộtariat d'Europe et d'Amộrique -< ne pouvait proclamer d'emblộe les principes posộs dans le Manifeste. Le programme de l'Internationale devait ờtre assez vaste pour qu'il fỷt acceptộ et par les trade-unions anglaises, et par les adeptes de Proudhon en France, Belgique, Italie et Espagne, et par les lassalliens en Allemagne. Marx, qui rộdigea ce programme de faỗon donner satisfaction tous ces partis, s'en remettait totalement au dộveloppement intellectuel de la classe ouvriốre, qui devait ờtre coup sỷr le fruit de l'action et de la discussion communes. Par eux-mờmes les ộvộnements et les pộripộties de la lutte contre le Capital -< les dộfaites plus encore que les succốs -< ne pouvaient manquer de faire sentir l'insuffisance de toutes les panacộes et d'amener comprendre fond les con***ions vộritables de l'ộmancipation ouvriốre. Et Marx avait raison. Quand, en 1874, l'Internationale cessa d'exister, les ouvriers n'ộtaient plus du tout les mờmes que lors de sa fondation en 1864. Le proudhonisme en France, le lassallisme en Allemagne ộtaient l'agonie et mờme les trade-unions anglaises, conservatrices, et ayant depuis longtemps, dans leur majoritộ, rompu avec l'Internationale, approchaient peu peu du moment oự le prộsident de leur congrốs qui s'est tenu l'an dernier Swansea, pouvait dire en leur nom : ôLe socialisme continental ne nous fait plus peur.ằ A la vộritộ, les principes du Manifeste avaient pris un large dộveloppement parmi les ouvriers de tous les pays.

    Ainsi, le Manifeste s'est mis une nouvelle fois au premier plan. Aprốs 1850, le texte allemand fut rộộ***ộ plusieurs fois en Suisse, Angleterre et Amộrique. En 1872, il est traduit en anglais New York et publiộ dans Woodhull and Claflin's Weekly. Une traduction franỗaise d'aprốs ce texte anglais, a ộtộ publiộe par Le Socialiste newyorkais. Par la suite, parurent en Amộrique au moins encore deux traductions anglaises plus ou moins dộformộes, dont l'une fut rộộ***ộe en Angleterre. La premiốre traduction en russe, faite par Bakounine, fut ộ***ộe aux environs de 1863 par l'imprimerie du Kolokol d'Herzen, Genốve -- La deuxiốme traduction, due l'hộroùque Vộra Zassoulitch, sortit de mờme Genốve en 1882. Une nouvelle ộ***ion danoise est lancộe par la Socialdemokratisk Bibliothek Copenhague en 1885 ; une nouvelle traduction franỗaise a ộtộ publiộe par Le Socialiste de Paris, en 1886. D'aprốs cette traduction, a paru une version espagnole, publiộe Madrid en 1886. Point n'est besoin de parler des ộ***ions allemandes rộimprimộes, on en compte au moins douze. La traduction armộnienne, qui devait paraợtre il y a quelques mois Constantinople, n'a pas vu le jour, comme on me l'a ***, uniquement parce que l'ộ***eur avait craint de sortir le livre avec le nom de Marx, tandis que le traducteur refusait de se dire l'auteur du Manifeste. Pour ce qui est des nouvelles traductions en d'autres langues, j'en ai entendu parler, mais n'en ai jamais vu. Ainsi donc, l'histoire du Manifeste reflốte notablement celle du mouvement ouvrier contemporain ; l'heure actuelle, il est incontestablement l'oeuvre la plus rộpandue, la plus internationale de toute la littộrature socialiste, le programme commun de millions d'ouvriers, de la Sibộrie la Californie.

    Et, cependant, au moment oự nous ộcrivions, nous ne pouvions toutefois l'intituler Manifeste socialiste. En 1847, on donnait le nom de socialistes, d'une part, aux adeptes des divers systốmes utopiques : les owenistes en Angleterre et les fouriộristes en France, et qui n'ộtaient dộj plus, les uns et les autres, que de simples sectes agonisantes ; d'autre part, aux mộticastres sociaux de tout acabit qui promettaient, sans aucun prộjudice pour le Capital et le profit, de guộrir toutes les infirmitộs sociales au moyen de toutes sortes de replõtrage. Dans les deux cas, c'ộtaient des gens qui vivaient en dehors du mouvement ouvrier et qui cherchaient plutụt un appui auprốs des classes ôcultivộesằ. Au contraire, cette partie des ouvriers qui, convaincue de l'insuffisance de simples bouleversements politiques, rộclamait une transformation fondamentale de la sociộtộ, s'ộtait donnộ le nom de communistes. C'ộtait un communisme peine dộgrossi, purement instinctif, parfois un peu grossier, mais cependant il pressentait l'essentiel et se rộvộla assez fort dans la classe ouvriốre pour donner naissance au communisme utopique : en France, celui de Cabet et en Allemagne, celui de Weitling. En 1847, le socialisme signifiait un mouvement bourgeois, le communisme, un mouvement ouvrier. Le socialisme avait, sur le continent tout au moins, ôses entrộes dans le mondeằ, pour le communisme, c'ộtait exactement le contraire. Et comme, depuis toujours, nous ộtions d'avis que ôl'ộmancipation des travailleurs doit ờtre l'oeuvre des travailleurs eux-mờmesằ, nous ne pouvions hộsiter un instant sur la dộnomination choisir. Depuis, il ne nous est jamais venu l'esprit de la rejeter.

    Bien que le Manifeste soit notre oeuvre commune, j'estime nộanmoins de mon devoir de constater que la thốse principale, qui en constitue le noyau, appartient Marx. Cette thốse est qu' chaque ộpoque historique, le mode prộdominant de la production et de l'ộchange ộconomiques et la structure sociale qu'il con***ionne, forment la base sur laquelle repose l'histoire politique de la***e ộpoque et l'histoire de son dộveloppement intellectuel, base partir de laquelle seulement elle peut ờtre expliquộe ; que de ce fait toute l'histoire de l'humanitộ (depuis la dộcomposition de la communautộ primitive avec sa possession commune du sol) a ộtộ une histoire de luttes de classes, de luttes entre classes exploiteuses et exploitộes, classes dominantes et classes opprimộes ; que l'histoire de cette lutte de classes atteint l'heure actuelle, dans son dộveloppement, une ộtape oự la classe exploitộe et opprimộe -< le prolộtariat -< ne peut plus s'affranchir du joug de la classe qui l'exploite et l'opprime <- la bourgeoisie -< sans affranchir du mờme coup, une fois pour toutes, la sociộtộ entiốre de toute exploitation, oppression, division en classes et lutte de classes.

    Cette idộe qui selon moi est appelộe marquer pour la science historique le mờme progrốs que la thộorie de Darwin pour la biologie, nous nous en ộtions tous deux approchộs peu peu, plusieurs annộes dộj avant 1845. Jusqu'oự j'ộtais allộ moi-mờme dans cette direction, de mon cụtộ, on peut en juger clairement par mon livre La Situation de la classe laborieuse en Angleterre. Quand au printemps 1845 je revis Marx Bruxelles, il l'avait dộj ộlaborộe et il me l'a exposộe peu prốs aussi clairement que je l'ai fait ici, moi-mờme.

    Je reproduis les lignes suivantes empruntộes notre prộface commune l'ộ***ion allemande de 1872 :

    ôBien que les circonstances aient beaucoup changộ au cours des vingt- cinq derniốres annộes, les principes gộnộraux exposộs dans ce Manifeste conservent dans leurs grandes lignes, aujourd'hui encore, toute leur exactitude. Il faudrait revoir, ỗ et l, quelques dộtails. Le Manifeste explique lui-mờme que l'application des principes dộpendra partout et toujours des circonstances historiques donnộes, et que, par suite, il ne faut pas attribuer trop d'importance aux mesures rộvolutionnaires ộnumộrộes la fin du chapitre II. Ce passage serait, bien des ộgards, rộdigộ tout autrement aujourd'hui. Etant donnộ les progrốs immenses de la grande industrie dans les vingt-cinq derniốres annộes et les progrốs parallốles qu'a accomplis, dans son organisation en parti, la classe ouvriốre, ộtant donnộ les expộriences pratiques, d'abord de la Rộvolution de Fộvrier, ensuite et surtout de la Commune de Paris qui, pendant deux mois, mit pour la premiốre fois aux mains du prolộtariat le pouvoir politique, ce programme est aujourd'hui vieilli sur certains points. La Commune, notamment, a dộmontrộ que ôla classe ouvriốre ne peut pas se contenter de prendre telle quelle la machine d'Etat et de la faire fonctionner pour son propre compteằ (voir ôAdresse du Conseil gộnộral de l'Association internationale des Travailleursằ, La Guerre civile en France, oự cette idộe est plus longuement dộveloppộe). En outre, il est ộvident que la critique de la littộrature socialiste prộsente une lacune pour la pộriode actuelle, puisqu'elle s'arrờte 1847. Et, de mờme, si les remarques sur la position des communistes l'ộgard des diffộrents partis d'opposition (chapitre IV) sont exactes aujourd'hui encore dans leurs principes, elles sont vieillies dans leur application parce que la situation politique s'est modifiộe du tout au tout et que l'ộvolution historique a fait disparaợtre la plupart des partis qui y sont ộnumộrộs.

    Cependant, le Manifeste est un document historique que nous ne nous reconnaissons plus le droit de modifier.ằ

    La traduction que nous prộsentons est de M. Samuel Moore, traducteur de la plus grande partie du Capital de Marx. Nous l'avons revue ensemble, et j'ai ajoutộ quelques remarques explicatives d'ordre historique.

    Friedrich Engels ; Londres, 30 janvier 1888


    PREFACE A L'E***ION ALLEMANDE DE 1890

    Depuis que j'ai ộcrit les lignes qui prộcốdent, une nouvelle ộ***ion allemande du Manifeste est devenue nộcessaire. Il convient en outre de mentionner ici qu'il s'est produit bien des choses autour du Manifeste.

    Une deuxiốme traduction russe, par Vộra Zassoulitch, parut Genốve en 1882, nous en rộdigeõmes, Marx et moi, la prộface. Malheureusement, j'ai ộgarộ le manuscrit allemand original, et je suis obligộ de retraduire du russe, ce qui n'est d'aucun profit pour le texte mờme. Voici cette prộface :

    ôLa premiốre ộ***ion russe du Manifeste du Parti communiste, traduit par Bakounine, parut peu aprốs 1860 l'imprimerie du Kolokol. A cette ộpoque, une ộ***ion russe de cet ouvrage avait tout au plus pour l'Occident l'importance d'une curiositộ littộraire. Aujourd'hui, il n'en va plus de mờme. Combien ộtait ộtroit le terrain oự se propageait le mouvement prolộtarien aux premiers jours de la publication du Manifeste (janvier I848), c'est ce qui ressort parfaitement du dernier chapitre : ôPosition des communistes envers les diffộrents partis d'opposition dans les divers paysằ). La Russie et les Etats-Unis notamment n'y sont pas mentionnộs. C'ộtait le temps oự la Russie formait la derniốre grande rộserve de la rộaction europộenne, et oự l'ộmigration aux Etats-Unis absorbait l'excộdent des forces du prolộtariat europộen. Ces deux pays fournissaient l'Europe des matiốres premiốres et lui offraient en mờme temps des dộbouchộs pour l'ộcoulement de ses produits industriels. Tous deux servaient donc, de l'une ou l'autre maniốre, de contrefort l'organisation sociale de l'Europe.

    Que tout cela est changộ aujourd'hui ! C'est prộcisộment l'ộmigration europộenne qui a rendu possible le dộveloppement colossal de l'agriculture en Amộrique du Nord, dộveloppement dont la concurrence ộbranle dans ses fondements la grande et la petite propriộtộ fonciốre en Europe. C'est elle qui a, du mờme coup, donnộ aux Etats-Unis la possibilitộ de mettre en exploitation ses ộnormes ressources industrielles, et cela avec une ộnergie et une ộchelle telles que le monopole industriel de l'Europe occidentale disparaợtra bref dộlai. Ces deux circonstances rộagissent leur tour de faỗon rộvolutionnaire sur l'Amộrique elle-mờme. La petite et la moyenne propriộtộ des farmers, cette assise de tout l'ordre politique amộricain, succombe peu peu sous la concurrence de fermes gigantesques, tandis que, dans les districts industriels, il se constitue pour la premiốre fois un nombreux prolộtariat cụtộ d'une fabuleuse concentration du Capital.

    Passons la Russie. Au moment de la Rộvolution de 1848-1849, les monarques d'Europe, tout comme la bourgeoisie d'Europe, voyaient dans l'intervention russe le seul moyen capable de les sauver du prolộtariat qui commenỗait tout juste prendre conscience de sa force. Ils proclamaient le tsar chef de la rộaction europộenne. Aujourd'hui, il est, Gatchina, le prisonnier de guerre de la rộvolution, et la Russie est l'avant-garde du mouvement rộvolutionnaire de l'Europe.

    Le Manifeste communiste avait pour tõche de proclamer la disparition inộvitable et prochaine de la propriộtộ bourgeoise. Mais en Russie, cụtộ de la spộculation capitaliste qui se dộveloppe fiộvreusement et de la propriộtộ fonciốre bourgeoise en voie de formation, plus de la moitiộ du sol est la propriộtộ commune des paysans. Il s'agit, dốs lors, de savoir si la communautộ paysanne russe, cette forme dộj dộcomposộe de l'antique propriộtộ commune du sol, passera directement la forme communiste supộrieure de la propriộtộ fonciốre, ou bien si elle doit suivre d'abord le mờme processus de dissolution qu'elle a subi au cours du dộveloppement historique de l'Occident.

    La seule rộponse qu'on puisse faire aujourd'hui cette question est la suivante : si la rộvolution russe donne le signal d'une rộvolution ouvriốre en Occident, et que toutes deux se complốtent, la propriộtộ commune actuelle de la Russie pourra servir de point de dộpart une ộvolution communiste.

    Karl Marx, Friedrich Engels ; Londres, 21 janvier 1882

    Une nouvelle traduction polonaise parut, la mờme ộpoque, Genốve : Manifest Kommunistyczny.

    Depuis, une nouvelle traduction danoise a paru dans la Socialdemokratisk Bibliothek, Copenhague, 1885. Elle n'est malheureusement pas tout fait complốte ; quelques passages essentiels, qui semblent avoir arrờtộ le traducteur, ont ộtộ omis, et ỗ et l, on peut relever des traces de nộgligences, dont l'effet est d'autant plus regrettable qu'on voit, d'aprốs le reste, que la traduction aurait pu, avec un peu plus de soin, ờtre excellente.

    En 1886 parut une nouvelle traduction franỗaise dans Le Socialiste de Paris ; c'est jusqu'ici la meilleure.

    D'aprốs cette traduction a paru, la mờme annộe, une version espagnole, d'abord dans El Socialista, de Madrid, et ensuite en brochure : Manifesto del Partido Comunista, por Carlos Marx y F. Engels, Madrid, Administracion de ôEl Socialistaằ, Hernan Cortốs.

    A titre de curiositộ, je dirai qu'en 1887 le manuscrit d'une traduction armộnienne a ộtộ offert un ộ***eur de Constantinople ; l'excellent homme n'eut cependant pas le courage d'imprimer une brochure qui portait le nom de Marx et estima que le traducteur devrait bien plutụt s'en dộclarer l'auteur, ce que celui-ci refusa de faire.

    A plusieurs reprises ont ộtộ rộimprimộes en Angleterre certaines traductions amộricaines plus ou moins inexactes ; enfin, une traduction authentique a paru en 1888. Elle est due mon ami Samuel Moore, et nous l'avons revue ensemble avant l'impression. Elle a pour titre : Manifesto of the Communist Party, by Karl Marx and Frederick Engels. Authorized English Translation, e***ed and annotated by Frederick Engels, 1888. London, William Reeves, 185 Fleet St., E.C. J'ai repris dans la prộsente ộ***ion, quelques-unes des notes de cette traduction anglaise.

    Le Manifeste a eu sa destinộe propre. Saluộ avec enthousiasme, au moment de son apparition, par l'avant-garde peu nombreuse encore du socialisme scientifique (comme le prouvent les traductions signalộes dans la premiốre prộface), il fut bientụt refoulộ l'arriốre-plan par la rộaction qui suivit la dộfaite des ouvriers parisiens en juin 1848, et enfin il fut proscrit ôde par la loiằ avec la condamnation des communistes de Cologne en novembre 1852. Avec le mouvement ouvrier datant de la Rộvolution de Fộvrier, le Manifeste aussi disparaissait de la scốne publique.

    Lorsque la classe ouvriốre europộenne eut repris suffisamment de forces pour un nouvel assaut contre la puissance des classes dominantes, naquit l'Association internationale des travailleurs. Elle avait pour but de fondre en une immense armộe unique toute la classe ouvriốre militante d'Europe et d'Amộrique. Elle ne pouvait donc partir directement des principes posộs dans le Manifeste. Il lui fallait un programme qui ne fermõt pas la porte aux trade-unions anglaises, aux proudhoniens franỗais, belges, italiens et espagnols, ni aux lassalliens allemands. Ce programme -< le prộambule des Statuts de l'Internationale <- fut rộdigộ par Marx avec une maợtrise laquelle Bakounine et les anarchistes eux-mờmes ont rendu hommage. Pour la victoire dộfinitive des propositions ộnoncộes dans le Manifeste, Marx s'en remettait uniquement au dộveloppement intellectuel de la classe ouvriốre, qui devait nộcessairement rộsulter de l'action et de la discussion communes. Les ộvộnements et les vicissitudes de la lutte contre le Capital, les dộfaites plus encore que les succốs, ne pouvaient manquer de faire sentir aux combattants l'insuffisance de toutes leurs panacộes et les amener comprendre fond les con***ions vộritables de l'ộmancipation ouvriốre. Et Marx avait raison. La classe ouvriốre de 1874, aprốs la dissolution de l'Internationale, ộtait tout autre que celle de 1864, au moment de sa fondation. Le proudhonisme des pays latins et le lassallisme proprement *** en Allemagne ộtaient l'agonie, et mờme les trade-unions anglaises, alors ultra-conservatrices, approchaient peu peu du moment oự, en 1887, le prộsident de leur congrốs Swansea pouvait dire en leur nom : ôLe socialisme continental ne nous fait plus peur.ằ Mais dốs 1887, le socialisme continental s'identifiait presque entiốrement avec la thộorie formulộe dans le Manifeste. Et ainsi l'histoire du Manifeste reflốte jusqu' un certain point l'histoire du mouvement ouvrier moderne depuis 1848. A l'heure actuelle, il est incontestablement l'oeuvre la plus rộpandue, la plus internationale de toute la littộrature socialiste, le programme commun de millions d'ouvriers de tous les pays, de la Sibộrie la Californie.

    Et, cependant, lorsqu'il parut, nous n'aurions pu l'intituler Manifeste socialiste. En 1847, on comprenait sous ce nom de socialiste deux sortes de gens. D'abord, les adhộrents des divers systốmes utopiques, notamment les owenistes en Angleterre et les fouriộristes en France, qui n'ộtaient dộj plus, les uns et les autres, que de simples sectes agonisantes. D'un autre cụtộ, les charlatans sociaux de tout acabit qui voulaient, l'aide d'un tas de panacộes et avec toutes sortes de rapiộỗages, supprimer les misốres sociales, sans faire le moindre tort au Capital et au profit. Dans les deux cas, c'ộtaient des gens qui vivaient en dehors du mouvement ouvrier et qui cherchaient plutụt un appui auprốs des classes ôcultivộesằ. Au contraire, cette partie des ouvriers qui, convaincue de l'insuffisance des simples bouleversements politiques, rộclamait une transformation fondamentale de la sociộtộ, s'ộtait donnộ le nom de communistes. C'ộtait un communisme peine dộgrossi, purement instinctif, parfois un peu grossier ; mais il ộtait assez puissant pour donner naissance deux systốmes de communisme utopique : en France l'Icarie de Cabet et en Allemagne le systốme de Weitling. En 1847, le socialisme signifiait un mouvement bourgeois, le communisme, un mouvement ouvrier. Le socialisme avait, sur le continent tout au moins, ôses entrộes dans le mondeằ ; pour le communisme, c'ộtait exactement le contraire. Et comme, dốs ce moment, nous ộtions trốs nettement d'avis que ôl'ộmancipation des travailleurs doit ờtre l'oeuvre des travailleurs eux-mờmesằ, nous ne pouvions hộsiter un instant sur la dộnomination choisir. Depuis, il ne nous est jamais venu l'esprit de la rejeter.

    ôProlộtaires de tous les pays, unissez-vous !ằ Quelques voix seulement nous rộpondirent, lorsque nous lanỗõmes cet appel par le monde, il y a maintenant quarante-deux ans, la veille de la premiốre rộvolution parisienne dans laquelle le prolộtariat se prộsenta avec ses revendications lui. Mais le 28 septembre 1864, des prolộtaires de la plupart des pays de l'Europe occidentale s'unissaient pour former l'Association internationale des Travailleurs, de glorieuse mộmoire. L'Internationale elle-mờme ne vộcut d'ailleurs que neuf annộes. Mais que l'alliance ộternelle ộtablie par elle entre les prolộtaires de tous les pays existe encore et qu'elle soit plus puissante que jamais, il n'en est pas de meilleure preuve que la journộe d'aujourd'hui. Au moment oự j'ộcris ces lignes, le prolộtariat d'Europe et d'Amộrique passe en revue ses forces de combat, pour la premiốre fois mobilisộes en une seule armộe, sous un mờme drapeau et pour un mờme but immộdiat : la fixation lộgale de la journộe normale de huit heures, proclamộe dốs 1866 par le Congrốs de l'Internationale Genốve, et de nouveau par le Congrốs ouvrier de Paris en l889. Le spectacle de cette journộe montrera aux capitalistes et aux propriộtaires fonciers de tous les pays que les prolộtaires de tous les pays sont effectivement unis.

    Que Marx n'est-il cụtộ de moi, pour voir cela de ses propres yeux !

    Friedrich Engels ; Londres, 1er mai 1890


    PREFACE A L'E***ION POLONAISE DE 1892

    Qu'il ait ộtộ nộcessaire de faire paraợtre une nouvelle ộ***ion polonaise du Manifeste communiste, permet de faire maintes conclusions.

    D'abord, il faut constater que le Manifeste est devenu, ces derniers temps, une sorte d'illustration du progrốs de la grande industrie sur le continent europộen. A mesure que celle-ci ộvolue dans un pays donnộ, les ouvriers de ce pays ont de plus en plus tendance voir clair dans leur situation, en tant que classe ouvriốre, pal rapport aux classes possộdantes ; le mouvement socialiste prend de l'extension parmi eux et le Manifeste devient l'objet d'une demande accrue. Ainsi, d'aprốs le nombre d'exemplaires diffusộs dans la langue du pays, il est possible de dộterminer avec assez de prộcision non seulement l'ộtat du mouvement ouvrier, mais aussi le degrộ d'ộvolution de la grande industrie dans ce pays.

    La nouvelle ộ***ion polonaise du Manifeste est donc une preuve du progrốs dộcisif de l'industrie de la Pologne. Que ce progrốs ait effectivement eu lieu durant les dix annộes qui se sont ộcoulộes depuis que la derniốre ộ***ion a vu le jour, nul doute ne saurait subsister. Le Royaume de Pologne, la Pologne du Congrốs, s'est transformộ en une vaste rộgion industrielle de l'empire de Russie. Tandis que la grande industrie russe est dispersộe dans maints endroits, une partie tout prốs du golfe de Finlande, une autre dans la rộgion centrale (Moscou, Vladimir), la troisiốme sur les cụtes de la mer Noire et de la mer d'Azov, etc., l'industrie polonaise se trouve concentrộe sur une ộtendue relativement faible et ộprouve aussi bien les avantages que les inconvộnients de cette concentration. Ces avantages furent reconnus par les fabricants concurrents de Russie lorsque, malgrộ leur dộsir ardent de russifier tous les Polonais, ils rộclamốrent l'institution de droits protecteurs contre la Pologne. Quant aux inconvộnients -< pour les fabricants polonais comme pour le gouvernement russe -<, ils se traduisent par une rapide diffusion des idộes socialistes parmi les ouvriers polonais et par une demande accrue pour le Manifeste.

    Cependant, cette ộvolution rapide de l'industrie polonaise qui a pris le pas sur l'industrie russe, offre son tour une nouvelle preuve de la vitalitộ tenace du peuple polonais et constitue une caution nouvelle de son futur rộtablissement national. Or, le rộtablissement d'une Pologne autonome puissante nous concerne nous tous et pas seulement les Polonais. Une coopộration internationale de bonne foi entre les peuples d'Europe n'est possible que si chacun de ces peuples reste le maợtre absolu dans sa propre maison. La Rộvolution de I848, au cours de laquelle les combattants prolộtariens ont dỷ, sous le drapeau du prolộtariat, exộcuter en fin de compte la besogne de la bourgeoisie, a rộalisộ du mờme coup, par le truchement de ses commis -< Louis Bonaparte et Bismarck -<, l'indộpendance de l'Italie, de l'Allemagne, de la Hongrie.

    Pour ce qui est de la Pologne qui depuis 1792 avait fait pou ; la rộvolution plus que ces trois pays pris ensemble, l'heure oự, en 1863, elle succombait sous la poussộe des forces russes, dix fois supộrieures aux siennes propres, elle fut abandonnộe elle-mờme. La noblesse a ộtộ impuissante dộfendre et reconquộrir l'indộpendance de la Pologne ; la bourgeoisie se dộsintộresse actuellement, pour ne pas dire plus, de cette indộpendance. Nộanmoins, pour la coopộration harmonieuse des nations europộennes, elle s'impose impộrieusement. Elle ne peut ờtre conquise que par le jeune prolộtariat polonais, et entre ses mains elle sera sous bonne garde. Car pour les ouvriers du reste de l'Europe cette indộpendance est aussi nộcessaire que pour les ouvriers polonais eux- mờmes.

    Friedrich Engels Londres, 10 fộvrier 1892


    PREFACE A L'E***ION ITALIENNE DE 1893

    AU LECTEUR ITALIEN

    On peut dire que la publication du Manifeste du Parti communiste a coùncidộ exactement avec la date du 18 mars 1848, avec les rộvolutions de Milan et de Berlin, soulốvements armộs de deux nations, dont l'une est situộe au centre du continent europộen, l'autre, au centre des pays mộ***erranộens, deux nations affaiblies jusque-l par leur morcellement et les dissensions internes, ce qui les fit tomber sous la domination ộtrangốre. Tandis que l'Italie ộtait soumise l'empereur d'Autriche, l'Allemagne n'en subissait pas moins le joug, tout aussi sensible encore que moins direct, du tsar de toutes les Russies. Les consộquences des ộvộnements du 18 mars I848 dộlivrốrent l'Italie et l'Allemagne de cette infamie ; si, de 1848 1871, ces deux grandes nations furent rộtablies et purent recouvrer, de l'une ou de l'autre faỗon, leur indộpendance, cela tient, selon Marx, au fait que ceux-l mờmes qui avaient ộcrasộ la Rộvolution de 1848, ộtaient devenus, bien malgrộ eux, ses exộcuteurs testamentaires.

    Partout cette rộvolution fut l'oeuvre de la classe ouvriốre : c'est elle qui dressa les barricades et offrit sa vie en sacrifice. Cependant, seuls les ouvriers parisiens en renversant le gouvernement, ộtaient tout fait dộcidộs renverser aussi le rộgime bourgeois. Mais, bien qu'ils fussent conscients de l'antagonisme inộluctable entre leur propre classe et la bourgeoisie, ni le progrốs ộconomique du pays, ni la formation intellectuelle de la masse des ouvriers franỗais n'avaient encore atteint le niveau qui eỷt pu favoriser la transformation sociale. C'est bien pourquoi les fruits de la rộvolution devaient revenir en fin de compte la classe capitaliste. Dans les autres pays -< Italie, Allemagne, Autriche -< les ouvriers, dốs le dộbut, ne firent qu'aider la bourgeoisie accộder au pouvoir. Mais il n'est pas un seul pays oự la domination de la bourgeoisie soit possible sans l'indộpendance nationale. Aussi la rộvolution de 1848 devait-elle dộboucher sur l'unitộ et l'autonomie des nations qui en ộtaient privộes jusque-l : l'Italie, l'Allemagne, la Hongrie. Maintenant, c'est le tour de la Pologne.

    Ainsi, si la rộvolution de 1848 n'ộtait pas une rộvolution socialiste, elle a du moins dộblayộ la route, prộparộ le terrain pour cette derniốre. Le rộgime bourgeois, qui a suscitộ dans tous les pays l'essor de la grande industrie, a du mờme coup crộộ partout, durant ces derniers quarante-cinq ans, un prolộtariat nombreux, bien cimentộ et fort ; il a engendrộ ainsi, comme le *** le Manifeste, ses propres fossoyeurs. Sans l'autonomie et l'unitộ rendues chaque nation, il est impossible de rộaliser ni l'union internationale du prolộtariat ni une coopộration tranquille et intelligente de ces nations en vue d'atteindre les buts communs. Essayez de vous reprộsenter une action commune internationale des ouvriers italiens, hongrois, allemands, polonais et russes dans les con***ions politiques d'avant 1848 !

    Donc, les combats de 1848 n'ont pas ộtộ vains. De mờme les quarante-cinq annộes qui nous sộparent de cette pộriode rộvolutionnaire. Ses fruits commencent mỷrir, et je voudrais seulement que la parution de cette traduction italienne fỷt bon signe, signe avant-coureur de la victoire du prolộtariat italien, de mờme que la parution de l'original a ộtộ le prộcurseur de la rộvolution internationale.

    Le Manifeste rend pleine justice au rụle rộvolutionnaire que le capitalisme a jouộ dans le passộ. L'Italie fut la premiốre nation capitaliste. La fin du moyen õge fộodal, le dộbut de l'ốre capitaliste moderne trouvent leur expression dans une figure colossale. C'est l'Italien Dante, le dernier poốte du moyen õge et en mờme temps le premier poốte des temps nouveaux. Maintenant, comme en 1300, s'ouvre une ốre historique nouvelle. L'Italie nous donnera-t-elle un nouveau Dante qui perpộtuera l'ộclosion de cette ốre nouvelle, prolộtarienne ?

    Friedrich Engels ; Londres, 1er fộvrier I893


    MANIFESTE DU PARTI COMMUNISTE
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    Un spectre hante l'Europe : le spectre du communisme. Toutes les puissances de la vieille Europe se sont unies en une Sainte-Alliance pour traquer ce spectre : le pape et le tsar, Metternich et Guizot, les radicaux de France et les policiers d'Allemagne.

    Quelle est l'opposition qui n'a pas ộtộ accusộe de communisme par ses adversaires au pouvoir ? Quelle est l'opposition qui, son tour, n'a pas renvoyộ ses adversaires de droite ou de gauche l'ộpithốte infamante de communiste ?

    Il en rộsulte un double enseignement.

    Dộj le communisme est reconnu comme une puissance par toutes les puissances d'Europe.

    Il est grand temps que les communistes exposent, la face du monde entier, leurs conceptions, leurs buts et leurs tendances ; qu'ils opposent au conte du spectre communiste un manifeste du Parti lui-mờme.

    C'est cette fin que des communistes de diverses nationalitộs se sont rộunis Londres et ont rộdigộ le Manifeste suivant, qui sera publiộ en anglais, franỗais, allemand, italien, flamand et danois.

    I - BOURGEOIS ET PROLETAIRES

    L'histoire de toute sociộtộ jusqu' nos jours n'a ộtộ que l'histoire de luttes de classes.

    Homme libre et esclave, patricien et plộbộien, baron et serf, maợtre de jurande et compagnon, en un mot oppresseurs et opprimộs, en opposition constante, ont menộ une guerre ininterrompue, tantụt ouverte, tantụt dissimulộe, une guerre qui finissait toujours soit par une transformation rộvolutionnaire de la sociộtộ tout entiốre, soit par la destruction des deux classes en lutte.

    Dans les premiốres ộpoques historiques, nous constatons presque partout une organisation complốte de la sociộtộ en classes distinctes, une ộchelle graduộe de con***ions sociales. Dans la Rome antique, nous trouvons des patriciens, des chevaliers, des plộbộiens, des esclaves ; au moyen õge, des seigneurs, des vassaux, des maợtres de corporation, des compagnons, des serfs et, de plus, dans chacune de ces classes, une hiộrarchie particuliốre.

    La sociộtộ bourgeoise moderne, ộlevộe sur les ruines de la sociộtộ fộodale, n'a pas aboli les antagonismes de classes. Elle n'a fait que substituer de nouvelles classes, de nouvelles con***ions d'oppression, de nouvelles formes de lutte celles d'autrefois.

    Cependant, le caractốre distinctif de notre ộpoque, de l'ộpoque de la bourgeoisie, est d'avoir simplifiộ les antagonismes de classes. La sociộtộ se divise de plus en plus en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes diamộtralement opposộes : la bourgeoisie et le prolộtariat.

    Des serfs du moyen õge naquirent les petits bourgeois des premiốres villes ; de cette population municipale sortirent les premiers ộlộments de la bourgeoisie.

    La dộcouverte de l'Amộrique, la circumnavigation de l'Afrique offrirent la bourgeoisie naissante un nouveau champ d'action. Les marchộs des Indes Orientales et de la Chine, la colonisation de l'Amộrique, le commerce colonial, la multiplication des moyens d'ộchange et, en gộnộral, des marchandises donnốrent un essor jusqu'alors inconnu au nộgoce, la navigation, l'industrie et assurốrent, en consộquence, un dộveloppement rapide l'ộlộment rộvolutionnaire de la sociộtộ fộodale en dissolution.

    L'ancien mode d'exploitation fộodal ou corporatif de l'industrie ne suffisait plus aux besoins qui croissaient sans cesse mesure que s'ouvraient de nouveaux marchộs. La manufacture prit sa place. La moyenne bourgeoisie industrielle supplanta les maợtres de jurande ; la division du travail entre les diffộrentes corporations cộda la place la division du travail au sein de l'atelier mờme.

    Mais les marchộs s'agrandissaient sans cesse : la demande croissait toujours. La manufacture, son tour, devint insuffisante. Alors, la vapeur et la machine rộvolutionnốrent la production industrielle. La grande industrie moderne supplanta la manufacture ; la moyenne bourgeoisie industrielle cộda la place aux millionnaires de l'industrie, aux chefs de vộritables armộes industrielles, aux bourgeois modernes.

    La grande industrie a crộộ le marchộ mondial, prộparộ par la dộcouverte de l'Amộrique. Le marchộ mondial accộlộra prodigieusement le dộveloppement du commerce, de la navigation, des voies de communication terrestres. Ce dộveloppement rộagit son tour sur l'extension de l'industrie ; et, au fur et mesure que l'industrie, le commerce, la navigation, les chemins de fer se dộveloppaient, la bourgeoisie grandissait, dộcuplant ses capitaux et refoulant l'arriốre-plan les classes lộguộes par le moyen õge.

    La bourgeoisie moderne, nous le voyons, est elle-mờme le produit d'un long dộveloppement, d'une sộrie de rộvolutions dans les modes de production et d'ộchange.

    A chaque ộtape de l'ộvolution que parcourait la bourgeoisie correspondait pour elle un progrốs politique. Classe opprimộe par le despotisme fộodal, association armộe s'administrant elle-mờme dans la commune , ici, rộpublique urbaine indộpendante ; l, tiers ộtat taillable et corvộable de la monarchie, puis, durant la pộriode manufacturiốre, contrepoids de la noblesse dans la monarchie fộodale ou absolue, pierre angulaire des grandes monarchies, la bourgeoisie, depuis l'ộtablissement de la grande industrie et du marchộ mondial, s'est finalement emparộe de la souverainetộ politique exclusive dans l'Etat reprộsentatif moderne. Le gouvernement moderne n'est qu'un comitộ qui gốre les affaires communes de la classe bourgeoise tout entiốre.

    La bourgeoisie a jouộ dans l'histoire un rụle ộminemment rộvolutionnaire.

    Partout oự elle a conquis le pouvoir, elle a foulộ aux pieds les relations fộodales, patriarcales et idylliques. Tous les liens complexes et variộs qui unissent l'homme fộodal ses supộrieurs naturels, elle les a brisộs sans pitiộ pour ne laisser subsister d'autre lien, entre l'homme et l'homme, que le froid intộrờt, les dures exigences du ôpaiement au comptantằ. Elle a noyộ les frissons sacrộs de l'extase religieuse, de l'enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalitộ petite-bourgeoise dans les eaux glacộes du calcul ộgoùste. Elle a fait de la dignitộ personnelle une simple valeur d'ộchange ; elle a substituộ aux nombreuses libertộs si chốrement conquises, l'unique et impitoyable libertộ du commerce. En un mot, la place de l'exploitation que masquaient les illusions religieuses et politiques, elle a mis une exploitation ouverte, ộhontộe, directe, brutale.

    La bourgeoisie a dộpouillộ de leur aurộole toutes les activitộs qui passaient jusque-l pour vộnộrables et qu'on considộrait avec un saint respect. Le mộdecin, le juriste, le prờtre, le poốte, le savant, elle en a fait des salariộs ses gages.

    La bourgeoisie a dộchirộ le voile de sentimentalitộ qui recouvrait les relations de famille et les a rộduites n'ờtre que de simples rapports d'argent.

    La bourgeoisie a rộvộlộ comment la brutale manifestation de la force au moyen õge, si admirộe de la rộaction, trouva son complộment naturel dans la paresse la plus crasse. C'est elle qui, la premiốre, a fait voir ce dont est capable l'activitộ humaine. Elle a crộộ de tout autres merveilles que les pyramides d'Egypte, les aqueducs romains, les cathộdrales gothiques ; elle a menộ bien de tout autres expộ***ions que les invasions et les croisades.

    La bourgeoisie ne peut exister sans rộvolutionner constamment les instruments de production, ce qui veut dire les rapports de production, c'est--dire l'ensemble des rapports sociaux. Le maintien sans changement de l'ancien mode de production ộtait, au contraire, pour toutes les classes industrielles antộrieures, la con***ion premiốre de leur existence. Ce bouleversement continuel de la production, ce constant ộbranlement de tout le systốme social, cette agitation et cette insộcuritộ perpộtuelles distinguent l'ộpoque bourgeoise de toutes les prộcộdentes. Tous les rapports sociaux, figộs et couverts de rouille, avec leur cortốge de conceptions et d'idộes antiques et vộnộrables, se dissolvent ; ceux qui les remplacent vieillissent avant d'avoir pu s'ossifier. Tout ce qui avait soli***ộ et permanence s'en va en fumộe, tout ce qui ộtait sacrộ est profanộ, et les hommes sont forcộs enfin d'envisager leurs con***ions d'existence et leurs rapports rộciproques avec des yeux dộsabusộs.

    Poussộe par le besoin de dộbouchộs toujours nouveaux, la bourgeoisie envahit le globe entier. Il lui faut s'implanter partout, exploiter partout, ộtablir partout des relations.

    Par l'exploitation du marchộ mondial, la bourgeoisie donne un caractốre cosmopolite la production et la consommation de tous les pays. Au grand dộsespoir des rộactionnaires, elle a enlevộ l'industrie sa base nationale. Les vieilles industries nationales ont ộtộ dộtruites et le sont encore chaque jour. Elles sont supplantộes par de nouvelles industries, dont l'adoption devient une question de vie ou de mort pour toutes les nations civilisộes, industries qui n'emploient plus des matiốres premiốres indigốnes, mais des matiốres premiốres venues des rộgions les plus lointaines, et dont les produits se consomment non seulement dans le pays mờme, mais dans toutes les parties du globe. A la place des anciens besoins, satisfaits par les produits nationaux, naissent des besoins nouveaux, rộclamant pour leur satisfaction les produits des contrộes et des climats les plus lointains. A la place de l'ancien isolement des provinces et des nations se suffisant elles- mờmes, se dộveloppent des relations universelles, une interdộpendance universelle des nations. Et ce qui est vrai de la production matộrielle ne l'est pas moins des productions de l'esprit. Les oeuvres intellectuelles d'une nation deviennent la propriộtộ commune de toutes. L'ộtroitesse et l'exclusivisme nationaux deviennent de jour en jour plus impossibles ; et de la multiplicitộ des littộratures nationales et locales naợt une littộrature universelle.

    Par le rapide perfectionnement des instruments de production et l'amộlioration infinie des moyens de communication, la bourgeoisie entraợne dans le courant de la civilisation jusqu'aux nations les plus barbares. Le bon marchộ de ses produits est la grosse artillerie qui bat en brốche toutes les murailles de Chine et contraint la capitulation les barbares les plus opiniõtrement hostiles aux ộtrangers. Sous peine de mort, elle force toutes les nations adopter le mode bourgeois de production ; elle les force introduire chez elles la prộtendue civilisation, c'est--dire devenir bourgeoises. En un mot, elle se faỗonne un monde son image.

    La bourgeoisie a soumis la campagne la ville. Elle a crộộ d'ộnormes citộs ; elle a prodigieusement augmentộ la population des villes par rapport celles des campagnes, et, par l, elle a arrachộ une grande partie de la population l'abrutissement de la vie des champs. De mờme qu'elle a soumis la campagne la ville, les pays barbares ou demi- barbares aux pays civilisộs, elle a subordonnộ les peuples de paysans aux peuples de bourgeois, l'Orient l'Occident.

    La bourgeoisie supprime de plus en plus l'ộmiettement des moyens de production, de la propriộtộ et de la population. Elle a agglomộrộ la population, centralisộ les moyens de production et concentrộ la propriộtộ dans un petit nombre de mains. La consộquence fatale de ces changements a ộtộ la centralisation politique. Des provinces indộpendantes, tout juste fộdộrộes entre elles, ayant des intộrờts, des lois, des gouvernements, des tarifs douaniers diffộrents, ont ộtộ rộunies en une seule nation, avec un seul gouvernement, une seule loi, un seul intộrờt national de classe, derriốre un seul cordon douanier.

    La bourgeoisie, au cours de sa domination de classe peine sộculaire, a crộộ des forces productives plus nombreuses et plus colossales que l'avaient fait toutes les gộnộrations passộes prises ensemble. La domestication des forces de la nature, les machines, l'application de la chimie l'industrie et l'agriculture, la navigation vapeur, les chemins de fer, les tộlộgraphes ộlectriques, le dộfrichement de continents entiers, la rộgularisation des fleuves, des populations entiốres jaillies du sol <- quel siốcle antộrieur aurait soupỗonnộ que de pareilles forces productives dorment au sein du travail social ?

    Voici donc ce que nous avons vu : les moyens de production et d'ộchange, sur la base desquels s'est ộdifiộe la bourgeoisie, furent crộộs l'intộrieur de la sociộtộ fộodale. A un certain degrộ du dộveloppement de ces moyens de production et d'ộchange, les con***ions dans lesquelles la sociộtộ fộodale produisait et ộchangeait, l'organisation fộodale de l'agriculture et de la manufacture, en un mot le rộgime fộodal de propriộtộ, cessốrent de correspondre aux forces productives en plein dộveloppement. Ils entravaient la production au lieu de la faire progresser. Ils se transformốrent en autant de chaợnes. Il fallait les briser. Et on les brisa.

    A la place s'ộleva la libre concurrence, avec une constitution sociale et politique appropriộe, avec la suprộmatie ộconomique et politique de la classe bourgeoise.

    Nous assistons aujourd'hui un processus analogue. Les con***ions bourgeoises de production et d'ộchange, le rộgime bourgeois de la propriộtộ, cette sociộtộ bourgeoise moderne, qui a fait surgir de si puissants moyens de production et d'ộchange, ressemble au magicien qui ne sait plus dominer les puissances infernales qu'il a ộvoquộes. Depuis des dizaines d'annộes, l'histoire de l'industrie et du commerce n'est autre chose que l'histoire de la rộvolte des forces productives modernes contre les rapports modernes de production, contre le rộgime de propriộtộ, qui con***ionnent l'existence de la bourgeoisie et sa domination. Il suffit de mentionner les crises commerciales qui, par leur retour pộriodique, menacent de plus en plus l'existence de la sociộtộ bourgeoise. Chaque crise dộtruit rộguliốrement non seulement une masse de produits dộj crộộs, mais encore une grande partie des forces productives dộj existantes elles-mờmes. Une ộpidộmie qui, toute autre ộpoque, eỷt semblộ une absur***ộ, s'abat sur la sociộtộ, -< l'ộpidộmie de la surproduction. La sociộtộ se trouve subitement ramenộe un ộtat de barbarie momentanộe ; on dirait qu'une famine, une guerre d'extermination lui ont coupộ tous ses moyens de subsistance ; l'industrie et le commerce semblent anộantis. Et pourquoi ? Parce que la sociộtộ a trop de civilisation, trop de moyens de subsistance, trop d'industrie, trop de commerce. Les forces productives dont elle dispose ne favorisent plus la civilisation bourgeoise et le rộgime de la propriộtộ bourgeoise ; au contraire, elles sont devenues trop puissantes pour ce rộgime qui alors leur fait obstacle ; et toutes les fois que les forces productives sociales triomphent de cet obstacle, elles prộcipitent dans le dộsordre la sociộtộ bourgeoise tout entiốre et menacent l'existence de la propriộtộ bourgeoise. Le systốme bourgeois est devenu trop ộtroit pour contenir les richesses crộộes dans son sein.< Comment la bourgeoisie surmonte-t-elle ces crises ? D'un cụtộ, en dộtruisant par la violence une masse de forces productives ; de l'autre, en conquộrant de nouveaux marchộs et en exploitant plus fond les anciens. A quoi cela aboutit-il ? A prộparer des crises plus gộnộrales et plus formidables et diminuer les moyens de les prộvenir. Les armes dont la bourgeoisie s'est servie pour abattre la fộodalitộ se retournent aujourd'hui contre la bourgeoisie elle-mờme.

    Mais la bourgeoisie n'a pas seulement forgộ les armes qui la mettront mort ; elle a produit aussi les hommes qui manieront ces armes, les ouvriers modernes, les prolộtaires.

    A mesure que gran*** la bourgeoisie, c'est--dire le capital, se dộveloppe aussi le prolộtariat, la classe des ouvriers modernes qui ne vivent qu' la con***ion de trouver du travail et qui n'en trouvent que si leur travail accroợt le capital. Ces ouvriers, contraints de se vendre au jour le jour, sont une marchandise, un article de commerce comme un autre ; ils sont exposộs, par consộquent, toutes les vicissitudes de la concurrence, toutes les fluctuations du marchộ.

    Le dộveloppement du machinisme et la division du travail, en faisant perdre au travail du prolộtaire tout caractốre d'autonomie, lui ont fait perdre tout attrait pour l'ouvrier. Il devient un simple accessoire de la machine, on n'exige de lui que l'opộration la plus simple, la plus monotone, la plus vite apprise. Par consộquent, ce que coỷte l'ouvrier se rộduit, peu de chose prốs, au coỷt de ce qu'il lui faut pour s'entretenir et perpộtuer sa descendance. Or, le prix du travail, comme celui de toute marchandise, est ộgal son coỷt de production. Donc, plus le travail devient rộpugnant, plus les salaires baissent. Bien plus, la somme de labeur s'accroợt avec le dộveloppement du machinisme et de la division du travail, soit par l'augmentation des heures ouvrables, soit par l'augmentation du travail exigộ dans un temps donnộ, l'accộlộration du mouvement des machines, etc.

    L'industrie moderne a fait du petit atelier du maợtre-artisan patriarcal la grande fabrique du capitaliste industriel. Des masses d'ouvriers, entassộs dans la fabrique, sont organisộs militairement. Simples soldats de l'industrie, ils sont placộs sous la surveillance d'une hiộrarchie complốte de sous-officiers et d'officiers. Ils ne sont pas seulement les esclaves de la classe bourgeoise, de l'Etat bourgeois, mais encore, chaque jour, chaque heure, les esclaves de la machine, du contremaợtre, et surtout du bourgeois fabricant lui-mờme. Plus ce despotisme proclame ouvertement le profit comme son but unique, plus il devient mesquin, odieux, exaspộrant.

    Moins le travail exige d'habiletộ et de force, c'est--dire plus l'industrie moderne progresse, et plus le travail des hommes est supplantộ par celui des femmes et des enfants. Les distinctions d'õge et de ***e n'ont plus d'importance sociale pour la classe ouvriốre. Il n'y a plus que des instruments de travail, dont le coỷt varie suivant l'õge et le ***e.

    Une fois que l'ouvrier a subi l'exploitation du fabricant et qu'on lui a comptộ son salaire, il devient la proie d'autres membres de la bourgeoisie : du propriộtaire, du dộtaillant, du prờteur sur gages, etc., etc.

    Petits industriels, marchands et rentiers, artisans et paysans, tout l'ộchelon infộrieur des classes moyennes de jadis, tombent dans le prolộtariat ; d'une part, parce que leurs faibles capitaux ne leur permettant pas d'employer les procộdộs de la grande industrie, ils succombent dans leur concurrence avec les grands capitalistes ; d'autre part, parce que leur habiletộ technique est dộprộciộe par les mộthodes nouvelles de production. De sorte que le prolộtariat se recrute dans toutes les classes de la population.

    Le prolộtariat passe par diffộrentes phases d'ộvolution. Sa lutte contre la bourgeoisie commence avec son existence mờme.

    La lutte est engagộe d'abord par des ouvriers isolộs, ensuite par les ouvriers d'une mờme fabrique, enfin par les ouvriers d'une mờme branche d'industrie, dans une mờme localitộ, contre le bourgeois qui les exploite directement. Ils ne dirigent pas seulement leurs attaques contre les rapports bourgeois de production : ils les dirigent contre les instruments de production eux-mờmes ; ils dộtruisent les marchandises ộtrangốres qui leur font concurrence, brisent les machines, brỷlent les fabriques et s'efforcent de reconquộrir la position perdue de l'artisan du moyen õge.

    A ce stade, le prolộtariat forme une masse dissộminộe travers le pays et ộmiettộe par la concurrence. S'il arrive que les ouvriers se soutiennent par l'action de masse, ce n'est pas encore l le rộsultat de leur propre union, mais de celle de la bourgeoisie qui, pour atteindre ses fins politiques propres, doit mettre en branle le prolộtariat tout entier, et qui possốde encore provisoirement le pouvoir de le faire. Durant cette phase, les prolộtaires ne combattent donc pas leurs propres ennemis, mais les ennemis de leurs ennemis, c'est--dire les vestiges de la monarchie absolue, propriộtaires fonciers, bourgeois non industriels, petits bourgeois. Tout le mouvement historique est de la sorte concentrộ entre les mains de la bourgeoisie ; toute victoire remportộe dans ces con***ions est une victoire bourgeoise.

    Or, le dộveloppement de l'industrie, non seulement accroợt le nombre des prolộtaires, mais les concentre en masses plus considộrables ; la force des prolộtaires augmente et ils en prennent mieux conscience. Les intộrờts, les con***ions d'existence au sein du prolộtariat, s'ộgalisent de plus en plus, mesure que la machine efface toute diffộrence dans le travail et rộduit presque partout le salaire un niveau ộgalement bas. Par suite de la concurrence croissante des bourgeois entre eux et des crises commerciales qui en rộsultent, les salaires deviennent de plus en plus instables ; le perfectionnement constant et toujours plus rapide de la machine rend la con***ion de l'ouvrier de plus en plus prộcaire ; les collisions individuelles entre l'ouvrier et le bourgeois prennent de plus en plus le caractốre de collisions entre deux classes. Les ouvriers commencent par former des coalitions contre les bourgeois pour la dộfense de leurs salaires. Ils vont jusqu' constituer des associations permanentes pour ờtre prờts en vue de rộbellions ộventuelles. ầ et l, la lutte ộclate en ộmeute.

    Parfois, les ouvriers triomphent ; mais c'est un triomphe ộphộmốre. Le rộsultat vộritable de leurs luttes est moins le succốs immộdiat que l'union grandissante des travailleurs. Cette union est facilitộe par l'accroissement des moyens de communication qui sont crộộs par une grande industrie et qui permettent aux ouvriers de localitộs diffộrentes de prendre contact. Or, il suffit de cette prise de contact pour centraliser les nombreuses luttes locales, qui partout revờtent le mờme caractốre, en une lutte nationale, en une lutte de classes. Mais toute lutte de classes est une lutte politique, et l'union que les bourgeois du moyen õge mettaient des siốcles ộtablir avec leurs chemins vicinaux, les prolộtaires modernes la rộalisent en quelques annộes grõce aux chemins de fer.

    Cette organisation du prolộtariat en classe, et donc en parti politique, est sans cesse dộtruite de nouveau par la concurrence que se font les ouvriers entre eux. Mais elle renaợt toujours, et toujours plus forte, plus ferme, plus puissante. Elle profite des dissensions intestines de la bourgeoisie pour l'obliger reconnaợtre, sous forme de loi, certains intộrờts de la classe ouvriốre : par exemple le bill de dix heures en Angleterre.

    En gộnộral, les collisions qui se produisent dans la vieille sociộtộ favorisent de diverses maniốres le dộveloppement du prolộtariat. La bourgeoisie vit dans un ộtat de guerre perpộtuel ; d'abord contre l'aristocratie, puis contre ces fractions de la bourgeoisie mờme dont les intộrờts entrent en conflit avec le progrốs de l'industrie, et toujours, enfin, contre la bourgeoisie de tous les pays ộtrangers. Dans toutes ces luttes, elle se voit obligộe de faire appel au prolộtariat, de revendiquer son aide et de l'entraợner ainsi dans le mouvement politique. Si bien que la bourgeoisie fournit aux prolộtaires les ộlộments de sa propre ộducation, c'est--dire des armes contre elle- mờme.

    De plus, ainsi que nous venons de le voir, des fractions entiốres de la classe dominante sont, par le progrốs de l'industrie, prộcipitộes dans le prolộtariat, ou sont menacộes, tout au moins, dans leurs con***ions d'existence. Elles aussi apportent au prolộtariat une foule d'ộlộments d'ộducation.

    Enfin, au moment oự la lutte des classes approche de l'heure dộcisive, le processus de dộcomposition de la classe dominante, de la vieille sociộtộ tout entiốre, prend un caractốre si violent et si õpre qu'une petite fraction de la classe dominante se dộtache de celle-ci et se rallie la classe rộvolutionnaire, la classe qui porte en elle l'avenir. De mờme que, jadis, une partie de la noblesse passa la bourgeoisie, de nos jours une partie de la bourgeoisie passe au prolộtariat, et, notamment, cette partie des idộologues bourgeois qui se sont haussộs jusqu' la comprộhension thộorique de l'ensemble du mouvement historique.

    De toutes les classes qui, l'heure prộsente, s'opposent la bourgeoisie, le prolộtariat seul est une classe vraiment rộvolutionnaire. Les autres classes pộriclitent et pộrissent avec la grande industrie ; le prolộtariat, au contraire, en est le produit le plus authentique.

    Les classes moyennes, petits fabricants, dộtaillants, artisans, paysans, tous combattent la bourgeoisie parce qu'elle est une menace pour leur existence en tant que classes moyennes. Elles ne sont donc pas rộvolutionnaires, mais conservatrices ; bien plus, elles sont rộactionnaires : elles cherchent faire tourner l'envers la roue de l'histoire. Si elles sont rộvolutionnaires, c'est en considộration de leur passage imminent au prolộtariat : elles dộfendent alors leurs intộrờts futurs et non leurs intộrờts actuels ; elles abandonnent leur propre point de vue pour se placer celui du prolộtariat.

    Quant au lumpen-prolộtariat, ce produit passif de la pourriture des couches infộrieures de la vieille sociộtộ, il peut se trouver, ỗ et l, entraợnộ dans le mouvement par une rộvolution prolộtarienne ; cependant, ses con***ions de vie le disposeront plutụt se vendre la rộaction.

    Les con***ions d'existence de la vieille sociộtộ sont dộj dộtruites dans les con***ions d'existence du prolộtariat. Le prolộtaire est sans propriộtộ ; ses relations avec sa femme et ses enfants n'ont plus rien de commun avec celles de la famille bourgeoise ; le travail industriel moderne, l'asservissement de l'ouvrier au capital, aussi bien en Angleterre qu'en France, en Amộrique qu'en Allemagne, dộpouillent le prolộtaire de tout caractốre national. Les lois, la morale, la religion sont ses yeux autant de prộjugộs bourgeois derriốre lesquels se cachent autant d'intộrờts bourgeois.

    Toutes les classes qui, dans le passộ, se sont emparộes du pouvoir essayaient de consolider leur situation acquise en soumettant la sociộtộ aux con***ions qui leur assuraient leurs revenus propres. Les prolộtaires ne peuvent se rendre maợtres des forces productives sociales qu'en abolissant leur propre mode d'appropriation d'aujourd'hui et, par suite, tout le mode d'appropriation en vigueur jusqu' nos jours. Les prolộtaires n'ont rien sauvegarder qui leur appartienne, ils ont dộtruire toute garantie privộe, toute sộcuritộ privộe antộrieure.

    Tous les mouvements historiques ont ộtộ, jusqu'ici, accomplis par des minoritộs ou au profit des minoritộs. Le mouvement prolộtarien est le mouvement spontanộ de l'immense majoritộ au profit de l'immense majoritộ. Le prolộtariat, couche infộrieure de la sociộtộ actuelle, ne peut se soulever, se redresser, sans faire sauter toute la superstructure des couches qui constituent la sociộtộ officielle.

    La lutte du prolộtariat contre la bourgeoisie, bien qu'elle ne soit pas, quant au fond, une lutte nationale, en revờt cependant tout d'abord la forme. Il va sans dire que le prolộtariat de chaque pays doit en finir, avant tout, avec sa propre bourgeoisie.

    En esquissant grands traits les phases du dộveloppement du prolộtariat, nous avons retracộ l'histoire de la guerre civile, plus ou moins larvộe, qui travaille la sociộtộ actuelle jusqu' l'heure oự cette guerre ộclate en rộvolution ouverte, et oự le prolộtariat fonde sa domination par le renversement violent de la bourgeoisie.

    Toutes les sociộtộs antộrieures, nous l'avons vu, ont reposộ sur l'antagonisme de classes oppressives et de classes opprimộes. Mais, pour opprimer une classe, il faut pouvoir lui garantir des con***ions d'existence qui lui permettent, au moins, de vivre dans la servitude. Le serf, en plein servage, est parvenu devenir membre d'une commune, de mờme que le petit bourgeois s'est ộlevộ au rang de bourgeois, sous le joug de l'absolutisme fộodal. L'ouvrier moderne au contraire, loin de s'ộlever avec le progrốs de l'industrie, descend toujours plus bas, au- dessous mờme des con***ions de vie de sa propre classe. Le travailleur devient un pauvre, et le paupộrisme s'accroợt plus rapidement encore que la population et la richesse. Il est donc manifeste que la bourgeoisie est incapable de remplir plus longtemps son rụle de classe dirigeante et d'imposer la sociộtộ, comme loi rộgulatrice, les con***ions d'existence de sa classe. Elle ne peut plus rộgner, parce qu'elle est incapable d'assurer l'existence de son esclave dans le cadre de son esclavage, parce qu'elle est obligộe de le laisser dộchoir au point de devoir le nourrir au lieu de se faire nourrir par lui. La sociộtộ ne peut plus vivre sous sa domination, ce qui revient dire que l'existence de la bourgeoisie n'est plus compatible avec celle de la sociộtộ.

    L'existence et la domination de la classe bourgeoise ont pour con***ion essentielle l'accumulation de la richesse aux mains des particuliers, la formation et l'accroissement du Capital ; la con***ion d'existence du capital, c'est le salariat. Le salariat repose exclusivement sur la concurrence des ouvriers entre eux. Le progrốs de l'industrie, dont la bourgeoisie est l'agent sans volontộ propre et sans rộsistance, substitue l'isolement des ouvriers rộsultant de leur concurrence, leur union rộvolutionnaire par l'association. Ainsi, le dộveloppement de la grande industrie sape, sous les pieds de la bourgeoisie, le terrain mờme sur lequel elle a ộtabli son systốme de production et d'appropriation. Avant tout, la bourgeoisie produit ses propres fossoyeurs. Sa chute et la victoire du prolộtariat sont ộgalement inộvitables.
  2. Angelique

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    17/04/2001
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    II - PROLETAIRES ET COMMUNISTES
    Quelle est la position des communistes par rapport ? l'ensemble des prolộtaires ?
    Les communistes ne forment pas un parti distinct oppose aux autres partis ouvriers.
    Ils n'ont point d'intộrờts qui les sộparent de l'ensemble du prolộtariat.
    Ils n'ộtablissent pas de principes particuliers sur lesquels ils voudraient modeler le mouvement ouvrier.
    Les communistes ne se distinguent des autres partis ouvriers que sur deux points : 1. Dans les diffộrentes luttes nationales des prolộtaires, ils mettent en avant et font valoir les intộrờts indộpendants de la nationalitộ et communs ? tout le prolộtariat. 2. Dans les diffộrentes phases que traverse la lutte entre prolộtaires et bourgeois, ils reprộsentent toujours les intộrờts du mouvement dans sa totalitộ.
    Pratiquement, les communistes sont donc la fraction la plus rộsolue des partis ouvriers de tous les pays, la fraction qui stimule toutes les autres ; thộoriquement, ils ont sur le reste du prolộtariat l'avantage d'une intelligence claire des con***ions, de la marche et des fins gộnộrales du mouvement prolộtarien.
    Le but immộdiat des communistes est le mờme que celui de tous les autres partis prolộtariens : constitution des prolộtaires en classe, renversement de la domination bourgeoise, conquờte du pouvoir politique par le prolộtariat.
    Les conceptions thộoriques des communistes ne reposent nullement sur des idộes, des principes inventộs ou dộcouverts par tel ou tel rộformateur du monde.
    Elles ne sont que l'expression gộnộrale des con***ions rộelles d'une lutte de classes existante, d'un mouvement historique qui s'opốre sous nos yeux. L'abolition des rapports de propriộtộ qui ont existộ jusqu'ici n'est pas le caractốre distinctif du communisme.
    Le rộgime de la propriộtộ a subi de continuels changements, de continuelles transformations historiques.
    La Rộvolution franỗaise, par exemple, a aboli la propriộtộ fộodale au profit de la propriộtộ bourgeoise.
    Ce qui caractộrise le communisme, ce n'est pas l'abolition de la propriộtộ en gộnộral, mais l'abolition de la propriộtộ bourgeoise.
    Or, la propriộtộ privộe d'aujourd'hui, la propriộtộ bourgeoise, est la derniốre et la plus parfaite expression du mode de production et d'appropriation basộ sur des antagonismes de classes, sur l'exploitation des uns par les autres.
    En ce sens, les communistes peuvent rộsumer leur thộorie dans cette formule unique : abolition de la propriộtộ privộe.
    On nous a reprochộ, ? nous autres communistes, de vouloir abolir la propriộtộ personnellement acquise, fruit du travail de l'individu, propriộtộ que l'on dộclare ờtre la base de toute libertộ, de toute activitộ, de toute indộpendance individuelle.
    La propriộtộ personnelle, fruit du travail et du mộrite ! Veut-on parler de cette forme de propriộtộ antộrieure ? la propriộtộ bourgeoise qu'est la propriộtộ du petit bourgeois, du petit paysan ? Nous n'avons que faire de l'abolir, le progrốs de l'industrie l'a abolie et continue ? l'abolir chaque jour.
    Ou bien veut-on parler de la propriộtộ privộe d'aujourd'hui, de la propriộtộ bourgeoise ?
    Mais est-ce que le travail salariộ, le travail du prolộtaire, crộe pour lui de la propriộtộ ? Nullement. Il crộe le capital, c'est-?-dire la propriộtộ qui exploite le travail salariộ, et qui ne peut s'accroợtre qu'? la con***ion de produire encore et encore du travail salariộ, afin de l'exploiter de nouveau. Dans sa forme prộsente, la propriộtộ se meut entre ces deux termes antinomiques : le Capital et le Travail. Examinons les deux termes de cette antinomie.
    Etre capitaliste, c'est occuper non seulement une position purement personnelle, mais encore une position sociale dans la production. Le capital est un produit collectif : il ne peut ờtre mis en mouvement que par l'activitộ en commun de beaucoup d'individus, et mờme, en derniốre analyse, que par l'activitộ en commun de tous les individus, de toute la sociộtộ.
    Le capital n'est donc pas une puissance personnelle ; c'est une puissance sociale.
    Dốs lors, si le capital est transformộ en propriộtộ commune appartenant ? tous les membres de la sociộtộ, ce n'est pas une propriộtộ personnelle qui se change en propriộtộ commune. Seul le caractốre social de la propriộtộ change. Il perd son caractốre de classe.
    Arrivons au travail salariộ.
    Le prix moyen du travail salariộ, c'est le minimum du salaire, c'est-?- dire la somme des moyens de subsistance nộcessaires pour maintenir en vie l'ouvrier en tant qu'ouvrier. Par consộquent, ce que l'ouvrier s'approprie par son labeur est tout juste suffisant pour reproduire sa vie ramenộe ? sa plus simple expression. Nous ne voulons en aucune faỗon abolir cette appropriation personnelle des produits du travail, indispensable ? la reproduction de la vie du lendemain, cette appropriation ne laissant aucun profit net qui confốre un pouvoir sur le. travail d'autrui. Ce que nous voulons, c'est supprimer ce triste mode d'appropriation qui fait que l'ouvrier ne vit que pour accroợtre le capital, et ne vit qu'autant que l'exigent les intộrờts de la classe dominante.
    Dans la sociộtộ bourgeoise, le travail vivant n'est qu'un moyen d'accroợtre le travail accumulộ. Dans la sociộtộ communiste le travail accumulộ n'est qu'un moyen d'ộlargir, d'enrichir et d'embellir l'existence des travailleurs.
    Dans la sociộtộ bourgeoise, le passộ domine donc le prộsent ; dans la sociộtộ communiste c'est le prộsent qui domine le passộ. Dans la sociộtộ bourgeoise, le capital est indộpendant et personnel, tandis que l'individu qui travaille n'a ni indộpendance, ni personnalitộ.
    Et c'est l'abolition d'un pareil ộtat de choses que la bourgeoisie flộtrit comme l'abolition de l'individualitộ et de la libertộ ! Et avec raison. Car il s'agit effectivement d'abolir l'individualitộ, l'indộpendance, la libertộ bourgeoises.
    Par libertộ, dans les con***ions actuelles de la production bourgeoise, on entend la libertộ de commerce, la libertộ d'acheter et de vendre.
    Mais si le trafic disparaợt, le libre trafic disparaợt aussi. Au reste, tous les grands mots sur la libertộ du commerce, de mờme que toutes les forfanteries libộrales de notre bourgeoisie, n'ont un sens que par contraste avec le trafic entravộ, avec le bourgeois asservi du moyen õge ; ils n'ont aucun sens lorsqu'il s'agit de l'abolition, par le communisme, du trafic, du rộgime bourgeois de la production et de la bourgeoisie elle-mờme.
    Vous ờtes saisis d'horreur parce que nous voulons abolir la propriộtộ privộe. Mais, dans votre sociộtộ, la propriộtộ privộe est abolie pour les neuf dixiốmes de ses membres. C'est prộcisộment parce qu'elle n'existe pas pour ces neuf dixiốmes qu'elle existe pour vous. Vous nous reprochez donc de vouloir abolir une forme de propriộtộ qui ne peut exister qu'? la con***ion que l'immense majoritộ soit frustrộe de toute propriộtộ.
    En un mot, vous nous accusez de vouloir abolir votre propriộtộ ? vous. En vộritộ, c'est bien ce que nous voulons.
    Dốs que le travail ne peut plus ờtre converti en capital, en argent, en rente fonciốre, bref en pouvoir social capable d'ờtre monopolisộ, c'est- ?-dire dốs que la propriộtộ individuelle ne peut plus se transformer en propriộtộ bourgeoise, vous dộclarez que l'individu est supprimộ.
    Vous avouez donc que, lorsque vous parlez de l'individu, vous n'entendez parler que du bourgeois, du propriộtaire bourgeois. Et cet individu-l?, certes, doit ờtre supprimộ.
    Le communisme n'enlốve ? personne le pouvoir de s'approprier des produits sociaux ; il n'ụte que le pouvoir d'asservir ? l'aide de cette appropriation le travail d'autrui.
    On a objectộ encore qu'avec l'abolition de la propriộtộ privộe toute activitộ cesserait, qu'une paresse gộnộrale s'emparerait du monde.
    Si cela ộtait, il y a beau temps que la sociộtộ bourgeoise aurait succombộ ? la fainộantise, puisque, dans cette sociộtộ, ceux qui travaillent ne gagnent pas et que ceux qui gagnent ne travaillent pas. Toute l'objection se rộduit ? cette tautologie qu'il n'y a plus de travail salariộ du moment qu'il n'y a plus de capital.
    Les accusations portộes contre le mode communiste de production et d'appropriation des produits matộriels l'ont ộtộ ộgalement contre la production et l'appropriation des oeuvres de l'esprit. De mờme que, pour le bourgeois, la disparition de la propriộtộ de classe ộquivaut ? la disparition de toute production, de mờme la disparition de la culture de classe signifie, pour lui, la disparition de toute culture.
    La culture dont il dộplore la perte n'est pour l'immense majoritộ qu'un dressage qui en fait des machines.
    Mais inutile de nous chercher querelle, si c'est pour appliquer ? l'abolition de la propriộtộ bourgeoise l'ộtalon de vos notions bourgeoises de libertộ, de culture, de droit, etc. Vos idộes rộsultent elles-mờmes du rộgime bourgeois de production et de propriộtộ, comme votre droit n'est que la volontộ de votre classe ộrigộe en loi, volontộ dont le contenu est dộterminộ par les con***ions matộrielles d'existence de votre classe.
    La conception intộressộe qui vous fait ộriger en lois ộternelles de la nature et de la raison vos rapports de production et de propriộtộ< rapports transitoires que le cours de la production fait disparaợtre<, cette conception, vous- la partagez avec toutes les classes dirigeantes aujourd'hui disparues. Ce que vous admettez pour la propriộtộ antique, ce que vous admettez pour la propriộtộ fộodale, vous ne pouvez plus l'admettre pour la propriộtộ bourgeoise.
    L'abolition de la famille ! Mờme les plus radicaux s'indignent de cet infõme dessein des communistes.
    Sur quelle base repose la famille bourgeoise d'? prộsent ? Sur le capital, le profit individuel. La famille, dans sa plộnitude n'existe que pour la bourgeoisie ; mais elle a pour corollaire la suppression forcộe de toute famille pour le prolộtaire et la prostitution publique.
    La famille bourgeoise s'ộvanouit naturellement avec l'ộvanouissement de son corollaire, et l'une et l'autre disparaissent avec la disparition du capital.
    Nous reprochez-vous de vouloir abolir l'exploitation des enfants par leurs parents ? Ce crime-l?, nous l'avouons.
    Mais nous brisons, ***es-vous, les liens les plus intimes, en substituant ? l'ộducation par la famille l'ộducation par la sociộtộ.
    Et votre ộducation ? vous, n'est-elle pas, elle aussi, dộterminộe par la sociộtộ ? Dộterminộe par les con***ions sociales dans lesquelles vous ộlevez vos enfants, par l'immixtion directe ou non de la sociộtộ, par l'ộcole, etc. ? Les communistes n'inventent pas l'action de la sociộtộ sur l'ộducation ; ils en changent seulement le caractốre et arrachent l'ộducation ? l'influence de la classe dominante.
    Les dộclamations bourgeoises sur la famille et l'ộducation, sur les doux liens qui unissent l'enfant ? ses parents, deviennent de plus en plus ộcoeurantes, ? mesure que la grande industrie dộtruit tout lien de famille pour le prolộtaire et transforme les enfants en simples articles de commerce, en simples instruments de travail.
    Mais la bourgeoisie tout entiốre de s'ộcrier en choeur : Vous autres, communistes, vous voulez introduire la communautộ des femmes !
    Pour le bourgeois, sa femme n'est autre chose qu'un instrument de production. Il entend dire que les instruments de production doivent ờtre exploitộs en commun et il conclut naturellement que les femmes elles-mờmes partageront le sort commun de la socialisation.
    Il ne soupỗonne pas qu'il s'agit prộcisộment d'arracher la femme ? son rụle actuel de simple instrument de production.
    Rien de plus grotesque, d'ailleurs, que l'horreur ultra-morale qu'inspire ? nos bourgeois la prộtendue communautộ officielle des femmes que professeraient les communistes. Les communistes n'ont pas besoin d'introduire la communautộ des femmes ; elle a presque toujours existộ.
    Nos bourgeois, non contents d'avoir ? leur disposition les femmes et les filles des prolộtaires, sans parler de la prostitution officielle, trouvent un plaisir singulier ? se cocufier mutuellement.
    Le mariage bourgeois est, en rộalitộ, la communautộ des femmes mariộes. Tout au plus pourrait-on accuser les communistes de vouloir mettre ? la place d'une communautộ des femmes hypocritement dissimulộe une communautộ franche et officielle. Il est ộvident, du reste, qu'avec l'abolition du rộgime de production actuel, disparaợtra la communautộ des femmes qui en dộcoule, c'est-?-dire la prostitution officielle et non officielle.
    En outre, on a accusộ les communistes de vouloir abolir la patrie, la nationalitộ.
    Les ouvriers n'ont pas de patrie. On ne peut leur ravir ce qu'ils n'ont pas. Comme le prolộtariat de chaque pays doit en premier lieu conquộrir le pouvoir politique, s'ộriger en classe nationale, devenir lui-mờme la nation, il est encore par la national, quoique nullement au sens bourgeois du mot.
    Dộj? les dộmarcations nationales et les antagonismes entre les peuples disparaissent de plus en plus avec le dộveloppement de la bourgeoisie, la libertộ du commerce, le marchộ mondial, l'uniformitộ de la production industrielle et les con***ions d'existence qu'ils entraợnent.
    Le prolộtariat au pouvoir les fera disparaợtre plus encore. Son action commune, dans les pays civilisộs tout au moins, est une des premiốres con***ions de son ộmancipation.
    Abolissez l'exploitation de l'homme par l'homme, et vous abolirez l'exploitation d'une nation par une autre nation.
    Du jour oự tombe l'antagonisme des classes ? l'intộrieur de la nation, tombe ộgalement l'hostilitộ des nations entre elles.
    Quant aux accusations portộes d'une faỗon gộnộrale contre le communisme, ? des points de vue religieux, philosophiques et idộologiques, elles ne mộritent pas un examen approfondi.
    Est-il besoin d'une grande perspicacitộ pour comprendre que les idộes, les conceptions et les notions des hommes, en un mot leur conscience, changent avec tout changement survenu dans leurs con***ions de vie, leurs relations sociales, leur existence sociale ?
    Que dộmontre l'histoire des idộes, si ce n'est que la production intellectuelle se transforme avec la production matộrielle ? Les idộes dominantes d'une ộpoque n'ont jamais ộtộ que les idộes de la classe dominante.
    Lorsqu'on parle d'idộes qui rộvolutionnent une sociộtộ tout entiốre, on ộnonce seulement ce fait que, dans le sein de la vieille sociộtộ, les ộlộments d'une sociộtộ nouvelle se sont formộs et que la dissolution des vieilles idộes marche de pair avec la dissolution des anciennes con***ions d'existence.
    Quand le monde antique ộtait ? son dộclin, les vieilles religions furent vaincues par la religion chrộtienne. Quand, au XVIIIe siốcle, les idộes chrộtiennes cộdốrent la place aux idộes de progrốs, la sociộtộ fộodale livrait sa derniốre bataille ? la bourgeoisie, alors rộvolutionnaire. Les idộes de libertộ de conscience, de libertộ religieuse ne firent que proclamer le rốgne de la libre concurrence dans le domaine du savoir.
    ôSans doute, dira-t-on, les idộes religieuses, morales, philosophiques, politiques, juridiques, etc., se sont modifiộes au cours du dộveloppement historique. Mais la religion, la morale, la philosophie, la politique, le droit se maintenaient toujours ? travers ces transformations.
    Il y a de plus des vộritộs ộternelles, telles que la libertộ, la justice, etc., qui sont communes ? tous les rộgimes sociaux. Or, le communisme abolit les vộritộs ộternelles, il abolit la religion et la morale au lieu d'en renouveler la forme, et cela contre*** tout le dộveloppement historique antộrieur.ằ
    A quoi se rộduit cette accusation ? L'histoire de toute la sociộtộ jusqu'? nos jours ộtait faite d'antagonismes de classes, antagonismes qui, selon les ộpoques, ont revờtu des formes diffộrentes.
    Mais, quelle qu'ait ộtộ la forme revờtue par ces antagonismes, l'exploitation d'une partie de la sociộtộ par l'autre est un fait commun ? tous les siốcles passộs. Donc, rien d'ộtonnant si la conscience sociale de tous les siốcles, en dộpit de toute sa variộtộ et de sa diversitộ, se meut dans certaines formes communes, formes de conscience qui ne se dissoudront complốtement qu'avec l'entiốre disparition de l'antagonisme des classes.
    La rộvolution communiste est la rupture la plus radicale avec le rộgime tra***ionnel de propriộtộ ; rien d'ộtonnant si, dans le cours de son dộveloppement, elle rompt de la faỗon la plus radicale avec les idộes tra***ionnelles.
    Mais laissons l? les objections faites par la bourgeoisie au communisme.
    Nous avons dộj? vu plus haut que la premiốre ộtape dans la rộvolution ouvriốre est la constitution du prolộtariat en classe dominante, la conquờte de la dộmocratie.
    Le prolộtariat se servira de sa suprộmatie politique pour arracher petit ? petit tout le capital ? la bourgeoisie, pour centraliser tous les instruments de production entre les mains de l'Etat, c'est-?-dire du prolộtariat organisộ en classe dominante, et pour augmenter au plus vite la quantitộ des forces productives.
    Cela ne pourra naturellement se faire, au dộbut, que par une violation despotique du droit de propriộtộ et du rộgime bourgeois de production, c'est-?-dire par des mesures qui, ộconomiquement, paraissent insuffisantes et insoutenables, mais qui, au cours du mouvement, se dộpassent elles-mờmes et sont indispensables comme moyen de bouleverser le mode de production tout entier.
    Ces mesures, bien entendu, seront fort diffộrentes dans les diffộrents pays.
    Cependant, pour les pays les plus avancộs, les mesures suivantes pourront assez gộnộralement ờtre mises en application :
    1. Expropriation de la propriộtộ fonciốre et affectation de la rente fonciốre aux dộpenses de l'Etat.
    2. Impụt fortement progressif.
    3. Abolition de l'hộritage.
    4. Confiscation des biens de tous les ộmigrộs et rebelles.
    5. Centralisation du crộ*** entre les mains de l'Etat, au moyen d'une banque nationale, dont le capital appartiendra ? l'Etat et qui jouira d'un monopole exclusif.
    6. Centralisation entre les mains de l'Etat de tous les moyens de transport.
    7. Multiplication des manufactures nationales et des instruments de production ; dộfrichement des terrains incultes et amộlioration des terres cultivộes, d'aprốs un plan d'ensemble.
    8. Travail obligatoire pour tous ; organisation d'armộes industrielles, particuliốrement pour l'agriculture.
    9. Combinaison du travail agricole et du travail industriel ; mesures tendant ? faire graduellement disparaợtre l'antagonisme entre la ville et la campagne.
    10. Education publique et gratuite de tous les enfants. Abolition du travail des enfants dans les fabriques tel qu'il est pratiquộ aujourd'hui. Combinaison de l'ộducation avec la production matộrielle, etc.
    Les antagonismes de classes une fois disparus dans le cours du dộveloppement, toute la production ộtant concentrộe dans les mains des individus associộs, alors le pouvoir public perd son caractốre politique. Le pouvoir politique, ? proprement parler, est le pouvoir organisộ d'une classe pour l'oppression d'une autre. Si le prolộtariat, dans sa lutte contre la bourgeoisie, se constitue forcộment en classe, s'il s'ộrige par une rộvolution en classe dominante et, comme classe dominante, dộtruit par la violence l'ancien rộgime de production, il dộtruit, en mờme temps que ce rộgime de production, les con***ions de l'antagonisme des classes, il dộtruit les classes en gộnộral et, par l? mờme, sa propre domination comme classe.
    A la place de l'ancienne sociộtộ bourgeoise, avec ses classes et ses antagonismes de classes, surgit une association oự le libre dộveloppement de chacun est la con***ion du libre dộveloppement de tous.
    III - LITTERATURE SOCIALISTE ET COMMUNISTE
    1. LE SOCIALISME REACTIONNAIRE
    a) Le socialisme fộodal
    Par leur position historique, les aristocraties franỗaise et anglaise se trouvốrent appelộes ? ộcrire des pamphlets contre la sociộtộ bourgeoise. Dans la rộvolution franỗaise de juillet 1830, dans le mouvement anglais pour la Rộforme, elles avaient succombộ une fois de plus sous les coups de cette arriviste abhorrộe. Pour elles, il ne pouvait plus ờtre question d'une lutte politique sộrieuse. Il ne leur restait plus que la lutte littộraire. Or, mờme dans le domaine littộraire, la vieille phrasộologie de la Restauration ộtait devenue impossible. Pour se crộer des sympathies, il fallait que l'aristocratie fợt semblant de perdre de vue ses intộrờts propres et de dresser son acte d'accusation contre la bourgeoisie dans le seul intộrờt de la classe ouvriốre exploitộe. Elle se mộnageait de la sorte la satisfaction de chansonner son nouveau maợtre et d'oser lui fredonner ? l'oreille des prophộties d'assez mauvais augure.
    Ainsi naquit le socialisme fộodal oự se mờlaient jộrộmiades et libelles, ộchos du passộ et grondements sourds de l'avenir. Si parfois sa critique amốre, mordante et spirituelle frappait la bourgeoisie au coeur, son impuissance absolue ? comprendre la marche de l'histoire moderne ộtait toujours assurộe d'un effet comique.
    En guise de drapeau, ces messieurs arboraient la besace du mendiant, afin d'attirer ? eux le peuple ; mais, dốs que le peuple accourut, il aperỗut les vieux blasons fộodaux dont s'ornait leur derriốre et il se dispersa avec de grands ộclats de rire irrộvộrencieux.
    Une partie des lộgitimistes franỗais et la Jeune Angleterre ont donnộ au monde ce spectacle.
    Quand les champions de la fộodalitộ dộmontrent que le mode d'exploitation fộodal ộtait autre que celui de la bourgeoisie, ils n'oublient qu'une chose : c'est que la fộodalitộ exploitait dans des circonstances et des con***ions tout ? fait diffộrentes et aujourd'hui pộrimộes. Quand ils font remarquer que, sous le rộgime fộodal, le prolộtariat moderne n'existait pas, ils n'oublient qu'une chose : c'est que la bourgeoisie, prộcisộment, a nộcessairement jailli de leur organisation sociale.
    Ils dộguisent si peu, d'ailleurs, le caractốre rộactionnaire de leur critique que leur principal grief contre la bourgeoisie est justement de dire qu'elle assure, sous son rộgime, le dộveloppement d'une classe qui fera sauter tout l'ancien ordre social.
    Ils reprochent plus encore ? la bourgeoisie d'avoir produit un prolộtariat rộvolutionnaire que d'avoir crộộ le prolộtariat en gộnộral.
    Aussi dans la lutte politique prennent-ils une part active ? toutes les mesures de violence contre la classe ouvriốre. Et dans leur vie de tous les jours, en dộpit de leur phrasộologie pompeuse, ils s'accommodent trốs bien de cueillir les pommes d'or et de troquer la fidộlitộ, l'amour et l'honneur contre le commerce de la laine, de la betterave ? sucre et de l'eau-de-vie.
    De mờme que le prờtre et le seigneur fộodal marchốrent toujours la main dans la main, de mờme le socialisme clộrical marche cụte ? cụte avec le socialisme fộodal.
    Rien n'est plus facile que de donner une teinture de socialisme ? l'ascộtisme chrộtien. Le christianisme ne s'est-il pas ộlevộ lui aussi contre la propriộtộ privộe, le mariage, l'Etat ? Et ? leur place n'a-t- il pas prờchộ la charitộ et la mendicitộ, le cộlibat et la mortification de la chair, la vie monastique et l'Eglise ? Le socialisme chrộtien n'est que l'eau bộnite avec laquelle le prờtre consacre le dộpit de l'aristocratie.
    b) Le socialisme petit-bourgeois
    L'aristocratie fộodale n'est pas la seule classe qu'ait ruinộe la bourgeoisie, elle n'est pas la seule classe dont les con***ions d'existence s'ộtiolent et dộpộrissent dans la sociộtộ bourgeoise moderne. Les petits bourgeois et les petits paysans du moyen õge ộtaient les prộcurseurs de la bourgeoisie moderne. Dans les pays oự l'industrie et le commerce sont moins dộveloppộs, cette classe continue ? vộgộter ? cụtộ de la bourgeoisie florissante.
    Dans les pays oự s'ộpanouit la civilisation moderne, il s'est formộ une nouvelle classe de petits bourgeois qui oscille entre le prolộtariat et la bourgeoisie ; fraction complộmentaire de la sociộtộ bourgeoise, elle se reconstitue sans cesse ; mais, par suite de la concurrence, les individus qui la composent se trouvent sans cesse prộcipitộs dans le prolộtariat, et, qui plus est, avec le dộveloppement progressif de la grande industrie, ils voient approcher l'heure oự ils disparaợtront totalement en tant que fraction autonome de la sociộtộ moderne, et seront remplacộs dans le commerce, la manufacture et l'agriculture par des contremaợtres et des employộs.
    Dans les pays comme la France, oự les paysans forment bien plus de la moitiộ de la population, il est naturel que des ộcrivains qui prenaient fait et cause pour le prolộtariat contre la bourgeoisie aient appliquộ ? leur critique du rộgime bourgeois des critốres petits-bourgeois et paysans et qu'ils aient pris parti pour les ouvriers du point de vue de la petite bourgeoisie. Ainsi, se forma le socialisme petit-bourgeois. Sismondi est le chef de cette littộrature, non seulement en France, mais en Angleterre aussi.
    Ce socialisme analysa avec beaucoup de sagacitộ les contradictions inhộrentes au rộgime de la production moderne. Il mit ? nu les hypocrites apologies des ộconomistes. Il dộmontra d'une faỗon irrộfutable les effets meurtriers du machinisme et de la division du travail, la concentration des capitaux et de la propriộtộ fonciốre, la surproduction, les crises, la fatale dộcadence des petits bourgeois et des paysans, la misốre du prolộtariat, l'anarchie dans la production, la criante disproportion dans la distribution des richesses, la guerre d'extermination industrielle des nations entre elles, la dissolution des vieilles moeurs, des vieilles relations familiales, des vieilles nationalitộs.
    A en juger toutefois d'aprốs son contenu positif, ou bien ce socialisme entend rộtablir les anciens moyens de production et d'ộchange, et, avec eux, l'ancien rộgime de propriộtộ et toute l'ancienne sociộtộ, ou bien il entend faire entrer de force les moyens modernes de production et d'ộchange dans le cadre ộtroit de l'ancien rộgime de propriộtộ qui a ộtộ brisộ, et fatalement brisộ, par eux. Dans l'un et l'autre cas, ce socialisme est ? la fois rộactionnaire et utopique.
    Pour la manufacture, le rộgime corporatif ; pour l'agriculture, le rộgime patriarcal : voil? son dernier mot.
    Au dernier terme de son ộvolution, cette ộcole est tombộe dans le lõche marasme des lendemains d'ivresse.
    c) Le socialisme allemand ou socialisme ôvraiằ
    La littộrature socialiste et communiste de la France, nộe sous la pression d'une bourgeoisie dominante, expression littộraire de la rộvolte contre cette domination, fut introduite en Allemagne au moment oự la bourgeoisie commenỗait sa lutte contre l'absolutisme fộodal.
    Philosophes, demi-philosophes et beaux esprits allemands se jetốrent avidement sur cette littộrature, mais ils oubliốrent seulement qu'avec l'importation de la littộrature franỗaise en Allemagne, les con***ions de vie de la France n'y avaient pas ộtộ simultanộment introduites. Par rapport aux con***ions de vie allemandes, cette littộrature franỗaise perdait toute signification pratique immộdiate et prit un caractốre purement littộraire. Elle ne devait plus paraợtre qu'une spộculation oiseuse sur la sociộtộ vraie, sur la rộalisation de la nature humaine. Ainsi, pour les philosophes allemands du XVIIIe siốcle, les revendications de la premiốre Rộvolution franỗaise n'ộtaient que les revendications de la ôraison pratiqueằ en gộnộral, et les manifestations de la volontộ des bourgeois rộvolutionnaires de France n'exprimaient ? leurs yeux que les lois de la volontộ pure, de la volontộ telle qu'elle doit ờtre, de la volontộ vộritablement humaine.
    L'unique travail des littộrateurs allemands, ce fut de mettre ? l'unisson les nouvelles idộes franỗaises et leur vieille conscience philosophique, ou plutụt de s'approprier les idộes franỗaises en partant de leur point de vue philosophique.
    Ils se les appropriốrent comme on fait d'une langue ộtrangốre par la traduction.
    On sait comment les moines recouvraient les manuscrits des oeuvres classiques de l'antiquitộ paùenne d'absurdes lộgendes de saints catholiques. A l'ộgard de la littộrature franỗaise profane, les littộrateurs allemands procộdốrent inversement. Ils glissốrent leurs insanitộs philosophiques sous l'original franỗais. Par exemple, sous la critique franỗaise du rộgime de l'argent, ils ộcrivirent ôaliộnation de la nature humaineằ, sous la critique franỗaise de l'Etat bourgeois, ils ộcrivirent ôabolition du rốgne de l'universalitộ abstraiteằ, et ainsi de suite.
    La substitution de cette phrasộologie philosophique aux dộveloppements franỗais, ils la baptisốrent : ôphilosophie de l'actionằ, ôsocialisme vraiằ, ôscience allemande du socialismeằ, ôjustification philosophique du socialismeằ, etc.
    De cette faỗon, on ộmascula formellement la littộrature socialiste et communiste franỗaise. Et, comme elle cessait d'ờtre l'expression de la lutte d'une classe contre une autre entre les mains des Allemands, ceux- ci se fộlicitốrent de s'ờtre ộlevộs au-dessus de l'ôộtroitesse franỗaiseằ et d'avoir dộfendu non pas de vrais besoins, mais le besoin du vrai ; non pas les intộrờts du prolộtaire, mais les intộrờts de l'ờtre humain, de l'homme en gộnộral, de l'homme qui n'appartient ? aucune classe ni ? aucune rộalitộ et qui n'existe que dans le ciel embrumộ de l'imagination philosophique.
    Ce socialisme allemand, qui prenait si solennellement au sộrieux ses maladroits exercices d'ộcolier et qui les claironnait avec un si bruyant charlatanisme, per*** cependant peu ? peu son innocence pộdantesque.
    Le combat de la bourgeoisie allemande et surtout de la bourgeoisie prussienne contre les fộodaux et la monarchie absolue, en un mot le mouvement libộral, devint plus sộrieux.
    De la sorte, le ôvraiằ socialisme eut l'occasion tant souhaitộe d'opposer au mouvement politique les revendications socialistes. Il put lancer les anathốmes tra***ionnels contre le libộralisme, le rộgime reprộsentatif, la concurrence bourgeoise, la libertộ bourgeoise de la presse, le droit bourgeois, la libertộ et l'ộgalitộ bourgeoises ; il put prờcher aux masses qu'elles n'avaient rien ? gagner, mais au contraire, tout ? perdre ? ce mouvement bourgeois. Le socialisme allemand oublia, fort ? propos, que la critique franỗaise, dont il ộtait l'insipide ộcho, supposait la sociộtộ bourgeoise moderne avec les con***ions matộrielles d'existence qui y correspondent et une Constitution politique appropriộe, toutes choses que, pour l'Allemagne, il s'agissait prộcisộment encore de conquộrir.
    Pour les gouvernements absolus de l'Allemagne, avec leur cortốge de prờtres, de pộdagogues, de hobereaux et de bureaucrates, ce socialisme devint, contre la bourgeoisie menaỗante, l'ộpouvantail rờvộ.
    Il ajouta son hypocrisie doucereuse aux coups de fouet et aux coups de fusil par lesquels ces mờmes gouvernements rộpondaient aux ộmeutes des ouvriers allemands.
    Si le ôvraiằ socialisme devint ainsi une arme contre la bourgeoisie allemande aux mains des gouvernements, il reprộsentait directement, en outre, un intộrờt rộactionnaire, l'intộrờt de la petite bourgeoisie allemande. La classe des petits bourgeois lộguộe par le XVIe siốcle, et depuis lors sans cesse renaissante sous des formes diverses, constitue pour l'Allemagne la vraie base sociale du rộgime ộtabli.
    La maintenir, c'est maintenir en Allemagne le rộgime existant. La suprộmatie industrielle et politique de la grande bourgeoisie menace cette petite bourgeoisie de dộchộance certaine, par suite de la concentration des capitaux, d'une part, et de l'apparition d'un prolộtariat rộvolutionnaire, d'autre part. Le ôvraiằ socialisme lui parut pouvoir faire d'une pierre deux coups. Il se propagea comme une ộpidộmie.
    Des ộtoffes lộgốres de la spộculation, les socialistes allemands firent un ample vờtement, brodộ des fines fleurs de leur rhộtorique, tout imprộgnộ d'une chaude rosộe sentimentale, et ils en habillốrent le squelette de leurs ôvộritộs ộternellesằ, ce qui, auprốs d'un tel public, ne fit qu'activer l'ộcoulement de leur marchandise.
    De son cụtộ, le socialisme allemand comprit de mieux en mieux que c'ộtait sa vocation d'ờtre le reprộsentant grandiloquent de cette petite bourgeoisie.
    Il proclama que la nation allemande ộtait la nation exemplaire et le philistin allemand l'homme exemplaire. A toutes les infamies de cet homme exemplaire, il donna un sens occulte, un sens supộrieur et socialiste qui leur faisait signifier le contraire de ce qu'elles ộtaient. Il alla jusqu'au bout, s'ộlevant contre la tendance ôbrutalement destructiveằ du communisme et proclamant qu'il planait impartialement au-dessus de toutes les luttes de classes. A quelques exceptions prốs, toutes les publications prộtendues socialistes ou communistes qui circulent en Allemagne appartiennent ? cette sale et ộnervante littộrature .
    2. LE SOCIALISME CONSERVATEUR OU BOURGEOIS
    Une partie de la bourgeoisie cherche ? porter remốde aux anomalies sociales, afin de consolider la sociộtộ bourgeoise.
    Dans cette catộgorie, se rangent les ộconomistes, les philanthropes, les humanitaires, les gens qui s'occupent d'amộliorer le sort de la classe ouvriốre, d'organiser la bienfaisance, de protộger les animaux, de fonder des sociộtộs de tempộrance, bref, les rộformateurs en chambre de tout acabit.
    Et l'on est allộ jusqu'? ộlaborer ce socialisme bourgeois en systốmes complets.
    Citons, comme exemple, la Philosophie de la misốre de Proudhon.
    Les socialistes bourgeois veulent les con***ions de vie de la sociộtộ moderne sans les luttes et les dangers qui en dộcoulent fatalement. Ils veulent la sociộtộ actuelle, mais expurgộe des ộlộments qui la rộvolutionnent et la dissolvent. Ils veulent la bourgeoisie sans le prolộtariat. La bourgeoisie ; comme de juste, se reprộsente le monde oự elle domine comme le meilleur des mondes. Le socialisme bourgeois systộmatise plus ou moins ? fond cette reprộsentation consolante. Lorsqu'il somme le prolộtariat de rộaliser ses systốmes et d'entrer dans la nouvelle Jộrusalem, il ne fait que l'inviter, au fond, ? s'en tenir ? la sociộtộ actuelle, mais ? se dộbarrasser de la conception haineuse qu'il s'en fait.
    Une autre forme de socialisme, moins systộmatique, mais plus pratique, essaya de dộgoỷter les ouvriers de tout mouvement rộvolutionnaire, en leur dộmontrant que ce n'ộtait pas telle ou telle transformation politique, mais seulement une transformation des con***ions de la vie matộrielle, des rapports ộconomiques, qui pouvait leur profiter. Notez que, par transformation des con***ions de la vie matộrielle, ce socialisme n'entend aucunement l'abolition du rộgime de production bourgeois, laquelle n'est possible que par la rộvolution, mais uniquement la rộalisation de rộformes administratives sur la base mờme de la production bourgeoise, rộformes qui, par consộquent, ne changent rien aux rapports du Capital et du Salariat et ne font, tout au plus, que diminuer pour la bourgeoisie les frais de sa domination et allộger le budget de l'Etat.
    Le socialisme bourgeois n'atteint son expression adộquate que lorsqu'il devient une simple figure de rhộtorique.
    Le libre-ộchange, dans l'intộrờt de la classe ouvriốre ! Des droits protecteurs, dans l'intộrờt de la classe ouvriốre ! Des prisons cellulaires, dans l'intộrờt de la classe ouvriốre ! Voil? le dernier mot du socialisme bourgeois, le seul qu'il ait *** sộrieusement.
    Car le socialisme bourgeois tient tout entier dans cette affirmation que les bourgeois sont des bourgeois<dans l'intộrờt de la classe ouvriốre.
    3. LE SOCIALISME ET LE COMMUNISME CRITICO-UTOPIQUES
    Il ne s'agit pas ici de la littộrature qui, dans toutes les grandes rộvolutions modernes, a formulộ les revendications du prolộtariat (ộcrits de Babeuf, etc.).
    Les premiốres tentatives directes du prolộtariat pour faire prộvaloir ses propres intộrờts de classe, faites en un temps d'effervescence gộnộrale, dans la pộriode du renversement de la sociộtộ fộodale, ộchouốrent nộcessairement, tant du fait de l'ộtat embryonnaire du prolộtariat lui-mờme que du fait de l'absence des con***ions matộrielles de son ộmancipation, con***ions qui ne peuvent ờtre que le rộsultat de l'ộpoque bourgeoise. La littộrature rộvolutionnaire qui accompagnait ces premiers mouvements du prolộtariat a forcộment un contenu rộactionnaire. Elle prộconise un ascộtisme universel et un ộgalitarisme grossier.
    Les systốmes socialistes et communistes proprement ***s, les systốmes de Saint-Simon, de Fourier, d'Owen, etc., font leur apparition dans la premiốre pộriode de la lutte entre le prolộtariat et la bourgeoisie, pộriode dộcrite ci-dessus (voir ôBourgeois et prolộtairesằ).
    Les inventeurs de ces systốmes se rendent bien compte de l'antagonisme des classes, ainsi que de l'action d'ộlộments dissolvants dans la sociộtộ dominante elle-mờme. Mais ils n'aperỗoivent, du cụtộ du prolộtariat, aucune initiative historique, aucun mouvement politique qui lui soit propre.
    Comme le dộveloppement de l'antagonisme des classes marche de pair avec le dộveloppement de l'industrie, ils n'aperỗoivent pas davantage les con***ions matộrielles de l'ộmancipation du prolộtariat et se mettent en quờte d'une science sociale, de lois sociales, dans le but de crộer ces con***ions.
    A l'activitộ sociale, ils substituent leur propre ingộniositộ ; aux con***ions historiques de l'ộmancipation, des con***ions fantaisistes ; ? l'organisation graduelle et spontanộe du prolộtariat en classe, une organisation de la sociộtộ fabriquộe de toutes piốces par eux-mờmes. Pour eux, l'avenir du monde se rộsout dans la propagande et la mise en pratique de leurs plans de sociộtộ.
    Dans la confection de ces plans, toutefois, ils ont conscience de dộfendre avant tout les intộrờts de la classe ouvriốre, parce qu'elle est la classe la plus souffrante. Pour eux le prolộtariat n'existe que sous cet aspect de la classe la plus souffrante.
    Mais la forme rudimentaire de la lutte des classes, ainsi que leur propre position sociale les portent ? se considộrer comme bien au-dessus de tout antagonisme de classes. Ils dộsirent amộliorer les con***ions matộrielles de la vie pour tous les membres de la sociộtộ, mờme les plus privilộgiộs. Par consộquent, ils ne cessent de faire appel ? la sociộtộ tout entiốre sans distinction, et mờme ils s'adressent de prộfộrence ? la classe rộgnante. Car, en vộritộ, il suffit de comprendre leur systốme pour reconnaợtre que c'est le meilleur de tous les plans possibles de la meilleure des sociộtộs possibles.
    Ils repoussent donc toute action politique et surtout toute action rộvolutionnaire ; ils cherchent ? atteindre leur but par des moyens pacifiques et essayent de frayer un chemin au nouvel ộvangile social par la force de l'exemple, par des expộriences en petit qui ộchouent naturellement toujours.
    La peinture fantaisiste de la sociộtộ future, ? une ộpoque oự le prolộtariat, peu dộveloppộ encore, envisage sa propre situation d'une maniốre elle-mờme fantaisiste, correspond aux premiốres aspirations instinctives des ouvriers vers une transformation complốte de la sociộtộ.
    Mais les ộcrits socialistes et communistes renferment aussi des ộlộments critiques. Ils attaquent la sociộtộ existante dans ses bases. Ils ont fourni, par consộquent, en leur temps, des matộriaux d'une grande valeur pour ộclairer les ouvriers. Leurs propositions positives en vue de la sociộtộ future -< suppression de l'antagonisme entre la ville et la campagne, abolition de la famille, du gain privộ et du travail salariộ, proclamation de l'harmonie sociale et transformation de l'Etat en une simple administration de la production -<, toutes ces propositions ne font qu'annoncer la disparition de l'antagonisme de classes, antagonisme qui commence seulement ? se dessiner et dont les faiseurs de systốmes ne connaissent encore que les premiốres formes indistinctes et confuses. Aussi, ces propositions n'ont-elles encore qu'un sens purement utopique.
    L'importance du socialisme et du communisme critico-utopiques est en raison inverse du dộveloppement historique. A mesure que la lutte des classes s'accentue et prend forme, cette faỗon de s'ộlever au-dessus d'elle par l'imagination, cette opposition imaginaire qu'on lui fait, perdent toute valeur pratique, toute justification thộorique. C'est pourquoi, si, ? beaucoup d'ộgards, les auteurs de ces systốmes ộtaient des rộvolutionnaires, les sectes que forment leurs disciples sont toujours rộactionnaires, car ces disciples s'obstinent ? maintenir les vieilles conceptions de leurs maợtres en face de l'ộvolution historique du prolộtariat. Ils cherchent donc, et en cela ils sont logiques, ? ộmousser la lutte des classes et ? concilier les antagonismes. Ils continuent ? rờver la rộalisation expộrimentale de leurs utopies sociales -<ộtablissement de phalanstốres isolộs, crộation de home- colonies, fondation d'une petite Icarie , ộ***ion in-douze de la Nouvelle Jộrusalem,<- et, pour la construction de tous ces chõteaux en Espagne, ils se voient forcộs de faire appel au coeur et ? la caisse des philanthropes bourgeois. Petit ? petit, ils tombent dans la catộgorie des socialistes rộactionnaires ou conservateurs dộpeints plus haut et ne s'en distinguent plus que par un pộdantisme plus systộmatique et une foi superstitieuse et fanatique dans l'efficacitộ miraculeuse de leur science sociale.
    Ils s'opposent donc avec acharnement ? toute action politique des ouvriers, une pareille action ne pouvant provenir, ? leur avis, que d'un manque de foi aveugle dans le nouvel ộvangile.
    Les owenistes en Angleterre, les fouriộristes en France rộagissent les uns contre les chartistes, les autres contre les rộformistes.
    IV - POSITION DES COMMUNISTES ENVERS LES DIFFERENTS PARTIS D'OPPOSITION
    D'aprốs ce que nous avons *** au chapitre II, la position des communistes ? l'ộgard des partis ouvriers dộj? constituộs s'explique d'elle-mờme, et, partant, leur position ? l'ộgard des chartistes en Angleterre et des rộformateurs agraires dans l'Amộrique du Nord.
    Ils combattent pour les intộrờts et les buts immộdiats de la classe ouvriốre ; mais dans le mouvement prộsent, ils dộfendent et reprộsentent en mờme temps l'avenir du mouvement. En France, les communistes se rallient au Parti dộmocrate-socialiste contre la bourgeoisie conservatrice et radicale, tout en se rộservant le droit de critiquer les phrases et les illusions lộguộes par la tra***ion rộvolutionnaire.
    En Suisse, ils appuient les radicaux, sans mộconnaợtre que ce parti se compose d'ộlộments contradictoires, moitiộ de dộmocrates socialistes, dans l'acception franỗaise du mot, moitiộ de bourgeois radicaux.
    En Pologne, les communistes soutiennent le parti qui voit, dans une rộvolution agraire, la con***ion de l'affranchissement national, c'est- ?-dire le parti qui fit, en 1846, l'insurrection de Cracovie.
    En Allemagne, le Parti communiste lutte d'accord avec la bourgeoisie, toutes les fois que la bourgeoisie agit rộvolutionnairement contre la monarchie absolue, la propriộtộ fonciốre fộodale et la petite bourgeoisie.
    Mais, ? aucun moment, il ne nộglige d'ộveiller chez les ouvriers une conscience claire et nette de l'antagonisme violent qui existe entre la bourgeoisie et le prolộtariat, afin que, l'heure venue, les ouvriers allemands sachent convertir les con***ions politiques et sociales, crộộes par le rộgime bourgeois, en autant d'armes contre la bourgeoisie, afin que, sitụt dộtruites les classes rộactionnaires de l'Allemagne, la lutte puisse s'engager contre la bourgeoisie elle-mờme.
    C'est vers l'Allemagne que se tourne surtout l'attention des communistes, parce que l'Allemagne se trouve ? la veille d'une rộvolution bourgeoise, parce qu'elle accomplira cette rộvolution dans des con***ions plus avancộes de la civilisation europộenne et avec un prolộtariat infiniment plus dộveloppộ que l'Angleterre au XVIIe et la France au XVIIIe siốcle, et que, par consộquent, la rộvolution bourgeoise allemande ne saurait ờtre que le prộlude immộdiat d'une rộvolution prolộtarienne.
    En somme, les communistes appuient en tous pays tout mouvement rộvolutionnaire contre l'ordre social et politique existant.
    Dans tous ces mouvements, ils mettent en avant la question de la propriộtộ, ? quelque degrộ d'ộvolution qu'elle ait pu arriver, comme la question fondamentale du mouvement.
    Enfin, les communistes travaillent ? l'union et ? l'entente des partis dộmocratiques de tous les pays.
    Les communistes ne s'abaissent pas ? dissimuler leurs opinions et leurs projets. Ils proclament ouvertement que leurs buts ne peuvent ờtre atteints que par le renversement violent de tout l'ordre social passộ. Que les classes dirigeantes tremblent ? l'idộe d'une rộvolution communiste ! Les prolộtaires n'y ont rien ? perdre que leurs chaợnes. Ils ont un monde ? y gagner.
    PROLETAIRES DE TOUS LES PAYS, UNISSEZ-VểU
  3. Odetta

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    27/08/2001
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    Bonne Aniversaire, Vi?t Nam .

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