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Odes et Ballades - Victor Hugo

Chủ đề trong 'Pháp (Club de Francais)' bởi Angelique, 23/11/2001.

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  1. Angelique

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    LE POETE DANS LES REVOLUTIONS

    à M. Alexandre Soumet

    Mourir sans vider mon carquois !
    Sans percer, sans fouler, sans pétrir dans leur fange
    Ces bourreaux barbouilleurs de lois !
    ANDRÉ CHÉNIER, Iambes.

    " Le vent chasse loin des campagnes
    Le gland tombé des rameaux verts ;
    Chêne, il le bat sur les montagnes ;
    Esquif, il le bat sur les mers.
    Jeune homme, ainsi le sort nous presse.
    Ne joins pas, dans ta folle ivresse,
    Les maux du monde à tes malheurs ;
    Gardons, coupables et victimes,
    Nos remords pour nos propres crimes,
    Nos pleurs pour nos propres douleurs ! "

    Quoi ! mes chants sont-ils téméraires ?
    Faut-il donc, en ces jours d'effroi,
    Rester sourd aux cris de ses frères !
    Ne souffrir jamais que pour soi ?
    Non, le poète sur la terre
    Console, exilé volontaire,
    Les tristes humains dans leurs fers ;
    Parmi les peuples en délire,
    Il s'élance, armé de sa lyre,
    Comme Orphée au sein des enfers !

    " Orphée aux peines éternelles
    Vint un moment ravir les morts ;
    Toi, sur les têtes criminelles,
    Tu chantes l'hymne du remords.
    Insensé ! quel orgueil t'entraîne ?
    De quel droit viens-tu dans l'arène
    Juger sans avoir combattu ?
    Censeur échappé de l'enfance,
    Laisse vieillir ton innocence,
    Avant de croire à ta vertu ! "

    Quand le crime, Python perfide,
    Brave, impuni, le frein des lois,
    La Muse devient l'Euménide,
    Apollon saisit son carquois !
    Je cède au Dieu qui me rassure ;
    J'ignore à ma vie encor pure
    Quels maux le sort veut attacher ;
    Je suis sans orgueil mon étoile ;
    L'orage déchire la voile :
    La voile sauve le nocher.

    " Les hommes vont aux précipices !
    Tes chants ne les sauveront pas.
    Avec eux, loin des cieux propices,
    Pourquoi donc égarer tes pas ?
    Peux-tu, dès tes jeunes années,
    Sans briser d'autres destinées,
    Rompre la chaîne de tes jours ?
    Epargne ta vie éphémère ;
    Jeune homme, n'as-tu pas de mère ?
    Poète, n'as-tu pas d'amours ? "

    Eh bien ! à mes terrestres flammes,
    Si je meurs, les cieux vont s'ouvrir.
    L'amour chaste agran*** les âmes,
    Et qui sait aimer sait mourir.
    Le Poète, en des temps de crime,
    Fidèle aux justes qu'on opprime,
    Célèbre, imite les héros ;
    Il a, jaloux de leur martyre,
    Pour les victimes une lyre,
    Une tête pour les bourreaux !

    " On *** que jadis le Poète,
    Chantant des jours encor lointains,
    Savait à la terre inquiète
    Révéler ses futurs destins.
    Mais toi, que peux-tu pour le monde ?
    Tu partages sa nuit profonde ;
    Le ciel se voile et veut punir ;
    Les lyres n'ont plus de prophète,
    Et la Muse, aveugle et muette,
    Ne sait plus rien de l'avenir ! "

    Le mortel qu'un Dieu même anime
    Marche à l'avenir, plein d'ardeur ;
    C'est en s'élançant dans l'abîme
    Qu'il en sonde la profondeur.
    Il se prépare au sacrifice ;
    Il sait que le bonheur du vice
    Par l'innocent est expié ;
    Prophète à son jour mortuaire,
    La prison est son sanctuaire,
    Et l'échafaud est son trépied !

    " Que n'es-tu né sur les rivages
    Des Abbas et des Cosroës,
    Aux rayons d'un ciel sans nuages,
    Parmi le myrte et l'aloès !
    Là, sourd aux maux que tu déplores,
    Le poète voit ses aurores
    Se lever sans trouble et sans pleurs ;
    Et la colonne, chère aux sages,
    Porte aux vierges ses doux messages
    Où l'amour parle avec des fleurs ! "

    Qu'un autre au céleste martyre
    Préfère un repos sans honneur !
    La gloire est le but où j'aspire ;
    On n'y va point par le bonheur.
    L'alcyon, quand l'Océan gronde,
    Craint que les vents ne troublent l'onde
    Où se berce son doux sommeil ;
    Mais pour l'aiglon, fils des orages,
    Ce n'est qu'à travers les nuages
    Qu'il prend son vol vers le soleil !
  2. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    LA VENDÉE
    à M. le vicomte de Chateaubriand
    Ave, Cæsar, morituri te salutant.
    I
    " Qui de nous, en posant une urne cinéraire,
    N'a trouvé quelque ami pleurant sur un cercueil ?
    Autour du froid tombeau d'une épouse ou d'un frère,
    Qui de nous n'a mené le deuil ? "
    - Ainsi sur les malheurs de la France éplorée
    Gémissait la Muse sacrée
    Qui nous montra le ciel ouvert,
    Dans ces chants où, planant sur Rome et sur Palmyre,
    Sublime, elle annonçait les douceurs du martyre
    Et l'humble bonheur du désert !
    Depuis, à nos tyrans rappelant tous leurs crimes,
    Et vouant aux remords ces coeurs sans repentirs,
    Elle a ***: " En ces temps la France eut des victimes ;
    Mais la Vendée eut des martyrs ! "
    - Déplorable Vendée, a-t-on séché tes larmes ?
    Marches-tu, ceinte de tes armes,
    Au premier rang de nos guerriers ?
    Si l'Honneur, si la Foi n'est pas un vain fantôme,
    Montre-moi quels palais ont remplacé le chaume
    De tes rustiques chevaliers !
    Hélas ! tu te souviens des jours de ta misère !
    Des flots de sang baignaient tes sillons dévastés,
    Et le pied des coursiers n'y foulait de poussière
    Que la cendre de tes cités.
    Ceux-là qui n'avaient pu te vaincre avec l'épée
    Semblaient, dans leur rage trompée,
    Implorer l'enfer pour appui
    Et, roulant sur la plaine en torrents de fumée,
    Le vaste embrasement poursuivait ton armée,
    Qui ne fuyait que devant lui !
    II
    La Loire vit alors, sur ses plages désertes,
    S'assembler les tribus des vengeurs de nos rois,
    Peuple qui ne pleurait, fier de ses nobles pertes,
    Que sur le Trône et sur la Croix.
    C'étaient quelques vieillards fuyant leurs toits en flammes,
    C'étaient des enfants et des femmes,
    Suivis d'un reste de héros ;
    Au milieu d'eux marchait leur Patrie exilée,
    Car ils ne laissaient plus qu'une terre peuplée
    De cadavres et de bourreaux.
    On *** qu'en ce moment, dans un divin délire,
    Un vieux prêtre parut parmi ces fiers soldats,
    Comme un saint, chargé d'ans, qui parle du martyre
    Aux nobles anges des combats ;
    Tranquille, en proclamant de sinistres présages,
    Les souvenirs des anciens âges
    S'éveillaient dans son coeur glacé ;
    Et, racontant le sort qu'ils devaient tous attendre,
    La voix de l'avenir semblait se faire entendre
    Dans ses discours pleins du passé.
    III
    " Au-delà du Jourdain, après quarante années,
    Dieu promit une terre aux enfants d'Israël ;
    Au-delà de ces flots, après quelques journées,
    Le Seigneur vous promet le ciel.
    Ces bords ne verront plus vos phalanges errantes.
    Dieu, sur des plaines dévorantes,
    Vous prépare un tombeau lointain ;
    Votre astre doit s'éteindre, à peine à son aurore ;
    Mais Samson expirant peut ébranler encore
    Les colonnes du Philistin !
    " Vos guerriers périront. Mais, toujours invincibles,
    S'ils ne peuvent punir, ils sauront se venger ;
    Car ils verront encor fuir ces soldats terribles,
    Devant qui fuyait l'étranger !
    Vous ne mourrez pas tous sous des bras intrépides ;
    Les uns, sur des nefs homicides,
    Seront jetés aux flots mourants ;
    Ceux-là promèneront des os sans sépulture,
    Et cacheront leurs morts sous une terre obscure,
    Pour les dérober aux vivants !
    " Et vous, Ô jeune Chef, ravi par la victoire
    Aux hasards de Mortagne, aux périls de Saumur,
    L'honneur de vous frapper dans un combat sans gloire
    Rendra célèbre un bras obscur.
    Il ne sera donné qu'à bien peu de nos frères
    De revoir, après tant de guerres,
    La place où furent leurs foyers ;
    Alors, ornant son toit de ses armes oisives,
    Chacun d'eux attendra que Dieu donne à nos rives
    Les lys, qu'il préfère aux lauriers.
    " Vendée, Ô noble terre ! Ô ma triste patrie !
    Tu dois payer bien cher le retour de tes rois !
    Avant que sur nos bords croisse la fleur chérie,
    Ton sang l'arrosera deux fois.
    Mais aussi, lorsqu'un jour l'Europe réunie
    De l'arbre de la tyrannie
    Aura brisé les rejetons,
    Tous les rois vanteront leurs camps, leur flotte immense,
    Et, seul, le Roi Chrétien mettra dans la balance
    L'humble glaive des vieux Bretons !
    " Grand Dieu ! - Si toutefois, après ces jours d'ivresse,
    Blessant le coeur aigri du héros oublié,
    Une voix insultante offrait à sa détresse
    Les dons ingrats de la pitié ;
    Si sa mère, et sa veuve, et sa fille, éplorées,
    S'arrêtaient, de faim dévorées,
    Au seuil d'un favori puissant,
    Rappelant à celui qu'implore leur misère,
    Qu'elles n'ont plus ce fils, cet époux et ce père
    Qui croyait leur léguer son sang ;
    " Si, pauvre et délaissé, le citoyen fidèle,
    Lorsqu'un traître enrichi se rirait de sa foi,
    Entendait au sénat calomnier son zèle
    Par celui qui jugea son roi ;
    Si, pour comble d'affronts, un magistrat injuste,
    Déguisant sous un nom auguste
    L'abus d'un insolent pouvoir,
    Venait, de vils soupçons chargeant sa noble tête,
    Lui demander ce fer, sa première conquête, -
    Peut-être son dernier espoir ;
    " Qu'il se résigne alors. - Par ses crimes prospères
    L'impie heureux insulte au fidèle souffrant ;
    Mais que le juste pense aux forfaits de nos pères,
    Et qu'il songe à son Dieu mourant.
    Le Seigneur veut parfois le triomphe du vice,
    Il veut aussi, dans sa justice
    Que l'innocent verse des pleurs ;
    Souvent, dans ses desseins, Dieu suit d'étranges voies,
    Lui qui livre Satan aux infernales joies,
    Et Marie aux saintes douleurs ! "
    IV
    Le vieillard s'arrêta. Sans croire à son langage,
    Ils quittèrent ces bords, pour n'y plus revenir ;
    Et tous croyaient couvert des ténèbres de l'âge
    L'esprit qui voyait l'avenir ! -
    Ainsi, faible en soldats, mais fort en renommée,
    Ce débris d'une illustre armée
    Suivait sa bannière en lambeaux ;
    Et ces derniers Français, que rien ne put défendre,
    Loin de leur temple en deuil et de leur chaume en cendre,
    Allaient conquérir des tombeaux !
  3. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    LES VIERGES DE VERDUN
    Le prêtre portera l'étole blanche et noire
    Lorsque les saints flambeaux pour vous s'allumeront ;
    Et, de leurs longs cheveux voilant leurs fronts d'ivoire,
    Les jeunes filles pleureront.
    A. GUIRAUD.
    I
    Pourquoi m'apportez-vous ma lyre,
    Spectres légers ? - que voulez-vous ?
    Fantastiques beautés, ce lugubre sourire
    M'annonce-t-il votre courroux ?
    Sur vos écharpes éclatantes
    Pourquoi flotte à longs plis ce crêpe menaçant ?
    Pourquoi sur des festons ces chaînes insultantes,
    Et ces roses, teintes de sang ?
    Retirez-vous : rentrez dans les sombres abîmes...
    Ah ! que me montrez-vous ?... quels sont ces trois tombeaux ?
    Quel est ce char affreux, surchargé de victimes ?
    Quels sont ces meurtriers, couverts d'impurs lambeaux ?
    J'entends des chants de mort, j'entends des cris de fête.
    Cachez-moi le char qui s'arrête !...
    Un fer lentement tombe à mes regards troublés ; -
    J'ai vu couler du sang... Est-il bien vrai, parlez,
    Qu'il ait rejailli sur ma tête ?
    Venez-vous dans mon âme éveiller le remord ?
    Ce sang... je n'en suis point coupable !
    Fuyez, vierges ; fuyez, famille déplorable...
    Lorsque vous n'étiez plus, je n'étais pas encor !
    Qu'exigez-vous de moi ? J'ai pleuré vos misères ;
    Dois-je donc expier les crimes de mes pères ?
    Pourquoi troublez-vous mon repos ?
    Pourquoi m'apportez-vous ma lyre frémissante ?
    Demandez-vous des chants à ma voix innocente,
    Et des remords à vos bourreaux ?
    II
    Sous des murs entourés de cohortes sanglantes,
    Siège le sombre tribunal.
    L'accusateur se lève, et ses lèvres tremblantes
    S'agitent d'un rire infernal.
    C'est Tinville : on le voit, au nom de la patrie,
    Convier aux forfaits cette horde flétrie
    D'assassins, juges à leur tour ;
    Le besoin du sang le tourmente ;
    Et sa voix homicide à la hache fumante
    Désigne les têtes du jour.
    Il parle : - ses licteurs vers l'enceinte fatale
    Traînent les malheureux que sa fureur signale ;
    Les portes devant eux s'ouvrent avec fracas ;
    Et trois vierges, de grâce et de pudeur parées,
    De leurs compagnes entourées,
    Paraissent parmi les soldats.
    Le peuple, qui se tait, frémit de son silence ;
    Il plaint son esclavage en plaignant leurs malheurs,
    Et repose sur l'innocence
    Ses regards las du crime et troublés par ses pleurs.
    Eh quoi ! quand ces beautés, lâchement accusées,
    Vers ces juges de mort s'avançaient dans les fers,
    Ces murs n'ont pas, croulant sous leurs voûtes brisées,
    Rendu les monstres aux enfers !
    Que faisaient nos guerriers ?... Leur vaillance trompée
    Prêtait au vil couteau le secours de l'épée ;
    Ils sauvaient ces bourreaux qui souillaient leurs combats.
    Hélas ! un même jour, jour d'opprobre et de gloire,
    Voyait Moreau monter au char de la victoire.
    Et son père au char du trépas !
    Quand nos chefs, entourés des armes étrangères,
    Couvrant nos cyprès de lauriers,
    Vers Paris lentement reportaient leurs bannières,
    Frédéric sur Verdun dirigeait ses guerriers.
    Verdun, premier rempart de la France opprimée,
    D'un roi libérateur crut saluer l'armée.
    En vain tonnaient d'horribles lois ;
    Verdun se revêtit de sa robe de fête,
    Et, libre de ses fers, vint offrir sa conquête
    Au monarque vengeur des rois.
    Alors, Vierges, vos mains (ce fut là votre crime !)
    Des festons de la joie ornèrent les vainqueurs.
    Ah ! pareilles à la victime,
    La hache à vos regards se cachait sous des fleurs.
    Ce n'est pas tout ; hélas ! sans chercher la vengeance,
    Quand nos bannis, bravant la mort et l'indigence,
    Combattaient nos tyrans encor mal affermis,
    Vos nobles coeurs ont plaint de si nobles misères ;
    Votre or a secouru ceux qui furent nos frères
    Et n'étaient pas nos ennemis !
    Quoi ! ce trait glorieux, qui trahit leur belle âme,
    Sera donc l'arrêt de leur mort !
    Mais non, l'Accusateur, que leur aspect enflamme,
    Tressaille d'un honteux transport.
    Il veut, Vierges, au prix d'un affreux sacrifice,
    En taisant vos bienfaits, vous ravir au supplice ;
    Il croit vos chastes coeurs par la crainte abattus.
    Du mépris qui le couvre acceptez le partage,
    Souillez-vous d'un forfait, l'infâme aréopage
    Vous absoudra de vos vertus !
    Répondez-moi, Vierges timides ;
    Qui, d'un si noble orgueil arma ces yeux si doux ?
    ***es, qui fit rouler dans vos regards humides
    Les pleurs généreux du courroux ?
    Je le vois à votre courage :
    Quand l'oppresseur qui vous outrage
    N'eût pas offert la honte en offrant son bienfait,
    Coupables de pitié pour des Français fidèles,
    Vous n'auriez pas voulu, devant des lois cruelles,
    Nier un si noble forfait !
    C'en est donc fait ; déjà sous la lugubre enceinte
    A retenti l'arrêt dicté par la fureur.
    Dans un muet murmure, étouffé par la crainte,
    Le peuple, qui l'écoute, exhale son horreur.
    Regagnez des cachots les sinistres demeures,
    Ô Vierges ! encor quelques heures...
    Ah ! priez sans effroi, votre âme est sans remord.
    Coupez ces longues chevelures,
    Où la main d'une mère enlaçait des fleurs pures,
    Sans voir qu'elle y mêlait les pavots de la mort !
    Bientôt ces fleurs encor pareront votre tête ;
    Les anges vous rendront ces symboles touchants ;
    Votre hymne de trépas sera l'hymne de fête
    Que les Vierges du ciel rediront dans leurs chants.
    Vous verrez près de vous, dans ces choeurs d'innocence,
    Charlotte, autre Ju***h, qui vous vengea d'avance ;
    Cazotte ; Elisabeth, si malheureuse en vain ;
    Et Sombreuil, qui trahit par ses pâleurs soudaines
    Le sang glacé des morts circulant dans ses veines ;
    Martyres, dont l'encens plaît au Martyr divin !
    III
    Ici, devant mes yeux erraient des lueurs sombres
    Des visions troublaient mes sens épouvantés ;
    Les Spectres sur mon front balançaient dans les ombres
    De longs linceuls ensanglantés.
    Les trois tombeaux, le char, les échafauds funèbres,
    M'apparurent dans les ténèbres ;
    Tout rentra dans la nuit des siècles révolus ;
    Les vierges avaient fui vers la naissante aurore ;
    Je me retrouvai seul, et je pleurais encore
    Quand ma lyre ne chantait plus !
  4. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    QUIBERON
    Pudor inde et miseratio. TACITE.
    I
    Par ses propres fureurs le Mau*** se dévoile,
    Dans le Démon vainqueur on voit l'ange proscrit ;
    L'anathème éternel, qui poursuit son étoile,
    Dans ses succès même est écrit.
    Il est, lorsque des cieux nous oublions la voie,
    Des jours, que Dieu sans doute envoie
    Pour nous rappeler les enfers ;
    Jours sanglants qui, voués au triomphe du crime,
    Comme d'affreux rayons échappés de l'abîme,
    Apparaissent sur l'univers.
    Poètes qui toujours, loin du siècle où nous sommes,
    Chantres des pleurs sans fin et des maux mérités,
    Cherchez des attentats tels que la voix des hommes
    N'en ait point encor racontés,
    Si quelqu'un vient à vous vantant la jeune France,
    Nos exploits, notre tolérance,
    Et nos temps féconds en bienfaits,
    Soyez contents ; lisez nos récentes histoires,
    Evoquez nos vertus, interrogez nos gloires :
    Vous pourrez choisir des forfaits !
    Moi, je n'ai point reçu de la Muse funèbre
    Votre lyre de bronze, Ô chantres des remords !
    Mais je voudrais flétrir les bourreaux qu'on célèbre,
    Et venger la cause des morts.
    Je voudrais, un moment, troublant l'impur Génie,
    Arrêter sa gloire impunie
    Qu'on pousse à l'immortalité ;
    Comme autrefois un grec, malgré les vents rapides,
    Seul, retint de ses bras, de ses dents intrépides,
    L'esquif sur les mers emporté !
    II
    Quiberon vit jadis, sur son bord solitaire,
    Des Français assaillis s'apprêter à mourir,
    Puis, devant les deux chefs, l'airain fumant se taire,
    Et les rangs désarmés s'ouvrir.
    Pour sauver ses soldats l'un d'eux offrit sa tête ;
    L'autre accepta cette conquête,
    De leur traité gage inhumain ;
    Et nul guerrier ne crut sa promesse frivole,
    Car devant les drapeaux, témoins de leur parole,
    Tous deux s'étaient donné la main !
    La phalange fidèle alors livra ses armes.
    Ils marchaient ; une armée environnait leurs pas,
    Et le peuple accourait, en répandant des larmes,
    Voir ces preux, sauvés du trépas.
    Ils foulaient en vaincus les champs de leurs ancêtres ;
    Ce fut un vieux temple, sans prêtres,
    Qui reçut ces vengeurs des rois ;
    Mais l'humble autel manquait à la pieuse enceinte,
    Et, pour se consoler, dans cette prison sainte,
    Leurs yeux en vain cherchaient la croix.
    Tous prièrent ensemble, et, d'une voix plaintive,
    Tous, se frappant le sein, gémirent à genoux.
    Un seul ne pleurait pas dans la tribu captive :
    C'était lui qui mourait pour tous ;
    C'était Sombreuil, leur chef ; jeune et plein d'espérance,
    L'heure de son trépas s'avance ;
    Il la salue avec ferveur.
    Le supplice, entouré des apprêts funéraires,
    Est beau pour un chrétien qui, seul, va pour ses frères
    Expirer, semblable au Sauveur.
    " Oh ! cessez, disait-il, ces larmes, ces reproches,
    Guerriers ; votre salut prévient tant de douleurs !
    Combien à votre mort vos amis et vos proches,
    Hélas ! auraient versé de pleurs !
    Je romps avec vos fers mes chaînes éphémères ;
    À vos épouses, à vos mères,
    Conservez vos jours précieux.
    On vous rendra la paix, la liberté, la vie ;
    Tout ce bonheur n'a rien que mon coeur vous envie ;
    Vous, ne m'enviez pas les cieux. "
    Le sinistre tambour sonna l'heure dernière,
    Les bourreaux étaient prêts ; on vit Sombreuil partir.
    La soeur ne fut point là pour leur ravir le frère, -
    Et le héros devint martyr.
    L'exhortant de la voix et de son saint exemple,
    Un évêque, exilé du temple,
    Le suivit au funeste lieu ;
    Afin que le vainqueur vît, dans son camp rebelle,
    Mourir, près d'un soldat à son prince fidèle,
    Un prêtre fidèle à son Dieu !
    III
    Vous pour qui s'est versé le sang expiatoire,
    Bénissez le Seigneur, louez l'heureux Sombreuil ;
    Celui qui monte au ciel, brillant de tant de gloire,
    N'a pas besoin de chants de deuil !
    Bannis, on va vous rendre enfin une patrie ;
    Captifs, la liberté chérie
    Se montre à vous dans l'avenir.
    Oui, de vos longs malheurs chantez la fin prochaine ;
    Vos prisons vont s'ouvrir, on brise votre chaîne ;
    Chantez ! votre exil va finir.
    En effet, - des cachots la porte à grand bruit roule,
    Un étendard paraît, qui flotte ensanglanté ;
    Des chefs et des soldats l'environnent en foule,
    En invoquant la Liberté !
    " Quoi ! disaient les captifs, déjà l'on nous délivre !... "
    Quelques-uns s'empressent de suivre
    Les bourreaux devenus meilleurs.
    " Adieu, leur criait-on, adieu, plus de souffrance ;
    Nous nous reverrons tous, libres, dans notre France ! "
    Ils devaient se revoir ailleurs.
    Bientôt, jusqu'aux prisons des captifs en prières,
    Arrive un sourd fracas, par l'échÔ répété :
    C'étaient leurs fiers vainqueurs qui délivraient leurs frères,
    Et qui remplissaient leur traité !
    Sans troubler les proscrits, ce bruit vint les surprendre ;
    Aucun d'eux ne savait comprendre
    Qu'on pût se jouer des serments ;
    Ils disaient aux soldats : " Votre foi nous protège ; "
    Et, pour toute réponse, un lugubre cortège
    Les traîna sur des corps fumants !
    Le jour fit place à l'ombre et la nuit à l'aurore,
    Hélas ! et, pour mourir traversant la cité,
    Les crédules proscrits passaient, passaient encore,
    Aux yeux du peuple épouvanté !
    Chacun d'eux racontait, brûlant d'un saint délire,
    À ses compagnons de martyre
    Les malheurs qu'il avait soufferts ;
    Tous succombaient sans peur, sans faste, sans murmure,
    Regrettant seulement qu'il fallût un parjure,
    Pour les immoler dans les fers.
    À coups multipliés la hache abat les chênes.
    Le vil chasseur, dans l'antre ignoré du soleil,
    Égorge lentement le lion dont ses chaînes
    Ont surpris le noble sommeil.
    On massacra longtemps la tribu sans défense.
    À leur mort assistait la France,
    Jouet des bourreaux triomphants ;
    Comme jadis, aux pieds des idoles impures,
    Tour à tour, une veuve, en de longues tortures,
    Vit expirer ses sept enfants.
    C'étaient là les vertus d'un Sénat qu'on nous vante !
    Le sombre Esprit du mal sourit en le créant ;
    Mais ce corps aux cent bras, fort de notre épouvante,
    En son sein portait son néant.
    Le colosse de fer s'est dissous dans la fange.
    L'Anarchie, alors que tout change,
    Pense voir ses oeuvres durer ;
    Mais ce Pygmalion, dans ses travaux frivoles,
    Ne peut donner la vie aux horribles idoles
    Qu'il se fait pour les adorer.
    IV
    On *** que, de nos jours, viennent, versant des larmes,
    Prier au champ fatal où ces preux sont tombés,
    Les vierges, les soldats fiers de leurs jeunes armes,
    Et les vieillards lents et courbés.
    Du ciel sur les bourreaux appelant l'indulgence,
    Là, nul n'implore la vengeance,
    Tous demandent le repentir ;
    Et chez ces vieux Bretons, témoins de tant de crimes,
    Le pèlerin, qui vient invoquer les victimes,
    Souvent lui-même est un martyr !
  5. Angelique

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    LOUIS XVII
    Capet, éveille-toi !
    I
    En ce temps-là, du ciel les portes d'or s'ouvrirent ;
    Du Saint des Saints ému les feux se découvrirent ;
    Tous les cieux un moment brillèrent dévoilés ;
    Et les élus voyaient, lumineuses phalanges,
    Venir une jeune âme entre de jeunes anges
    Sous les portiques étoilés.
    C'était un bel enfant qui fuyait de la terre ; -
    Son oeil bleu du malheur portait le signe austère ;
    Ses blonds cheveux flottaient sur ses traits pâlissants ;
    Et les vierges du ciel, avec des chants de fête,
    Aux palmes du Martyre unissaient sur sa tête
    La couronne des innocents.
    II
    On enten*** des voix qui disaient dans la nue :
    -- " Jeune ange, Dieu sourit à ta gloire ingénue ;
    Viens, rentre dans ses bras pour ne plus en sortir ;
    Et vous, qui du Très-Haut racontez les louanges,
    Séraphins, prophètes, archanges,
    Courbez-vous, c'est un Roi ; chantez, c'est un Martyr ! "
    -- " Où donc ai-je régné ? demandait la jeune ombre.
    Je suis un prisonnier, je ne suis point un roi.
    Hier je m'endormis au fond d'une tour sombre.
    Où donc ai-je régné ? Seigneur, ***es-le moi.
    Hélas ! mon père est mort d'une mort bien amère ;
    Ses bourreaux, Ô mon Dieu, m'ont abreuvé de fiel ;
    Je suis un orphelin ; je viens chercher ma mère,
    Qu'en mes rêves j'ai vue au ciel. "
    Les anges répondaient : -- " Ton Sauveur te réclame.
    Ton Dieu d'un monde impie a rappelé ton âme.
    Fuis la terre insensée où l'on brise la Croix,
    Où jusque dans la mort descend le Régicide,
    Où le Meurtre, d'horreurs avide,
    Fouille dans les tombeaux pour y chercher des rois ! "
    -- " Quoi ! de ma lente vie ai-je achevé le reste ?
    Disait-il ; tous mes maux, les ai-je enfin soufferts ?
    Est-il vrai qu'un geôlier, de ce rêve céleste,
    Ne viendra pas demain m'éveiller dans mes fers ?
    Captif, de mes tourments cherchant la fin prochaine,
    J'ai prié ; Dieu veut-il enfin me secourir ?
    Oh ! n'est-ce pas un songe ? a-t-il brisé ma chaîne ?
    Ai-je eu le bonheur de mourir ?
    " Car vous ne savez point quelle était ma misère !
    Chaque jour dans ma vie amenait des malheurs ;
    Et, lorsque je pleurais, je n'avais pas de mère
    Pour chanter à mes cris, pour sourire à mes pleurs.
    D'un châtiment sans fin languissante victime,
    De ma tige arraché comme un tendre arbrisseau,
    J'étais proscrit bien jeune, et j'ignorais quel crime
    J'avais commis dans mon berceau.
    " Et pourtant, écoutez : bien loin dans ma mémoire,
    J'ai d'heureux souvenirs avant ces temps d'effroi ;
    J'entendais en dormant des bruits confus de gloire,
    Et des peuples joyeux veillaient autour de moi.
    Un jour tout disparut dans un sombre mystère ;
    Je vis fuir l'avenir à mes destins promis ;
    Je n'étais qu'un enfant, faible et seul sur la terre,
    Hélas ! et j'eus des ennemis !
    " Ils m'ont jeté vivant sous des murs funéraires ;
    Mes yeux voués aux pleurs n'ont plus vu le soleil ;
    Mais vous que je retrouve, anges du ciel, mes frères,
    Vous m'avez visité souvent dans mon sommeil.
    Mes jours se sont flétris dans leurs mains meurtrières,
    Seigneur, mais les méchants sont toujours malheureux ;
    Oh ! ne soyez pas sourd comme eux à mes prières,
    Car je viens vous prier pour eux. "
    Et les anges chantaient : -- "L'arche à toi se dévoile,
    Suis-nous ; sur ton beau front nous mettrons une étoile.
    Prends les ailes d'azur des chérubins vermeils ;
    Tu viendras avec nous bercer l'enfant qui pleure,
    Ou, dans leur brûlante demeure,
    D'un souffle lumineux rajeunir les soleils ! "
    III
    Soudain le choeur cessa, les élus écoutèrent ;
    Il baissa son regard par les larmes terni ;
    Au fond des cieux muets les mondes s'arrêtèrent,
    Et l'éternelle voix parla dans l'infini :
    " Ô roi ! je t'ai gardé loin des grandeurs humaines.
    Tu t'es réfugié du trône dans les chaînes.
    Va, mon fils, bénis tes revers.
    Tu n'as point su des rois l'esclavage suprême,
    Ton front du moins n'est pas meurtri du diadème,
    Si tes bras sont meurtris de fers.
    " Enfant, tu t'es courbé sous le poids de la vie ;
    Et la terre, pourtant, d'espérance et d'envie
    Avait entouré ton berceau !
    Viens, ton Seigneur lui-même eut ses douleurs divines,
    Et mon Fils, comme toi, Roi couronné d'épines,
    Porta le sceptre de roseau ! "
  6. Angelique

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    LE RÉTABLISSEMENT DE LA STATUE DE HENRI IV
    Accingunt omnes operi, pedibusque rotarum Subjiciunt lapsus, et stupea vincula collo Intendunt... Pueri circum innuptæque puellæ Sacra canunt, funemque manu contingere gaudent ! VIRGILE.
    I
    Je voyais s'élever, dans le lointain des âges,
    Ces monuments, espoir de cent rois glorieux ;
    Puis je voyais crouler les fragiles images
    De ces fragiles demi-dieux.
    Alexandre, un pêcheur des rives du Pirée
    Foule ta statue ignorée,
    Sur le pavé du Parthénon ;
    Et les premiers rayons de la naissante aurore
    En vain dans le désert interrogent encore
    Les muets débris de Memnon.
    Ont-ils donc prétendu, dans leur esprit superbe,
    Qu'un bronze inanimé dût les rendre immortels ?
    Demain le temps peut-être aura caché sous l'herbe
    Leurs imaginaires autels.
    Le proscrit à son tour peut remplacer l'idole ;
    Des piédestaux du Capitole
    Sylla détrône Marius.
    Aux outrages du sort insensé qui s'oppose !
    Le sage, de l'affront dont frémit Théodose,
    Sourit avec Démétrius.
    D'un héros toutefois l'image auguste et chère
    Hérite du respect qui payait ses vertus ;
    Trajan domine encor les champs que de Tibère
    Couvrent les temples abattus.
    Souvent, lorsqu'en l'horreur des discordes civiles,
    La terreur planait sur les villes,
    Aux cris des peuples révoltés,
    Un héros, respirant dans le marbre immobile,
    Arrêtait tout à coup par son regard tranquille
    Les factieux épouvantés !
    II
    Eh quoi ! sont-ils donc loin, ces jours de notre histoire
    Où Paris sur son prince osa lever son bras ?
    Où l'aspect de Henri, ses vertus, sa mémoire,
    N'ont pu désarmer des ingrats ?
    Que dis-je ? ils ont détruit sa statue adorée.
    Hélas ! cette horde égarée
    Mutilait l'airain renversé ;
    Et cependant, des morts souillant le saint asile,
    Leur sacrilège main demandait à l'argile
    L'empreinte de son front glacé.
    Voulaient-ils donc jouir d'un portrait plus fidèle
    Du héros dont leur haine a payé les bienfaits ?
    Voulaient-ils, réprouvant leur fureur criminelle,
    Le rendre à nos yeux satisfaits ?
    Non ; mais c'était trop peu de briser son image ;
    Ils venaient encor, dans leur rage,
    Briser son cercueil outragé ;
    Tel, troublant le désert d'un rugissement sombre,
    Le tigre, en se jouant, cherche à dévorer l'ombre
    Du cadavre qu'il a rongé.
    Assis près de la Seine, en mes douleurs amères,
    Je me disais : " La Seine arrose encore Ivry,
    Et les flots sont passés où, du temps de nos pères,
    Se peignaient les traits de Henri.
    Nous ne verrons jamais l'image vénérée
    D'un roi qu'à la France éplorée
    Enleva sitôt le trépas ;
    Sans saluer Henri nous irons aux batailles,
    Et l'étranger viendra chercher dans nos murailles
    Un héros qu'il n'y verra pas ! "
    III
    Où courez-vous ? - Quel bruit naît, s'élève et s'avance ?
    Qui porte ces drapeaux, signe heureux de nos rois ?
    Dieu ! quelle masse au loin semble, en sa marche immense,
    Broyer la terre sous son poids ?
    Répondez... Ciel ! c'est lui ! je vois sa noble tête...
    Le peuple, fier de sa conquête,
    Répète en choeur son nom chéri.
    Ô ma lyre ! tais-toi dans la publique ivresse ;
    Que seraient tes concerts près des chants d'allégresse
    De la France aux pieds de Henri ?
    Par mille bras traîné, le lourd colosse roule.
    Ah ! volons, joignons-nous à ces efforts pieux.
    Qu'importe si mon bras est perdu dans la foule !
    Henri me voit du haut des cieux.
    Tout un peuple a voué ce bronze à ta mémoire,
    Ô chevalier, rival en gloire
    Des Bayard et des Duguesclin !
    De l'amour des français reçois la noble preuve,
    Nous devons ta statue au denier de la veuve,
    À l'obole de l'orphelin.
    N'en doutez pas, l'aspect de cette image auguste
    Rendra nos maux moins grands ; notre bonheur plus doux ;
    Ô Français ! louez Dieu, vous voyez un roi juste,
    Un Français de plus parmi vous.
    Désormais, dans ses yeux, en volant à la gloire,
    Nous viendrons puiser la victoire ;
    Henri recevra notre foi ;
    Et quand on parlera de ses vertus si chères,
    Nos enfants n'iront pas demander à nos pères
    Comment souriait le bon Roi !
    IV
    Jeunes amis, dansez autour de cette enceinte ;
    Mêlez vos pas joyeux, mêlez vos heureux chants.
    Henri, car sa bonté dans ses traits est empreinte,
    Bénira vos transports touchants.
    Près des vains monuments que des tyrans s'élèvent,
    Qu'après de longs siècles achèvent
    Les travaux d'un peuple opprimé,
    Qu'il est beau, cet airain où d'un roi tutélaire
    La France aime à revoir le geste populaire
    Et le regard accoutumé !
    Que le fier conquérant de la Perse avilie,
    Las de léguer ses traits à de frêles métaux,
    Menace, dans l'accès de sa vaste folie,
    D'imposer sa forme à l'Athos ;
    Qu'un Pharaon cruel, superbe en sa démence,
    Couvre d'un obélisque immense
    Le grand néant de son cercueil ;
    Son nom meurt, et bientôt l'ombre des Pyramides
    Pour l'étranger, perdu dans ces plaines arides,
    Est le seul bienfait de l'orgueil !
    Un jour (mais repoussons tout présage funeste !)
    Si des ans ou du sort les coups encor vainqueurs
    Brisaient de notre amour le monument modeste,
    Henri, tu vivrais dans nos coeurs ;
    Cependant que du Nil les montagnes altières,
    Cachant cent royales poussières,
    Du monde inutile fardeau,
    Du temps et de la mort attestent le passage,
    Et ne sont déjà plus, à l'oeil ému du sage,
    Que la ruine d'un tombeau.
  7. Angelique

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    LA MORT DU DUC DE BERRY
    Le Meurtre, d'une main violente, brise les liens les plus sacrés ; la Mort vient enlever le jeune homme florissant, et le Malheur s'approche comme un ennemi rusé au milieu des jours de fête. SCHILLER.
    I
    Modérons les transports d'une ivresse insensée ;
    Le passage est bien court de la joie aux douleurs ;
    La mort aime à poser sa main lourde et glacée
    Sur des fronts couronnés de fleurs.
    Demain, souillés de cendre, humbles, courbant nos têtes,
    Le vain souvenir de nos fêtes
    Sera pour nous presque un remords ;
    Nos jeux seront suivis des pompes sépulcrales ;
    Car chez nous, malheureux ! l'hymne des Saturnales
    Sert de prélude au chant des Morts.
    II
    Fuis les banquets, fais trêve à ton joyeux délire,
    Paris, triste cité ! détourne tes regards
    Vers le cirque où l'on voit aux accords de la lyre
    S'unir les prestiges des arts.
    Choeurs, interrompez-vous ; cessez, danses légères ;
    Qu'on change en torches funéraires
    Ces feux purs, ces brillants flambeaux ; -
    Dans cette enceinte, auprès d'une couche sanglante,
    J'entends un prêtre saint dont la voix chancelante
    *** la prière des tombeaux !
    Sous ces lambris, frappés des éclats de la joie,
    Près d'un lit où soupire un mourant étendu,
    D'une famille auguste, au désespoir en proie,
    Je vois le cortège éperdu.
    C'est un père à genoux, c'est un frère en alarmes,
    Une soeur qui n'a point de larmes
    Pour calmer ses sombres douleurs ;
    Car ses affreux revers ont, dès son plus jeune âge,
    Dans ses yeux, enflammés d'un si mâle courage,
    Tari la source de ses pleurs.
    Sur l'échafaud, aux cris d'un sénat sanguinaire,
    Sa mère est morte en reine et son père en héros ;
    Elle a vu dans les fers périr son jeune frère,
    Et n'a pu trouver des bourreaux.
    Et, quand des rois ligués la main brisa ses chaînes,
    Longtemps, sur des rives lointaines,
    Elle a fui nos bords désolés ;
    Elle a revu la France, après tant de misères,
    Pour apprendre, en rentrant au palais de ses pères,
    Que ses maux n'étaient pas comblés !
    Plus loin, c'est une épouse... Oh ! qui peindra ses craintes,
    Sa force, ses doux soins, son amour assidu ?
    Hélas ! et qui dira ses lamentables plaintes,
    Quand tout espoir sera perdu ?
    Quels étaient nos transports, ô vierge de Sicile,
    Quand naguère à ta main docile
    Berry joignit sa noble main !
    Devais-tu donc, princesse, en touchant ce rivage,
    Voir sitôt succéder le crêpe du veuvage
    Au chaste voile de l'hymen ?
    Berry, quand nous vantions ta paisible conquête,
    Nos chants ont réveillé le dragon endormi ;
    L'Anarchie en grondant a relevé sa tête,
    Et l'enfer même en a frémi.
    Elle a rugi ; soudain, du milieu des ténèbres,
    Clément poussa des cris funèbres,
    Ravaillac agita ses fers ;
    Et le monstre, étendant ses deux ailes livides,
    Aux applaudissements des ombres régicides,
    S'envola du fond des enfers !
    Le démon, vers nos bords tournant son vol funeste,
    Voulut, brisant ces lys qu'il flétrit tant de fois,
    Épuiser d'un seul coup le déplorable reste
    D'un sang, trop fertile en bons rois.
    Longtemps le sbire obscur qu'il arma pour son crime,
    Rêveur, autour de la victime
    Promena ses affreux loisirs ;
    Enfin le ciel permet que son voeu s'accomplisse ;
    Pleurons tous, car le meurtre a choisi pour complice
    Le tumulte de nos plaisirs !
    Le fer brille... un cri part : guerriers, volez aux armes !
    C'en est fait ; la duchesse accourt en pâlissant ;
    Son bras soutient Berry, qu'elle arrose de larmes,
    Et qui l'inonde de son sang.
    Dressez un lit funèbre : est-il quelque espérance ?...
    Hélas ! un lugubre silence
    A condamné son triste époux.
    Assistez-le, madame, en ce moment horrible ;
    Les soins cruels de l'art le rendront plus terrible,
    Les vôtres le rendront plus doux.
    Monarque en cheveux blancs, hâte-toi, le temps presse ;
    Un Bourbon va rentrer au sein de ses aïeux ;
    Viens, accours vers ce fils, l'espoir de ta vieillesse ;
    Car ta main doit fermer ses yeux !
    Il a béni sa fille, à son amour ravie ;
    Puis, des vanités de sa vie
    Il proclame un noble abandon ;
    Vivant, il pardonna ses maux à la patrie ;
    Et son dernier soupir, digne du Dieu qu'il prie,
    Est encore un cri de pardon.
    Mort sublime ! ô regrets ! vois sa grande âme, et pleure,
    Porte au ciel tes clameurs, ô peuple désolé.
    Tu l'as trop peu connu ; c'est à sa dernière heure
    Que le héros s'est révélé.
    Pour consoler la veuve, apportez l'orpheline ;
    Donnez sa fille à Caroline,
    La nature encore a ses droits,
    Mais, quand périt l'espoir d'une tige féconde,
    Qui pourra consoler, dans sa terreur profonde,
    La France, veuve de ses rois ?
    À l'horrible récit, quels cris expiatoires
    Vont pousser nos guerriers, fameux par leur valeur !
    L'Europe, qu'ébranlait le bruit de leurs victoires,
    Va retentir de leur douleur.
    Mais toi, que diras-tu, chère et noble Vendée ?
    Si longtemps de sang inondée,
    Tes regrets seront superflus ;
    Et tu seras semblable à la mère accablée,
    Qui s'assied sur sa couche et pleure inconsolée,
    Parce que son enfant n'est plus !
    Bientôt vers Saint-Denis, désertant nos murailles,
    Au bruit sourd des clairons, peuple, prêtres, soldats,
    Nous suivrons à pas lents le char des funérailles,
    Entouré des chars des combats.
    Hélas ! jadis souillé par des mains téméraires,
    Saint-Denis, où dormaient ses pères,
    A vu déjà bien des forfaits ;
    Du moins, puisse, à l'abri des complots parricides,
    Sous ces murs profanés, parmi ces tombes vides,
    Sa cendre reposer en paix !
    III
    D'Enghien s'étonnera, dans les célestes sphères,
    De voir sitôt l'ami, cher à ses jeunes ans,
    À qui le vieux Condé, prêt à quitter nos terres,
    Léguait ses devoirs bienfaisants.
    À l'aspect de Berry, leur dernière espérance,
    Des rois que révère la France
    Les ombres frémiront d'effroi ;
    Deux héros gémiront sur leurs races éteintes,
    Et le vainqueur d' Ivry viendra mêler ses plaintes
    Aux pleurs du vainqueur de Rocroy.
    Ainsi, Bourbon, au bruit du forfait sanguinaire,
    On te vit vers d'Artois accourir désolé ;
    Car tu savais les maux que laisse au coeur d'un père
    Un fils avant l'âge immolé.
    Mais bientôt, chancelant dans ta marche incertaine,
    L'affreux souvenir de Vincenne
    Vint s'offrir à tes sens glacés ;
    Tu pâlis ; et d'Artois, dans la douleur commune,
    Sembla presque oublier sa récente infortune,
    Pour plaindre tes revers passés.
    Et toi, veuve éplorée, au milieu de l'orage
    Attends des jours plus doux, espère un sort meilleur ;
    Prends ta soeur pour modèle, et puisse ton courage
    Être aussi grand que ton malheur !
    Tu porteras comme elle une urne funéraire ;
    Comme elle, au sein du sanctuaire,
    Tu gémiras sur un cercueil ;
    L'Hydre des factions, qui, par des morts célèbres,
    A marqué pour ta soeur tant d'époques funèbres,
    Te fait aussi ton jour de deuil !
    IV
    Pourtant, ô frêle appui de la tige royale,
    Si Dieu par ton secours signale son pouvoir,
    Tu peux sauver la France, et de l'Hydre infernale
    Tromper encor l'affreux espoir.
    Ainsi, quand le Serpent, auteur de tous les crimes,
    Vouait d'avance aux noirs abîmes
    L'homme que son forfait per***,
    Le Seigneur abaissa sa farouche arrogance ;
    Une femme apparut, qui, faible et sans défense,
    Brisa du pied son front mau*** !
  8. Angelique

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    LA NAISSANCE DU DUC DE BORDEAUX
    Le ciel ... prodigue en leur faveur les miracles. La postérité de Joseph rentre dans la terre de Gessen ; et cette conquête, due aux larmes des vainqueurs, ne coûte pas une larme aux vaincus. CHATEAUBRIAND, Martyrs.
    I
    Savez-vous, voyageur, pourquoi, dissipant l'ombre,
    D'innombrables clartés brillent dans la nuit sombre ?
    Quelle immense vapeur rougit les cieux couverts ?
    Et pourquoi mille cris, frappant la nue ardente,
    Dans la ville, au loin rayonnante,
    Comme un concert confus, s'élèvent dans les airs ?
    II
    Ô joie ! ô triomphe ! ô mystère !
    Il est né, l'Enfant glorieux,
    L'Ange que promit à la terre
    Un Martyr partant pour les cieux !
    L'avenir voilé se révèle.
    Salut à la flamme nouvelle
    Qui ranime l'ancien flambeau !
    Honneur à ta première aurore,
    Ô jeune lys qui viens d'éclore,
    Tendre fleur qui sors d'un tombeau !
    C'est Dieu qui l'a donné, le Dieu de la prière :
    La cloche, balancée aux tours du sanctuaire,
    Comme aux jours du repos, y rappelle nos pas.
    C'est Dieu qui l'a donné, le Dieu de la victoire ! -
    Chez les vieux martyrs de la gloire
    Les canons ont tonné, comme au jour des combats.
    Ce bruit, si cher à ton oreille,
    Joint aux voix des temples bénis,
    N'a-t-il donc rien qui te réveille,
    Ô toi qui dors à Saint-Denis ?
    Lève-toi ! Henri doit te plaire
    Au sein du berceau populaire ;
    Accours ! ô père triomphant !
    Enivre sa lèvre trompée,
    Et viens voir si ta grande épée
    Pèse aux mains du royal enfant.
    Hélas ! il est absent, il est au sein des justes.
    Sans doute, en ce moment, de ses aïeux augustes
    Le cortège vers lui s'avance consolé :
    Car il ren***, mourant sous des coups parricides,
    Un héros à leurs tombes vides,
    Une race de rois à leur trône isolé.
    Parmi tous ces nobles fantômes,
    Qu'il élève un front couronné,
    Qu'il soit fier dans les saints royaumes,
    Le père du roi nouveau-né !
    Une race longue et sublime
    Sort de l'immortelle victime ;
    Tel un fleuve mystérieux,
    Fils d'un mont frappé du tonnerre,
    De son cours fécondant la terre,
    Cache sa source dans les cieux !
    Honneur au rejeton qui deviendra la tige !
    Henri, nouveau Joas, sauvé par un prodige,
    À l'ombre de l'autel croîtra vainqueur du sort ;
    Un jour, de ses vertus notre France embellie,
    À ses soeurs, comme Cornélie,
    Dira : Voilà mon fils, c'est mon plus beau trésor.
    III
    Ô toi, de ma pitié profonde
    Reçois l'hommage solennel,
    Humble objet des regards du monde
    Privé du regard paternel !
    Puisses-tu, né dans la souffrance,
    Et de ta mère et de la France
    Consoler la longue douleur !
    Que le bras divin t'environne,
    Et puisse, ô Bourbon ! la couronne
    Pour toi ne pas être un malheur !
    Oui, souris, orphelin, aux larmes de ta mère !
    Écarte, en te jouant, ce crêpe funéraire
    Qui voile ton berceau des couleurs du cercueil ;
    Chasse le noir passé qui nous attriste encore ;
    Sois à nos yeux comme une aurore !
    Rends le jour et la joie à notre ciel en deuil.
    Ivre d'espoir, ton roi lui-même,
    Consacrant le jour où tu nais,
    T'impose, avant le saint baptême,
    Le baptême du Béarnais.
    La Veuve t'offre à l'Orpheline ;
    Vers toi, conduit par l'Héroïne,
    Vient ton Aïeul en cheveux blancs ;
    Et la foule, bruyante et fière,
    Se presse à ce Louvre, où naguère,
    Muette, elle entrait à pas lents.
    Guerriers, peuple, chantez ; Bordeaux, lève ta tête,
    Cité qui, la première, aux jours de la conquête,
    Rendue aux fleurs de lys, as proclamé ta foi.
    Et toi, que le martyr aux combats eût guidée,
    Sors de ta douleur, ô Vendée !
    Un roi naît pour la France, un soldat naît pour toi.
    IV
    Rattachez la nef à la rive :
    La Veuve reste parmi nous,
    Et de sa patrie adoptive
    Le ciel lui semble enfin plus doux.
    L'espoir à la France l'enchaîne ;
    Aux champs où fut frappé le chêne
    Dieu fait croître un frêle roseau.
    L'amour retient l'humble colombe ;
    Il faut prier sur une tombe,
    Il faut veiller sur un berceau.
    Dis, qu'irais-tu chercher au lieu qui te vit naître,
    Princesse ? Parthénope outrage son vieux maître :
    L'étranger, qu'attiraient des bords exempts d'hivers,
    Voit Palerme en fureur, voit Messine en alarmes,
    Et, plaignant la Sicile en armes,
    De ce funèbre Éden fuit les sanglantes mers !
    Mais que les deux Volcans s'éveillent !
    Que le souffle du Dieu jaloux
    Des sombres géants qui sommeillent
    Rallume enfin l'ardent courroux ;
    Devant les flots brûlants des laves,
    Que seront ces hautains esclaves,
    Ces chefs d'un jour, ces grands soldats ?
    Courage ! ô vous, vainqueurs sublimes ! -
    Tandis que vous marchez aux crimes,
    La terre tremble sous vos pas !
    Reste au sein des français, ô fille de Sicile !
    Ne fuis pas, pour des bords d'où le bonheur s'exile,
    Une terre où le lys se relève immortel ;
    Où du peuple et des rois l'union salutaire
    N'est point cet hymen adultère
    Du trône et des partis, des camps et de l'autel.
    V
    Nous, ne craignons plus les tempêtes !
    Bravons l'horizon menaçant :
    Les forfaits qui chargeaient nos têtes
    Sont rachetés par l'innocent !
    Quand les nochers, dans la tourmente,
    Jadis voyaient l'onde écumante
    Entrouvrir leur frêle vaisseau,
    Sûrs de la clémence éternelle,
    Pour sauver la nef criminelle
    Ils y suspendaient un berceau.
  9. Angelique

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    LE BAPTÊME DU DUC DE BORDEAUX
    Sinite parvulos venire ad me. - Venerunt reges. ÉVANGILE.
    I
    " Oh ! disaient les peuples du monde,
    Les derniers temps sont-ils venus ?
    Nos pas, dans une nuit profonde,
    Suivent des chemins inconnus.
    Où va-t-on ? dans la nuit perfide,
    Quel est ce fanal qui nous guide,
    Tous courbés sous un bras de fer ?
    Est-il propice ? est-il funeste ?
    Est-ce la colonne céleste ?
    Est-ce une flamme de l'enfer ?
    " Les tribus des chefs se divisent ;
    Les troupeaux chassent les pasteurs ;
    Et les sceptres des rois se brisent
    Devant les faisceaux des préteurs.
    Les trônes tombent ; l'autel croule ;
    Les factions naissent en foule
    Sur les bords des deux Océans ;
    Et les ambitions serviles,
    Qui dormaient comme des reptiles,
    Se lèvent comme des géants.
    " Ah ! malheur ! nous avons fait gloire,
    Hélas ! d'attentats inouïs,
    Tels qu'en cherche en vain la mémoire
    Dans les siècles évanouis.
    Malheur ! tous nos forfaits l'appellent,
    Tous les signes nous le révèlent,
    Le jour des arrêts solennels.
    L'homme est digne enfin des abîmes ;
    Et rien ne manque à ses longs crimes
    Que les châtiments éternels. "
    Le Très-Haut a pris leur défense,
    Lorsqu'ils craignaient son abandon ;
    L'homme peut épuiser l'offense,
    Dieu n'épuise pas le pardon.
    Il mène au repentir l'impie ;
    Lui-même, pour nous, il expie
    L'oubli des lois qu'il nous donna ;
    Pour lui seul il reste sévère ;
    C'est la Victime du Calvaire
    Qui fléchit le Dieu du Sina !
    II
    Par un autre berceau sa main nous sauve encore !
    Le monde du bonheur n'ose entrevoir l'aurore,
    Quoique Dieu des méchants ait puni les défis,
    Et, troublant leurs conseils, dispersant leurs phalanges,
    Nous ait donné l'un de ses Anges,
    Comme aux antiques jours il nous donna son Fils.
    Tel, lorsqu'il sort vivant du gouffre de ténèbres,
    Le Prophète voit fuir les visions funèbres !
    La terre est sous ses pas, le jour luit à ses yeux ;
    Mais lui, tout ébloui de la flamme éternelle,
    Longtemps à sa vue infidèle
    La lueur de l'enfer voile l'éclat des cieux.
    Peuples, ne doutez pas ! chantez votre victoire.
    Un sauveur naît, vêtu de puissance et de gloire ;
    Il réunit le glaive et le sceptre en faisceau ;
    Des leçons du malheur naîtront nos jours prospères,
    Car de soixante Rois, ses pères,
    Les ombres sans cercueils veillent sur son berceau !
    Son nom seul a calmé nos tempêtes civiles ;
    Ainsi qu'un bouclier il a couvert les villes.
    La révolte et la haine ont déserté nos murs.
    Tel du jeune lion, qui lui-même s'ignore,
    Le premier cri, paisible encore,
    Fait de l'antre royal fuir cent monstres impurs.
    III
    Quel est cet Enfant débile
    Qu'on porte aux sacrés parvis ?
    Toute une foule immobile
    Le suit de ses yeux ravis ;
    Son front est nu, ses mains tremblent,
    Ses pieds, que des noeuds rassemblent,
    N'ont point commencé de pas ;
    La faiblesse encor l'enchaîne ;
    Son regard ne voit qu'à peine
    Et sa voix ne parle pas.
    C'est un Roi parmi les hommes ;
    En entrant dans le saint lieu,
    Il devient ce que nous sommes ;
    C'est un homme aux pieds de Dieu.
    Cet enfant est notre joie ;
    Dieu pour sauveur nous l'envoie ;
    Sa loi l'abaisse aujourd'hui.
    Les Rois, qu'arme son tonnerre,
    Sont tout par lui sur la terre,
    Et ne sont rien devant lui.
    Que tout tremble et s'humilie.
    L'orgueil mortel parle en vain ;
    Le Lion royal se plie
    Au joug de l'Agneau divin.
    Le Père, entouré d'étoiles,
    Vers l'Enfant, faible et sans voiles,
    Descend, sur les vents porté ;
    L'Esprit-Saint de feux l'inonde ;
    Il n'est encor né qu'au monde,
    Qu'il naisse à l'éternité !
    Marie, aux rayons modestes,
    Heureuse et priant toujours,
    Guide les Vierges célestes
    Vers son vieux temple aux deux tours.
    Toutes les saintes Armées,
    Parmi les soleils semées,
    Suivent son char triomphant ;
    La Charité les devance,
    La Foi brille, et l'Espérance
    S'assied près de l'humble Enfant !
    IV
    Jourdain ! te souvient-il de ce qu'ont vu tes rives ?
    Naguère un pèlerin près de tes eaux captives
    Vint s'asseoir et pleura, pareil en sa ferveur
    À ces Preux qui jadis, terrible et saint cortège,
    Ravirent au joug sacrilège
    Ton onde baptismale et le tombeau sauveur !
    Ce chrétien avait vu, dans la France usurpée,
    Trône, autel, chartes, lois, tomber sous une épée,
    Les vertus sans honneur, les forfaits impunis ;
    Et lui, des vieux, croisés cherchait l'ombre sublime,
    Et, s'exilant près de Solime,
    Aux lieux où Dieu mourut pleurait ses Rois bannis !
    L'eau du saint fleuve emplit sa gourde voyageuse ;
    Il partit ; il revit notre rive orageuse,
    Ignorant quel bonheur attendait son retour,
    Et qu'à l'enfant des rois, du fond de l'Arabie,
    Il apportait, nouveau Tobie,
    Le remède divin qui rend l'aveugle au jour.
    Qu'il soit fier dans ses flots, le fleuve des prophètes !
    Peuples, l'eau du salut est présente à nos fêtes ;
    Le ciel sur cet Enfant a placé sa faveur ;
    Qu'il reçoive les eaux que reçut Dieu lui-même ;
    Et qu'à l'onde de son baptême,
    Le monde rassuré reconnaisse un Sauveur !
    À vous, comme à Clovis, prince, Dieu se révèle.
    Soyez du temple saint la colonne nouvelle.
    Votre âme en vain du lys enlace la blancheur ;
    Quittez l'orgueil du rang, l'orgueil de l'innocence ;
    Dieu vous offre, dans sa puissance,
    La piscine du pauvre et la croix du pécheur.
    V
    L'Enfant, quand du Seigneur sur lui brille l'aurore,
    Ignore le martyre et sourit à la croix ;
    Mais un autre baptême, hélas ! attend encore
    Le front infortuné des Rois. -
    Des jours viendront, jeune homme, où ton âme troublée,
    Du fardeau d'un peuple accablée,
    Frémira d'un effroi pieux,
    Quand l'évêque sur toi répandra l'huile austère,
    Formidable présent qu'aux maîtres de la terre
    La colombe apporta des cieux.
    Alors, ô Roi chrétien ! au Seigneur sois semblable ;
    Sache être grand par toi, comme il est grand par lui ;
    Car le sceptre devient un fardeau redoutable
    Dès qu'on veut s'en faire un appui.
    Un vrai Roi sur sa tête unit toutes les gloires ;
    Et si, dans ses justes victoires,
    Par la mort il est arrêté,
    Il voit, comme Bayard, une croix dans son glaive,
    Et ne fait, quand le ciel à la terre l'enlève,
    Que changer d'immortalité !
    À LA MUSE
    Je vais, ô Muse ! où tu m'envoies !
    Je ne sais que verser des pleurs ;
    Mais qu'il soit fidèle à leurs joies,
    Ce luth fidèle à leurs douleurs !
    Ma voix, dans leur récente histoire,
    N'a point, sur des tons de victoire,
    Appris à louer le Seigneur.
    Ô Rois, victimes couronnées !
    Lorsqu'on chante vos destinées,
    On sait mal chanter le bonheur.
  10. Angelique

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    VISION
    à M. le comte Gaspard de Pons
    7. Quia defecimus in irâ tuâ, et in furore tuÔ turbati sumus ;
    8. Posuisti iniquitates nostras in conspectu tuo, sæculum nostrum in illuminatione vultus tui ;
    9. Quoniam omnes dies nostri defecerunt, et in ira tuâ defecimus. PSAUME LXXXIX.
    Parce que nous sommes tombés dans votre colère, et que nous avons été troublés dans votre fureur ;
    Vous avez placé nos iniquités en votre présence, et notre siècle dans la lumière de votre face ;
    Puisque tous nos jours ont failli, et que nous sommes tombés dans votre colère !
    Voici ce qu'ont *** les Prophètes,
    Aux jours où ces hommes pieux
    Voyaient en songe sur leurs têtes
    L'Esprit-Saint descendre des cieux :
    " Dès qu'un siècle, éteint pour le monde,
    Redescend dans la nuit profonde,
    De gloire ou de honte chargé,
    Il va répondre et comparaître
    Devant le Dieu qui le fit naître,
    Seul juge qui n'est pas jugé. "
    Or écoutez, fils de la terre,
    Vil peuple à la tombe appelé,
    Ce qu'en un rêve solitaire
    La vision m'a révélé. -
    C'était dans la cité flottante,
    De joie et de gloire éclatante,
    Où le jour n'a pas de soleil,
    D'où sortit la première aurore,
    Et d'où résonneront encore
    Les clairons du dernier réveil !
    Adorant l'Essence inconnue,
    Les Saints, les Martyrs glorieux
    Contemplaient, sous l'ardente nue,
    Le Triangle mystérieux !
    Près du trône où dort le tonnerre
    Parut un Spectre centenaire
    Par l'Ange des Français conduit ;
    Et l'Ange, vêtu d'un long voile,
    Était pareil à l'humble étoile
    Qui mène au ciel la sombre nuit.
    Dans les cieux et dans les abîmes
    Une Voix alors s'enten***,
    Qui, jusque parmi ses victimes,
    Fit trembler l'Archange mau***.
    Le char des Séraphins fidèles,
    Semé d'yeux, brillant d'étincelles,
    S'arrêta sur son triple essieu ;
    Et la roue, aux flammes bruyantes,
    Et les quatre ailes tournoyantes
    Se turent au souffle de Dieu.
    LA VOIX
    Déjà du Livre séculaire
    La page a dix-sept fois tourné ;
    Le gouffre attend que ma colère
    Te pardonne ou t'ait condamné !
    Approche : - je tiens la balance :
    Te voilà nu dans ma présence,
    Siècle innocent ou criminel.
    Faut-il que ton souvenir meure ?
    Réponds : un siècle est comme une heure
    Devant mon regard éternel.
    LE SIÈCLE
    J'ai, dans mes pensers magnanimes
    Tout divisé, tout réuni ;
    J'ai soumis à mes lois sublimes
    Et l'Immuable et l'Infini ;
    J'ai pesé tes volontés mêmes...
    LA VOIX
    Fantôme, arrête ! tes blasphèmes
    Troublent mes Saints d'un juste effroi ;
    Sors de ton orgueilleuse ivresse ;
    Doute aujourd'hui de ta sagesse ;
    Car tu ne peux douter de moi.
    Fier de tes aveugles sciences,
    N'as-tu pas ri, dans tes clameurs,
    Et de mon être et des croyances
    Qui gardent les lois et les moeurs ?
    De la mort souillant le mystère,
    N'as-tu pas effrayé la terre
    D'un crime aux humains inconnu ?
    Des Rois, avant les temps célestes,
    N'as-tu pas réveillé les restes ?
    LE SIÈCLE
    Ô Dieu ! votre jour est venu !
    LA VOIX
    Pleure, ô Siècle ! D'abord timide,
    L'erreur gran*** comme un géant ;
    L'athée invite au régicide ;
    Le chaos est fils du néant.
    J'aimais une terre lointaine ;
    Un Roi bon, une belle Reine,
    Conduisaient son peuple joyeux,
    Je bénissais leurs jours augustes
    Réponds, qu'as-tu fait de ces justes ?
    LE SIÈCLE
    Seigneur, je les vois dans vos cieux.
    LA VOIX
    Oui, l'épouvante enfin t'éclaire !
    C'est moi qui marque leur séjour
    Aux réprouvés de ma colère,
    Comme aux élus de mon amour.
    Qu'un rayon tombe de ma face,
    Soudain tout s'anime ou s'efface,
    Tout naît ou retourne au tombeau.
    Mon souffle, propice ou terrible,
    Allume l'incendie horrible,
    Comme il éteint le pur flambeau !
    Que l'oubli muet te dévore !
    LE SIÈCLE
    Seigneur, votre bras s'est levé ;
    Seigneur, le mau*** vous implore !
    LA VOIX
    Non ; tais-toi, Siècle réprouvé !
    LE SIÈCLE
    Eh bien donc ! l'Âge qui va naître
    Absoudra mes forfaits peut-être
    Par des forfaits plus odieux ! "
    Ici gémit l'humble Espérance,
    Et le bel Ange de la France
    De son aile voila ses yeux.
    LA VOIX
    Va, ma main t'ouvre les abîmes ;
    Un siècle nouveau prend l'essor,
    Mais, loin de t'absoudre, ses crimes,
    Mau*** ! t'accuseront encor. "
    Et, comme l'ouragan qui gronde
    Chasse à grand bruit jusque sur l'onde
    Le flocon vers les mers jeté ;
    Longtemps la Voix inexorable
    Poursuit le Siècle coupable,
    Qui tombait dans l'Éternité.

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