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Odes et Ballades - Victor Hugo

Chủ đề trong 'Pháp (Club de Francais)' bởi Angelique, 23/11/2001.

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  1. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    LE DERNIER CHANT
    Ô muse, qui daignas me soutenir dans une carrière aussi longue que périlleuse, retourne maintenant aux célestes demeures !... Adieu ! consolatrice de mes jours, toi qui partageas mes plaisirs, et bien plus souvent mes douleurs ! CHATEAUBRIAND, les Martyrs.
    Et toi, dépose aussi la lyre !
    Qu'importe le Dieu qui t'inspire
    À ces mortels vains et grossiers ?
    On en rit quand ta main l'encense.
    Brise donc ce luth sans puissance !
    Descends de ce char sans coursiers !
    - Oh ! qu'il est saint et pur le transport du poète,
    Quand il voit en espoir, bravant la mort muette,
    Du voyage des temps sa gloire revenir !
    Sur les âges futurs, de sa hauteur sublime
    Il se penche, écoutant son lointain souvenir ;
    Et son nom, comme un poids jeté dans un abîme,
    Éveille mille échos au fond de l'avenir.
    Je n'ai point cette auguste joie,
    Les siècles ne sont point ma proie ;
    La gloire ne *** pas mon rang.
    Ma muse, en l'orage qui gronde,
    Est tombée au courant du monde,
    Comme un lys aux flots d'un torrent.
    Pourtant, ma douce muse est innocente et belle.
    L'astre de Bethléem a des regards pour elle :
    J'ai suivi l'humble étoile, aux rois pasteurs pareil.
    Le Seigneur m'a donné le don de sa parole,
    Car son peuple l'oublie en un lâche sommeil ;
    Et, soit que mon luth pleure, ou menace, ou console,
    Mes chants volent à Dieu, comme l'aigle au soleil.
    Mon âme à sa source embrasée
    Monte de pensée en pensée ;
    Ainsi du ruisseau précieux
    Où l'Arabe altéré s'abreuve,
    La goutte d'eau passe au grand fleuve,
    Du fleuve aux mers, des mers aux cieux.
    Mais, ô fleurs sans parfums, foyers sans étincelles,
    Hommes ! l'air parmi vous manque à mes larges ailes.
    Votre monde est borné, votre souffle est mortel !
    Les lyres sont pour vous comme des voix vulgaires.
    Je m'enivre d'absinthe : enivrez-vous de miel.
    Bien : - aimez vos amours et guerroyez vos guerres,
    Vous, dont l'oeil mort se ferme à tout rayon du ciel !
    Sans éveiller d'écho sonore
    J'ai haussé ma voix faible encore ;
    Et ma lyre aux fibres d'acier
    A passé sur ces âmes viles,
    Comme sur le pavé des villes
    L'ongle résonnant du coursier.
    En vain j'ai fait gronder la vengeance éternelle ;
    En vain j'ai, pour fléchir leur âme criminelle,
    Fait parler le pardon par la voix des douleurs.
    Du haut des cieux tonnants, mon austère pensée,
    Sur cette terre ingrate où germent les malheurs,
    Tombant, pluie orageuse ou propice rosée,
    N'a point flétri l'ivraie et fécondé des fleurs.
    Du tombeau tout franchit la porte.
    L'homme, hélas ! que le temps emporte,
    En vain contre lui se débat.
    Rien de Dieu ne trompe l'attente ;
    Et la vie est comme une tente
    Où l'on dort avant le combat.
    Voilà, tristes mortels, ce que leur âme oublie !
    L'urne des ans pour tous n'est pas toujours remplie.
    Mais qu'ils passent en paix sous le ciel outragé !
    Qu'ils jouissent des jours dans leurs frêles demeures !
    Quand dans l'éternité leur sort sera plongé,
    Les insensés en vain s'attacheront aux heures,
    Comme aux débris épars d'un vaisseau submergé.
    Adieu donc ce luth qui soupire !
    Muse, ici tu n'as plus d'empire,
    Ô muse, aux concerts immortels !
    Fuis la foule qui te contemple ;
    Referme les voiles du temple ;
    Rends leur ombre aux chastes autels.
    Je vous rapporte, ô Dieu ! le rameau d'espérance. -
    Voici le divin glaive et la céleste lance :
    J'ai mal atteint le but où j'étais envoyé.
    Souvent, des vents jaloux jouet involontaire,
    L'aiglon suspend son vol, à peine déployé ;
    Souvent, d'un trait de feu cherchant en vain la terre,
    L'éclair remonte au ciel sans avoir foudroyé.
  2. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    À M. ALPHONSE DE L.
    Or, sachant ces choses, nous venons enseigner aux hommes la crainte de Dieu. II COR., V.
    I
    Pourtant je m'étais *** : " Abritons mon navire.
    Ne livrons plus ma voile au vent qui la déchire.
    Cachons ce luth. Mes chants peut-être auraient vécu !...
    Soyons comme un soldat qui revient sans murmure
    Suspendre à son chevet un vain reste d'armure,
    Et s'endort, vainqueur ou vaincu ! "
    Je ne demandais plus à la muse que j'aime
    Qu'un seul chant pour ma mort, solennel et suprême !
    Le Poète avec joie au tombeau doit s'offrir ;
    S'il ne souriait pas au moment où l'on pleure,
    Chacun lui dirait : " Voici l'heure !
    Pourquoi ne pas chanter, puisque tu vas mourir ? "
    C'est que la mort n'est pas ce que la foule en pense !
    C'est l'instant où notre âme obtient sa récompense,
    Où le fils exilé rentre au sein paternel.
    Quand nous penchons près d'elle une oreille inquiète,
    La voix du trépassé, que nous croyons muette,
    A commencé l'hymne éternel !
    II
    Plus tôt que je n'ai dû, je reviens dans la lice ;
    Mais tu le veux, ami ! ta muse est ma complice ;
    Ton bras m'a réveillé ; c'est toi qui m'as *** : " Va !
    Dans la mêlée encor jetons ensemble un gage.
    De plus en plus elle s'engage.
    Marchons, et confessons le nom de Jéhova ! "
    J'unis donc à tes chants quelques chants téméraires.
    Prends ton luth immortel : nous combattrons en frères
    Pour les mêmes autels et les mêmes foyers.
    Montés au même char, comme un couple homérique,
    Nous tiendrons, pour lutter dans l'arène lyrique,
    Toi la lance, moi les coursiers.
    Puis, pour faire une part à la faiblesse humaine,
    Je ne sais quelle pente au combat me ramène.
    J'ai besoin de revoir ce que j'ai combattu,
    De jeter sur l'impie un dernier anathème,
    De te dire, à toi, que je t'aime,
    Et de chanter encore un hymne à la vertu !
    III
    Ah ! nous ne sommes plus au temps où le poète
    Parlait au ciel en prêtre, à la terre en prophète !
    Que Moïse, Isaïe, apparaisse en nos champs,
    Les peuples qu'ils viendront juger, punir, absoudre,
    Dans leurs yeux pleins d'éclairs méconnaîtront la foudre
    Qui tonne en éclats dans leurs chants.
    Vainement ils iront s'écriant dans les villes :
    " Plus de rébellions ! plus de guerres civiles !
    Aux autels du Veau-d'Or pourquoi danser toujours ?
    Dagon va s'écrouler ; Baal va disparaître.
    Le Seigneur a *** à son prêtre :
    " Pour faire pénitence ils n'ont que peu de jours ! "
    " Rois, peuples, couvrez-vous d'un sac souillé de cendre !
    Bientôt sur la nuée un juge doit descendre.
    Vous dormez ! que vos yeux daignent enfin s'ouvrir.
    Tyr appartient aux flots, Gomorrhe à l'incendie.
    Secouez le sommeil de votre âme engourdie,
    Et réveillez-vous pour mourir !
    " Ah ! malheur au puissant qui s'enivre en des fêtes,
    Riant de l'opprimé qui pleure, et des prophètes !
    Ainsi que Balthazar, ignorant ses malheurs,
    Il ne voit pas aux murs de la salle bruyante
    Les mots qu'une main flamboyante
    Trace en lettres de feu parmi les noeuds de fleurs !
    " Il sera rejeté comme ce noir Génie,
    Effrayant par sa gloire et par son agonie,
    Qui tomba jeune encor, dont ce siècle est rempli.
    Pourtant Napoléon du monde était le faîte.
    Ses pieds éperonnés des rois pliaient la tête,
    Et leur tête gardait le pli.
    " Malheur donc ! - Malheur même au mendiant qui frappe,
    Hypocrite et jaloux, aux portes du satrape !
    À l'esclave en ses fers ! au maître en son château !
    À qui, voyant marcher l'innocent aux supplices,
    Entre deux meurtriers complices,
    N'étend point sous ses pas son plus riche manteau !
    " Malheur à qui dira : Ma mère est adultère !
    À qui voile un coeur vil sous un langage austère !
    À qui change en blasphème un serment effacé !
    Au flatteur médisant, reptile à deux visages !
    À qui s'annoncera sage entre tous les sages !
    Oui, malheur à cet insensé !
    " Peuples, vous ignorez le Dieu qui vous fit naître !
    Et pourtant vos regards le peuvent reconnaître
    Dans vos biens, dans vos maux, à toute heure, en tout lieu !
    Un Dieu compte vos jours, un Dieu règne en vos fêtes !
    Lorsqu'un chef vous mène aux conquêtes,
    Le bras qui vous entraîne est poussé par un Dieu !
    " À sa voix, en vos temps de folie et de crime,
    Les Révolutions ont ouvert leur abîme.
    Les justes ont versé tout leur sang précieux ;
    Et les peuples, troupeau qui dormait sous le glaive,
    Ont vu, comme Jacob, dans un étrange rêve,
    Des anges remonter aux cieux !
    " Frémissez donc ! Bientôt, annonçant sa venue,
    Le clairon de l'Archange entrouvrira la nue.
    Jour d'éternels tourments ! jour d'éternel bonheur,
    Resplendissant d'éclairs, de rayons, d'auréoles,
    Dieu vous montrera vos idoles,
    Et vous demandera : - Qui donc est le Seigneur ?
    " La trompette, sept fois sonnant dans les nuées,
    Poussera jusqu'à lui, pâles, exténuées,
    Les races, à grands flots se heurtant dans la nuit ;
    Jésus appellera sa mère virginale ;
    Et la porte céleste, et la porte infernale,
    S'ouvriront ensemble avec bruit !
    " Dieu vous dénombrera d'une voix solennelle.
    Les rois se courberont sous le vent de son aile.
    Chacun lui portera son espoir, ses remords.
    Sous les mers, sur les monts, au fond des catacombes,
    À travers le marbre des tombes,
    Son souffle remûra la poussière des morts !
    " Ô siècle ! arrache-toi de tes pensers frivoles.
    L'air va bientôt manquer dans l'espace où tu voles !
    Mortels ! gloire, plaisirs, biens, tout est vanité !
    À quoi pensez-vous donc, vous qui dans vos demeures
    Voulez voir en riant entrer toutes les heures ?...
    L'Éternité ! l'Éternité ! "
    IV
    Nos sages répondront : -- " Que nous veulent ces hommes ?
    Ils ne sont pas du monde et du temps dont nous sommes.
    Ces poètes sont-ils nés au sacré vallon ?
    Où donc est leur Olympe ? où donc est leur Parnasse ?
    Quel est leur Dieu qui nous menace ?
    A-t-il le char de Mars ? A-t-il l'arc d'Apollon ?
    " S'ils veulent emboucher le clairon de Pindare,
    N'ont-ils pas Hiéron, la fille de Tyndare,
    Castor, Pollux, l'Élide et les Jeux des vieux temps ;
    L'arène où l'encens roule en longs flots de fumée,
    La roue aux rayons d'or, de clous d'airain semée,
    Et les quadriges éclatants ?
    " Pourquoi nous effrayer de clartés symboliques ?
    Nous aimons qu'on nous charme en des chants bucoliques,
    Qu'on y fasse lutter Ménalque et Palémon.
    Pour dire l'avenir à notre âme débile,
    On a l'écumante Sibylle,
    Que bat à coups pressés l'aile d'un noir démon.
    " Pourquoi dans nos plaisirs nous suivre comme une ombre ?
    Pourquoi nous dévoiler dans sa nu***é sombre
    L'affreux sépulcre, ouvert devant nos pas tremblants ?
    Anacréon, chargé du poids des ans moroses,
    Pour songer à la mort se comparait aux roses
    Qui mouraient sur ses cheveux blancs.
    " Virgile n'a jamais laissé fuir de sa lyre
    Des vers qu'à Lycoris son Gallus ne pût lire.
    Toujours l'hymne d'Horace au sein des ris est né ;
    Jamais il n'a versé de larmes immortelles :
    La poussière des cascatelles
    Seule a mouillé son luth, de myrtes couronné ! "
    V
    Voilà de quels dédains leurs âmes satisfaites
    Accueilleraient, ami, Dieu même et ses prophètes !
    Et puis, tu les verrais, vainement irrité,
    Continuer, joyeux, quelque festin folâtre,
    Ou pour dormir aux sons d'une lyre idolâtre
    Se tourner de l'autre côté.
    Mais qu'importe ! accomplis ta mission sacrée.
    Chante, juge, bénis ; ta bouche est inspirée !
    Le Seigneur en passant t'a touché de sa main ;
    Et, pareil au rocher qu'avait frappé Moïse,
    Pour la foule au désert assise,
    La poésie en flots s'échappe de ton sein !
    Moi, fussé-je vaincu, j'aimerai ta victoire.
    Tu le sais, pour mon coeur, ami de toute gloire,
    Les triomphes d'autrui ne sont pas un affront.
    Poète, j'eus toujours un chant pour les poètes ;
    Et jamais le laurier qui pare d'autres têtes
    Ne jeta d'ombre sur mon front !
    Souris même à l'envie amère et discordante.
    Elle outrageait Homère, elle attaquait le Dante.
    Sous l'arche triomphale elle insulte au guerrier.
    Il faut bien que ton nom dans ses cris retentisse ;
    Le temps amène la justice :
    Laisse tomber l'orage et grandir ton laurier !
    VI
    Telle est la majesté de tes concerts suprêmes,
    Que tu sembles savoir comment les anges mêmes
    Sur les harpes du ciel laissent errer leurs doigts !
    On dirait que Dieu même, inspirant ton audace,
    Parfois dans le désert t'apparaît face à face,
    Et qu'il te parle avec la voix !
  3. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    À M. DE CHATEAUBRIAND
    On ne tourmente pas les arbres stériles et desséchés ; ceux-là seulement sont battus de pierres dont le front est couronné de fruits d'or. ABENHAMED.
    I
    Il est, Chateaubriand, de glorieux navires
    Qui veulent l'ouragan plutôt que les zéphires.
    Il est des astres, rois des cieux étincelants,
    Mondes volcans jetés parmi les autres mondes,
    Qui volent dans les nuits profondes,
    Le front paré des feux qui dévorent leurs flancs.
    Le génie a partout des symboles sublimes.
    Ses plus chers favoris sont toujours des victimes,
    Et doivent aux revers l'éclat que nous aimons ;
    Une vie éminente est sujette aux orages ;
    La foudre a des éclats, le ciel a des nuages
    Qui ne s'arrêtent qu'aux grands monts !
    Oui, tout grand coeur a droit aux grandes infortunes ;
    Aux âmes que le sort sauve des lois communes
    C'est un tribut d'honneur par la terre payé.
    Le grand homme en souffrant s'élève au rang des justes.
    La gloire en ses trésors augustes
    N'a rien qui soit plus beau qu'un laurier foudroyé !
    II
    Aussi, dans une cour, dis-moi, qu'allais-tu faire ?
    N'es-tu pas, noble enfant d'une orageuse sphère,
    Que nul malheur n'étonne et ne trouve en défaut,
    De ces amis des rois, rares dans les tempêtes,
    Qui, ne sachant flatter qu'au péril de leurs têtes,
    Les courtisent sur l'échafaud ?
    Ce n'est pas lorsqu'un trône a retrouvé le faîte,
    Ce n'est pas dans les temps de puissance et de fête,
    Que la faveur des cours sur de tels fronts descend.
    Il faut l'onde en courroux, l'écueil et la nuit sombre
    Pour que le pilote qui sombre
    Jette au phare sauveur un oeil reconnaissant.
    Va, c'est en vain déjà qu'aux cours de la conquête
    Une main de géant a pesé sur ta tête ;
    Et, chaque fois qu'au gouffre entraînée à grands pas,
    La tremblante patrie errait au gré du crime,
    Elle eut pour s'appuyer au penchant de l'abîme
    Ton front qui ne se courbe pas !
    III
    À ton tour soutenu par la France unanime,
    Laisse donc s'accomplir ton destin magnanime !
    Chacun de tes revers pour ta gloire est compté.
    Quand le sort t'a frappé, tu lui dois rendre grâce,
    Toi qu'on voit à chaque disgrâce
    Tomber plus haut encor que tu n'étais monté !
  4. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    17/04/2001
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    LES FUNÉRAILLES DE LOUIS XVIII
    Ces changements lui sont peu difficiles ; c'est l'oeuvre de la droite du Très-Haut. PS. LXXVI, 10.
    I
    La foule, au seuil d'un temple en priant est venue.
    Mères, enfants, vieillards, gémissent réunis ;
    Et l'airain qu'on balance ébranle dans la nue
    Les hauts clochers de Saint-Denis.
    Le sépulcre est troublé dans ses mornes ténèbres.
    La Mort, de ces couches funèbres,
    Resserre les rangs incomplets.
    Silence au noir séjour que le trépas protège ! -
    Le Roi Chrétien, suivi de son dernier cortège,
    Entre dans son dernier palais.
    II
    Un autre avait *** : " De ma race
    Ce grand tombeau sera le port ;
    Je veux, aux rois que je remplace,
    Succéder jusque dans la mort.
    Ma dépouille ici doit descendre !
    C'est pour faire place à ma cendre
    Qu'on dépeupla ces noirs ****aux.
    Il faut un nouveau maître au monde :
    À ce sépulcre, que je fonde,
    Il faut des ossements nouveaux.
    " Je promets ma poussière à ces voûtes funestes.
    À cet insigne honneur ce temple a seul des droits ;
    Car je veux que le ver qui rongera mes restes
    Ait déjà dévoré des rois.
    Et lorsque mes neveux, dans leur fortune altière,
    Domineront l'Europe entière,
    Du Kremlin à l'Escurial,
    Ils viendront tour à tour dormir dans ces lieux sombres,
    Afin que je sommeille, escorté de leurs ombres,
    Dans mon linceul impérial ! "
    Celui qui disait ces paroles
    Croyait, soldat audacieux,
    Voir, en magnifiques symboles,
    Sa destinée écrite aux cieux.
    Dans ses étreintes foudroyantes,
    Son aigle aux serres flamboyantes
    Eût étouffé l'aigle romain ;
    La Victoire était sa compagne ;
    Et le globe de Charlemagne
    Était trop léger pour sa main.
    Eh bien ! des potentats ce formidable maître
    Dans l'espoir de sa mort par le ciel fut trompé.
    De ses ambitions c'est la seule peut-être
    Dont le but lui soit échappé.
    En vain tout secondait sa marche meurtrière ;
    En vain sa gloire incendiaire
    En tous lieux portait son flambeau ;
    Tout chargé de faisceaux, de sceptres, de couronnes,
    Ce vaste ravisseur d'empires et de trônes
    Ne put usurper un tombeau !
    Tombé sous la main qui châtie,
    L'Europe le fit prisonnier.
    Premier roi de sa dynastie,
    Il en fut aussi le dernier.
    Une île où grondent les tempêtes
    Reçut ce géant des conquêtes,
    Tyran que nul n'osait juger,
    Vieux guerrier qui, dans sa misère,
    Dut l'obole de Bélisaire
    À la pitié de l'étranger.
    Loin du sacré tombeau qu'il s'arrangeait naguère,
    C'est là que, dépouillé du royal appareil,
    Il dort enveloppé de son manteau de guerre,
    Sans compagnon de son sommeil.
    Et, tandis qu'il n'a plus de l'empire du monde
    Qu'un noir rocher battu de l'onde,
    Qu'un vieux saule battu du vent,
    Un roi longtemps banni, qui fit nos jours prospères,
    Descend au lit de mort où reposaient ses pères,
    Sous la garde du Dieu vivant.
    III
    C'est qu'au gré de l'humble qui prie,
    Le Seigneur, qui donne et reprend,
    Rend à l'Exilé sa patrie,
    Livre à l'exil le Conquérant !
    Dieu voulait qu'il mourût en France,
    Ce Roi, si grand dans la souffrance,
    Qui des douleurs portait le sceau,
    Pour que, victime consolée,
    Du seuil noir de son mausolée,
    Il pût voir encor son berceau.
    IV
    Oh ! qu'il s'endorme en paix dans la nuit funéraire !
    N'a-t-il pas oublié ses maux pour nos malheurs ?
    Ne nous lègue-t-i1 pas à son généreux frère,
    Qui pleure en essuyant nos pleurs ?
    N'a-t-i1 pas, dissipant nos rêves politiques,
    De notre âge et des temps antiques
    Proclamé l'auguste traité ?
    Loi sage qui, domptant la fougue populaire,
    Donne aux sujets égaux un maître tutélaire,
    Esclave de leur liberté !
    Sur nous un Roi Chevalier veille.
    Qu'il conserve l'aspect des cieux !
    Que nul bruit de longtemps n'éveille
    Ce sépulcre silencieux !
    Hélas ! le démon régicide,
    Qui, du sang des Bourbons avide,
    Paya de meurtres leurs bienfaits,
    A comblé d'assez de victimes
    Ces murs, dépeuplés par des crimes,
    Et repeuplés par des forfaits !
    Qu'il sache que jamais la couronne ne tombe !
    Ce haut sommet échappe à son fatal niveau.
    Le supplice où des rois le corps mortel succombe
    N'est pour eux qu'un sacre nouveau.
    Louis, chargé de fers par des mains déloyales,
    Dépouillé des pompes royales,
    Sans cour, sans guerriers, sans hérauts,
    Gardant sa royauté devant la hache même,
    Jusque sur l'échafaud prouva son droit suprême,
    En faisant grâce à ses bourreaux !
    V
    De Saint-Denis, de Sainte-Hélène,
    Ainsi je mé***ais le sort,
    Sondant d'une vue incertaine
    Ces grands mystères de la mort.
    Qui donc êtes-vous, Dieu superbe ?
    Quel bras jette les tours sous l'herbe,
    Change la pourpre en vil lambeau ?
    D'où vient votre souffle terrible ?
    Et quelle est la main invisible
    Qui garde les clefs du tombeau ?
  5. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    LE SACRE DE CHARLES X
    Os superbum conticescat,
    Simplex fides acquiescat
    Dei magisterio.
    Que l'orgueil se taise, que la simple foi contemple l'exercice du pouvoir de Dieu. PROSE, Prières du sacre.
    I
    L'orgueil depuis trente ans est l'erreur de la terre.
    C'est lui qui sous les droits étouffa le devoir ;
    C'est lui qui dépouilla de son divin mystère
    Le sanctuaire du pouvoir.
    L'orgueil enfanta seul nos fureurs téméraires,
    Et ces lois dont tant de nos frères
    Ont subi l'arrêt criminel,
    Et ces règnes sanglants, et ces hideuses fêtes,
    Où, sur un échafaud se proclamant prophètes,
    Des bourreaux créaient l'Éternel !
    En vain, pour dissiper cette ingrate folie,
    Les leçons du Seigneur sur nous ont éclaté ;
    Dans les faits merveilleux que notre siècle oublie,
    En vain Dieu s'est manifesté !
    En vain un conquérant, aux ailes enflammées,
    A rempli du bruit des armées
    Le monde en ses fers engourdi ;
    Des peuples obstinés l'aveuglement vulgaire
    N'a point vu quelle main poussait ses chars de guerre
    Du Septentrion au Midi !
    II
    Qui jamais de Clovis surpassa l'insolence,
    Peuples ? dans son orgueil il plaçait son appui.
    Ne mettant que le monde et lui dans la balance,
    Il crut qu'elle penchait sous lui.
    Il bravait de vingt rois les armes épuisées ;
    Des nations s'étaient brisées
    Sur ce Sicambre audacieux ;
    Sur la terre à ses yeux rien n'était redoutable :
    Il fallut, pour courber cette tête indomptable,
    Qu'une colombe vînt des cieux !
    Peuples ! au même autel elle est redescendue !
    Elle vient, échappée aux profanations,
    Comme elle a de Clovis fléchi l'âme éperdue,
    Vaincre l'orgueil des nations.
    Que le siècle à son tour comme un roi s'humilie.
    De la voix qui réconcilie
    L'oracle est enfin entendu ;
    La royauté, longtemps veuve de ses couronnes,
    De la chaîne d'airain qui lie au ciel les trônes
    A retrouvé l'anneau perdu.
    III
    Naguère on avait vu les tyrans populaires,
    Attaquant le passé comme un vieil ennemi,
    Poursuivre, sous l'abri des marbres séculaires,
    Le trésor gardé par Remy.
    Du pontife endormi profanant le front pâle,
    De sa tunique épiscopale
    Ils déchirèrent les lambeaux ;
    Car ils bravaient la mort dans sa majesté sainte ;
    Et les vieillards souvent s'écriaient, pleins de crainte :
    " Que leur ont donc fait les tombeaux ? "
    Mais, trompant des vautours la fureur criminelle,
    Dieu garda sa colombe au lys abandonné.
    Elle va sur un roi poser encor son aile :
    Ce bonheur à Charles est donné !
    Charles sera sacré suivant l'ancien usage,
    Comme Salomon, le roi sage,
    Qui goûta les célestes mets,
    Quand Sadoch et Nathan d'un baume l'arrosèrent,
    Et, s'approchant de lui, sur le front le baisèrent,
    En disant : " Qu'il vive à jamais ! "
    IV
    Le vieux pays des Francs, parmi ses métropoles,
    Compte une église illustre, où venaient tous nos rois,
    De ce pas triomphant dont tremblent les deux pôles,
    S'humilier devant la Croix.
    Le peuple en racontait cent prodiges antiques :
    Ce temple a des voûtes gothiques,
    Dont les saints aimaient les détours ;
    Un séraphin veillait à ses portes fermées ;
    Et les anges du ciel, quand passaient leurs armées,
    Plantaient leurs drapeaux sur ses tours !
    C'est là que pour la fête on dresse des trophées.
    L'or, la moire et l'azur parent les noirs piliers,
    Comme un de ces palais où voltigeaient les fées,
    Dans les rêves des chevaliers.
    D'un trône et d'un autel les splendeurs s'y répondent ;
    Des festons de flambeaux confondent
    Leurs rayons purs dans le saint lieu ;
    Le lys royal s'enlace aux arches tutélaires ;
    Le soleil, à travers les vitraux circulaires,
    Mêle aux fleurs des roses de feu.
    V
    Voici que le cortège à pas égaux s'avance.
    Le pontife aux guerriers demande CHARLES DIX.
    L'autel de Reims revoit l'oriflamme de France
    Retrouvée aux murs de Cadix.
    Les cloches dans les airs tonnent ; le canon gronde ;
    Devant l'aîné des rois du monde
    Tout un peuple tombe à genoux ;
    Mille cris de triomphe en sons confus se brisent ;
    Puis le roi se prosterne, et les évêques disent :
    " Seigneur, ayez pitié de nous !
    " Celui qui vient en pompe à l'autel du Dieu juste,
    C'est l'héritier nouveau du vieux droit de Clovis,
    Le chef des Douze Pairs, que son appel auguste
    Convoque en ces sacrés parvis.
    Ses preux, quand de sa voix leur oreille est frappée,
    Touchent le pommeau de l'épée,
    Et l'ennemi pâlit d'effroi ;
    Lorsque ses légions rentrent après la guerre,
    Leur marche pacifique ébranle encor la terre :
    Ô Dieu ! prenez pitié du Roi !
    " Car vous êtes plus grand que la grandeur des hommes !
    Nous vous louons, Seigneur, nous vous confessons Dieu !
    Vous nous placez au faîte, et dès que nous y sommes,
    À la vie il faut dire adieu !
    Vous êtes Sabaoth, le Dieu de la victoire !
    Les chérubins, remplis de gloire,
    Vous ont proclamé Saint trois fois ;
    Dans votre éternité le temps se précipite ;
    Vous tenez dans vos mains le monde qui palpite
    Comme un passereau sous nos doigts ! "
    VI
    Le Roi *** : " Nous jurons, comme ont juré nos pères,
    De rendre à nos sujets paix, amour, équité ;
    D'aimer, aux mauvais jours comme en des temps prospères,
    La Charte de leur liberté.
    Nous vivrons dans la foi par nos aïeux chérie.
    Des Ordres de chevalerie
    Nous suivrons le chemin étroit.
    Pour sauver l'opprimé nos pas seront agiles.
    Ainsi nous le jurons sur les saints Évangiles :
    Que Dieu soit en aide au bon droit ! "
    Montjoie et Saint-Denis ! - Voilà que Clovis même
    Se lève pour l'entendre ; et les deux saints guerriers,
    Charlemagne et Louis, portant pour diadème
    Une auréole de lauriers ;
    Et Charles sept, guidé par Jeanne encor ravie ;
    Et François premier, dont Pavie
    Trouva l'armure sans défaut ;
    Et du dernier Martyr l'héroïque fantôme,
    Ce Roi, deux fois sacré pour un double royaume,
    À l'autel et sur l'échafaud !
    Devant ces grands témoins de la grandeur française,
    Le Saint-Chrême de Charle a rajeuni les droits.
    Il reçoit, sans faiblir, cette couronne où pèse
    La gloire de soixante rois.
    L'Archevêque bénit l'Épée héré***aire,
    Et le Sceptre, et la Main austère
    Dont nul signe n'est démenti ;
    Puis il plonge à leur tour dans le divin calice
    Ces Gants, qu'un roi jamais n'a jetés dans la lice,
    Sans qu'un monde en ait retenti !
    VII
    Entre, ô peuple ! - Sonnez, clairons, tambours, fanfare !
    Le prince est sur le trône ; il est grand et sacré !
    Sur la foule ondoyante il brille comme un phare
    Des flots d'une mer entouré.
    Mille chantres des airs, du peuple heureuse image,
    Mêlant leur voix et leur plumage,
    Croisent leur vol sous les arceaux ;
    Car les Francs, nos aïeux, croyaient voir dans la nue
    Planer la Liberté, leur mère bien connue,
    Sur l'aile errante des oiseaux.
    Le voilà Prêtre et Roi ! - De ce titre sublime
    Puisque le double éclat sur sa couronne a lui,
    Il faut qu'il sacrifie. Où donc est la Victime ? -
    La Victime, c'est encor lui !
    Ah ! pour les Rois français qu'un sceptre est formidable !
    Ils guident ce peuple indomptable,
    Qui des peuples règle l'essor ;
    Le monde entier gravite et penche sur leur trône ;
    Mais aussi l'indigent, que cherche leur aumône,
    Compte leurs jours comme un trésor !
    VIII
    PRIÈRE
    Ô Dieu ! garde à jamais ce roi qu'un peuple adore !
    Romps de ses ennemis les flèches et les dards,
    Qu'ils viennent du couchant, qu'ils viennent de l'aurore,
    Sur des coursiers ou sur des chars !
    Charles, comme au Sina, t'a pu voir face à face !
    Du moins qu'un long bonheur efface
    Ses bien longues adversités.
    Qu'ici-bas des élus il ait l'habit de fête.
    Prête à son front royal deux rayons de ta tête ;
    Mets deux anges à ses côtés !
  6. Angelique

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    AU COLONEL G.-A. GUSTAFFSON
    Habet sua sidera tellus. Ancienne devise.
    I
    Ce siècle, jeune encore, est déjà pour l'histoire
    Presque une éternité de malheurs et de gloire.
    Tous ceux qu'il a vus naître ont vieilli dans vingt ans.
    Il semble, tant sa place est vaste en leur mémoire,
    Qu'il ne peut achever ses destins éclatants
    Sans fermer avec lui le grand cercle des temps.
    Chez des peuples fameux, en des jours qu'on renomme,
    Pour un siècle de gloire il suffisait d'un homme.
    Le nôtre a déjà vu passer bien des flambeaux !
    Il peut lutter sans crainte avec Athène et Rome :
    Que lui fait la grandeur des âges les plus beaux ?
    Il les domine tous, rien que par ses tombeaux !
    À peine il était né, que d'Enghien sur la poudre
    Mourut, sous un arrêt que rien ne peut absoudre.
    Il vit périr Moreau ; Byron, nouveau Rhiga.
    Il vit des cieux vengés tomber avec sa foudre
    Cet aigle dont le vol douze ans se fatigua
    Du Caire au Capitole et du Tage au Volga !
    -- " Qu'importe ? *** la foule. Ah ! laissons les tempêtes
    Naître, grossir, tonner sur ces sublimes têtes ;
    Pourvu que chaque jour amène son festin,
    Que toujours le soleil rayonne pour nos fêtes,
    Et qu'on nous laisse en paix couler notre destin,
    Oublier jusqu'au soir, dormir jusqu'au matin !
    " Que le crime s'élève et que l'innocent tombe,
    Qu'importe ? - Des héros sont morts ? paix à leur tombe !
    Et nous-mêmes ?... qui sait si demain nous vivrons ?
    Quand nous aurons atteint le terme où tout succombe,
    Nous dirons : Le temps passe ! et nous ignorerons
    Quels vents ont amené l'orage sur nos fronts. "
    II
    Ce ne sont point là tes paroles,
    Toi dont nul n'a jamais douté,
    Toi qui sans relâche t'immoles
    Au culte de la Vérité !
    Victime, et vengeur des victimes,
    Ton coeur aux dévouements sublimes
    S'offrit en tout temps, en tout lieu ;
    Toute ta vie est un exemple,
    Et ta grande âme est comme un temple
    D'où ne sort que la voix d'un Dieu !
    Il suffit de ton témoignage
    Pour que tout mortel, incliné,
    Aille rendre un public hommage
    À ce qu'il avait profané.
    Ta bouche, pareille au temps même,
    N'a besoin que d'un mot suprême
    Pour récompenser ou punir ;
    Et, parlant plus haut dans notre âge
    Que la flatterie et l'outrage,
    Dicte l'histoire à l'avenir !
    Puisqu'il n'est plus d'autres miracles
    Que les hommes nés parmi nous,
    Tu succèdes aux vieux oracles
    Que l'on écoutait à genoux.
    À ta voix, qui juge les races,
    Nos demi-dieux changent de places ;
    Comme, à des chants mystérieux,
    Quand la nuit déroulait ses voiles,
    Jadis on voyait les étoiles
    Descendre ou monter dans les cieux !
    Pour mériter ce rang auguste
    Aux vertus par le ciel offert,
    Qui plus que lui fut noble et juste ?
    Et qui, surtout, a plus souffert ?
    Cet homme a payé tant de gloire
    Par des malheurs que la mémoire
    Ne peut rappeler sans effroi ;
    C'est un enfant des Scandinaves,
    C'est Gustave, fils des Gustaves ;
    C'est un exilé ; c'est un roi !
    III
    Il avait un ami dans ses fraîches années,
    Comme lui tout empreint du sceau des destinées.
    C'est ce jeune d'Enghien qui fut assassiné !
    Gustave à ce forfait se jeta sur ses armes ;
    Mais, quand il vit l'Europe insensible à ses larmes,
    Calme et stoïque, il *** : " Pourquoi donc suis-je né ?
    " Puisque du meurtrier les nations vassales
    Courbent leurs fronts tremblants sous ses mains colossales ;
    Puisque sa volonté des princes est la loi ;
    Puisqu'il est le soleil qui domine leur sphère ;
    Sur un trône aujourd'hui je n'ai plus rien à faire,
    Moi qui voudrais régner en roi ! "
    Il céda. - Dieu montrait, par cet exemple insigne,
    Qu'il refuse parfois la victoire au plus digne ;
    Que plus tard, pour punir, il apparaît soudain ;
    Qu'il fait seul ici-bas tomber ce qu'il élève ;
    Et que, pour balancer Bonaparte et son glaive,
    Il fallait déjà plus que le sceptre d'Odin !
    Gustave, jeune encor, quitta le diadème,
    Pour que rien ne manquât à sa grandeur suprême ;
    Et, tant que de l'Europe, en proie aux longs revers,
    Sous les pas du géant vacilla l'équilibre,
    Plus haut que tous les rois il leva son front libre,
    Échappé du trône et des fers !
    IV
    Combien d'un tel exil diffère
    Le malheur du tyran banni,
    Lorsqu'au fond de l'autre hémisphère
    Il tomba, confus et puni !
    Quand sous la haine universelle
    L'usurpateur enfin chancelle,
    Dans sa chute il est insulté ;
    En vain il lutte, opiniâtre,
    Et de sa pourpre de théâtre
    Rien ne reste à sa nu***é !
    Sa morne infortune est pareille
    À la mer aux bords détestés,
    Dont l'eau morte à jamais sommeille
    Sur de fastueuses cités.
    Ce lac, noir vengeur de leurs crimes,
    Du ciel, qui mau*** ses abîmes,
    Ne peut réfléchir les tableaux ;
    Et l'oeil cherche en vain quelque dôme
    De l'éblouissante Sodome,
    Sous les ténèbres de ses flots.
    Gustave ! âme forte et loyale !
    Si parfois, d'un bras raffermi,
    Tu reprends ta robe royale,
    C'est pour couvrir quelque ennemi.
    Dans ta retraite que j'envie,
    Tu portes sur ta noble vie
    Un souvenir calme et sans fiel ;
    Reine, comme toi sans asile,
    La Vertu, que la terre exile,
    Dans ton grand coeur retrouve un ciel !
    V
    Ah ! laisse croître l'herbe en tes cours solitaires !
    Que t'importe, au milieu de tes pensers austères,
    Qu'on n'ose, de nos jours, saluer un héros ;
    Et que, chez d'autres rois, puissants, heureux encore,
    Une foule de chars ébranle dès l'aurore
    Les grands pavés de marbre et l'azur des vitraux !
    Tu règnes cependant ! tu règnes sur toute âme
    Dont ce siècle glacé n'a pas éteint la flamme ;
    Sur tout coeur né pour croire, aimer et secourir ;
    Sur tous ces chevaliers que tant d'oubli protège,
    Étranges courtisans dont le rare cortège
    N'accourt au seuil des rois qu'à l'heure d'y mourir !
    En tous lieux où la foi, l'honneur et le génie
    Rendent un libre hommage à la vertu bannie,
    Ton nom règne, entouré d'un éclat immortel.
    Par un beau dévouement toute vie animée,
    Toute gloire nouvelle, en notre âge allumée,
    Est un flambeau de plus brûlant sur ton autel !
    Ni maître ! ni sujet ! - Seul homme sur la terre
    Qui d'un pouvoir humain ne soit pas tributaire,
    Dieu seul sur tes destins a de suprêmes droits ;
    Et, comme la comète aux clartés vagabondes
    Marche libre à travers les soleils et les mondes,
    Tu passes à côté des peuples et des rois !
  7. Angelique

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    LES DEUX ZLES
    ***es-moi d'où il est venu, je vous dirai où il est allé. E. H.
    I
    Il est deux îles dont un monde
    Sépare les deux Océans,
    Et qui de loin dominent l'onde,
    Comme des têtes de géants.
    On devine, en voyant leurs cimes,
    Que Dieu les tira des abîmes
    Pour un formidable dessein ;
    Leur front de coups de foudre fume,
    Sur leurs flancs nus la mer écume,
    Des volcans grondent dans leur sein.
    Ces îles, où le flot se broie
    Entre des écueils décharnés,
    Sont comme deux vaisseaux de proie,
    D'une ancre éternelle enchaînés.
    La main qui de ces noirs rivages
    Disposa les sites sauvages,
    Et d'effroi les voulut couvrir,
    Les fit si terribles, peut-être,
    Pour que Bonaparte y pût naître,
    Et Napoléon y mourir !
    " - Là fut son berceau ! - Là sa tombe ! "
    Pour les siècles, c'en est assez.
    Ces mots, qu'un monde naisse ou tombe,
    Ne seront jamais effacés.
    Sur ces îles à l'aspect sombre
    Viendront, à l'appel de son ombre,
    Tous les peuples de l'avenir ;
    Les foudres qui frappent leurs crêtes,
    Et leurs écueils, et leurs tempêtes,
    Ne sont plus que son souvenir !
    Loin de nos rives, ébranlées
    Par les orages de son sort,
    Sur ces deux îles isolées
    Dieu mit sa naissance et sa mort ;
    Afin qu'il pût venir au monde
    Sans qu'une secousse profonde
    Annonçât son premier moment ;
    Et que sur son lit militaire,
    Enfin, sans remuer la terre,
    Il pût expirer doucement !
    II
    Comme il était rêveur au matin de son âge !
    Comme il était pensif au terme du voyage !
    C'est qu'il avait joui de son rêve insensé ;
    Du trône et de la gloire il savait le mensonge ;
    Il avait vu de près ce que c'est qu'un tel songe,
    Et quel est le néant d'un avenir passé !
    Enfant, des visions, dans la Corse, sa mère,
    Lui révélaient déjà sa couronne éphémère,
    Et l'aigle impérial planant sur son pavois ;
    Il entendait d'avance, en sa superbe attente,
    L'hymne qu'en toute langue, aux portes de sa tente,
    Son peuple universel chantait tout d'une voix :
    III
    ACCLAMATION
    " Gloire à Napoléon ! gloire au maître suprême !
    Dieu même a sur son front posé le diadème.
    Du Nil au Borysthène il règne triomphant.
    Les rois, fils de cent rois, s'inclinent quand il passe,
    Et dans Rome il ne voit d'espace
    Que pour le trône d'un enfant !
    " Pour porter son tonnerre aux villes effrayées,
    Ses aigles ont toujours les ailes déployées.
    Il régit le Conclave, il commande au Divan.
    Il mêle à ses drapeaux, de sang toujours humides,
    Des croissants pris aux Pyramides,
    Et la croix d'or du grand Yvan !
    " Le Mamelouk bronzé, le Goth plein de vaillance,
    Le Polonais, qui porte une flamme à sa lance,
    Prêtent leur force aveugle à ses ambitions.
    Ils ont son voeu pour loi, pour foi sa renommée.
    On voit marcher dans son armée
    Tout un peuple de nations !
    " Sa main, s'il touche un but où son orgueil aspire,
    Fait à quelque soldat l'aumône d'un empire,
    Ou fait veiller des rois au seuil de son palais,
    Pour qu'il puisse, en quittant les combats ou les fêtes,
    Dormir en paix dans ses conquêtes,
    Comme un pêcheur sur ses filets !
    " Il a bâti si haut son aire impériale,
    Qu'il nous semble habiter cette sphère idéale
    Où jamais on n'entend un orage éclater !
    Ce n'est plus qu'à ses pieds que gronde la tempête ;
    Il faudrait, pour frapper sa tête,
    Que la foudre pût remonter ! "
    IV
    La foudre remonta ! - Renversé de son aire,
    Il tomba, tout fumant de cent coups de tonnerre.
    Les rois punirent leur tyran.
    On l'exposa vivant sur un roc solitaire ;
    Et le géant captif fut remis par la terre
    À la garde de l'océan.
    Oh ! comme à Sainte-Hélène il dédaignait sa vie,
    Quand le soir il voyait, avec un oeil d'envie,
    Le soleil fuir sous l'horizon,
    Et qu'il s'égarait seul sur le sable des grèves,
    Jusqu'à ce qu'un Anglais, l'arrachant de ses rêves,
    Le ramenât dans sa prison !
    Comme avec désespoir ce prince de la guerre
    S'entendait accuser par tous ceux qui naguère
    Divinisaient son bras vainqueur !
    Car des peuples ligués la clameur solennelle
    Répondait à la voix implacable, éternelle,
    Qui se lamentait dans son coeur !
    V
    IMPRÉCATION
    " Honte ! opprobre ! malheur ! anathème ! vengeance !
    Que la terre et les cieux frappent d'intelligence !
    Enfin nous avons vu le colosse crouler !
    Que puissent retomber sur ses jours, sur sa cendre,
    Tous les pleurs qu'il a fait répandre,
    Tout le sang qu'il a fait couler !
    " Qu'à son nom, du Volga, du Tibre, de la Seine,
    Des murs de l'Alhambra, des fossés de Vincenne,
    De Jaffa, du Kremlin qu'il brûla sans remords,
    Des plaines du carnage et des champs de victoire,
    Tonne, comme un écho de sa fatale gloire,
    La malédiction des morts !
    " Qu'il voie autour de lui se presser ses victimes !
    Que tout ce peuple, en foule échappé des abîmes,
    Innombrable, annonçant les secrets du cercueil,
    Mutilé par le fer, sillonné par la foudre,
    Heurtant confusément des os noircis de poudre,
    Lui fasse un Josaphat de Sainte-Hélène en deuil !
    " Qu'il vive pour mourir tous les jours, à toute heure !
    Que le fier conquérant baisse les yeux, et pleure !
    Sachant sa gloire à peine et riant de ses droits,
    Des geôliers ont chargé d'une chaîne glacée
    Cette main qui s'était lassée
    À courber la tête des rois !
    " Il crut que sa fortune, en victoires féconde,
    Vaincrait le souvenir du peuple roi du monde ;
    Mais Dieu vient, et d'un souffle éteint son noir flambeau,
    Et ne laisse au rival de l'éternelle Rome
    Que ce qu'il faut de place et de temps à tout homme
    Pour se coucher dans le tombeau.
    " Ces mers auront sa tombe, et l'oubli la devance.
    En vain à Saint-Denis il fit parer d'avance
    Un sépulcre de marbre et d'or étincelant ;
    Le ciel n'a pas voulu que de royales ombres
    Vissent, en revenant pleurer sous ces murs sombres,
    Dormir dans leur tombeau son cadavre insolent ! "
    VI
    Qu'une coupe vidée est amère ! et qu'un rêve,
    Commencé dans l'ivresse, avec terreur s'achève !
    Jeune, on livre à l'espoir sa crédule raison ;
    Mais on frémit plus tard, quand l'âme est assouvie,
    Hélas ! et qu'on revoit sa vie
    De l'autre bord de l'horizon !
    Ainsi, quand vous passez au pied d'un mont sublime,
    Longtemps en conquérant vous admirez sa cime,
    Et ses pics, que jamais les ans n'humilieront,
    Ses forêts, vert manteau qui pend aux rocs sauvages,
    Et ces couronnes de nuages
    Qui s'amoncellent sur son front !
    Montez donc, et tentez ces zones inconnues ! -
    Vous croyiez fuir aux cieux... vous vous perdez aux nues !
    Le mont change à vos yeux d'aspect et de tableaux ;
    C'est un gouffre, obscurci de sapins centenaires,
    Où les torrents et les tonnerres
    Croisent des éclairs et des flots !
    VII
    Voilà l'image de la gloire :
    D'abord, un prisme éblouissant,
    Puis un miroir expiatoire,
    Où la pourpre paraît du sang !
    Tour à tour puissante, asservie,
    Voilà quel double aspect sa vie
    Offrit à ses âges divers.
    Il faut à son nom deux histoires :
    Jeune, il inventait ses victoires ;
    Vieux, il mé***ait ses revers.
    En Corse, à Sainte-Hélène encore,
    Dans les nuits d'hiver, le nocher,
    Si quelque orageux météore
    Brille au sommet d'un noir rocher,
    Croit voir le sombre capitaine,
    Projetant son ombre lointaine,
    Immobile, croiser ses bras ;
    Et *** que, pour dernière fête,
    Il vient régner dans la tempête,
    Comme il régnait dans les combats !
    VIII
    S'il per*** un empire, il aura deux patries,
    De son seul souvenir illustres et flétries,
    L'une aux mers d'Annibal, l'autre aux mers de Vasco ;
    Et jamais, de ce siècle attestant la merveille,
    On ne prononcera son nom, sans qu'il n'éveille
    Aux bouts du monde un double écho !
    Telles, quand une bombe ardente, meurtrière,
    Décrit dans un ciel noir sa courbe incendiaire,
    Se balance au-dessus des murs épouvantés,
    Puis, comme un vautour chauve, à la serre cruelle,
    Qui frappe en s'abattant la terre de son aile,
    Tombe, et fouille à grand bruit le pavé des cités ;
    Longtemps après sa chute, on voit fumer encore
    La bouche du mortier, large, noire et sonore,
    D'où monta pour tomber le globe au vol pesant,
    Et la place où la bombe, éclatée en murailles,
    Mourut, en vomissant la mort de ses entrailles,
    Et s'éteignit en embrasant !
  8. Angelique

    Angelique Thành viên quen thuộc

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    À LA COLONNE DE LA PLACE VENDÔME
    Parva magnis.
    I
    Ô monument vengeur ! trophée indélébile !
    Bronze qui, tournoyant sur ta base immobile,
    Sembles porter au ciel ta gloire et ton néant ;
    Et, de tout ce qu'a fait une main colossale,
    Seul es resté debout ; - ruine triomphale
    De l'édifice du géant !
    Débris du Grand Empire et de la Grande Armée,
    Colonne, d'où si haut parle la renommée !
    Je t'aime : l'étranger t'admire avec effroi.
    J'aime tes vieux héros, sculptés par la Victoire,
    Et tous ces fantômes de gloire
    Qui se pressent autour de toi.
    J'aime à voir sur tes flancs, colonne étincelante,
    Revivre ces soldats qu'en leur onde sanglante
    Ont roulés le Danube, et le Rhin, et le Pô !
    Tu mets comme un guerrier le pied sur ta conquête.
    J'aime ton piédestal d'armures, et ta tête
    Dont le panache est un drapeau !
    Au bronze de Henri mon orgueil te marie.
    J'aime à vous voir tous deux, honneur de la patrie,
    Immortels, dominant nos troubles passagers,
    Sortir, signes jumeaux d'amour et de colère,
    Lui, de l'épargne populaire,
    Toi, des arsenaux étrangers !
    Que de fois, tu le sais, quand la nuit sous ses voiles
    Fait fuir la blanche lune ou trembler les étoiles,
    Je viens, triste, évoquer tes fastes devant moi ;
    Et, d'un oeil enflammé dévorant ton histoire,
    Prendre, convive obscur, ma part de tant de gloire,
    Comme un pâtre au banquet d'un Roi !
    Que de fois j'ai cru voir, ô Colonne française,
    Ton airain ennemi rugir dans la fournaise !
    Que de fois, ranimant tes combattants épars,
    Heurtant sur tes parois leurs armes dérouillées,
    J'ai ressuscité ces mêlées
    Qui t'assiègent de toutes parts !
    Jamais, ô monument, même ivres de leur nombre,
    Les étrangers sans peur n'ont passé sous ton ombre.
    Leurs pas n'ébranlent point ton bronze souverain.
    Quand le sort une fois les poussa vers nos rives,
    Ils n'osaient étaler leurs parades oisives
    Devant tes batailles d'airain !
    II
    Mais quoi ! n'entends-je point, avec de sourds murmures,
    De ta base à ton front bruire les armures ?
    Colonne ! il m'a semblé qu'éblouissant mes yeux,
    Tes bataillons cuivrés cherchaient à redescendre...
    Que tes demi-dieux, noirs d'une héroïque cendre,
    Interrompaient soudain leur marche vers les cieux !
    Leur voix mêlait des noms à leur vieille devise :
    "TARENTE, REGGIO, DALMATIE et TRÉVISE !"
    Et leurs aigles, sortant de leur puissant sommeil,
    Suivaient d'un bec ardent cette aigle à double tête,
    Dont l'oeil, ami de l'ombre où son essor s'arrête,
    Se baisse à leur regard, comme aux feux du soleil !
    Qu'est-ce donc ? - Et pourquoi, bronze envié de Rome,
    Vois-je tes légions frémir comme un seul homme ?
    Quel impossible outrage à ta hauteur atteint ?
    Qui donc a réveillé ces ombres immortelles,
    Ces aigles qui, battant ta base de leurs ailes,
    Dans leur ongle captif pressent leur foudre éteint ?
    III
    Je comprends : - l'étranger, qui nous croit sans mémoire,
    Veut, feuillet par feuillet, déchirer notre histoire,
    Écrite avec du sang, à la pointe du fer. -
    Ose-t-il, imprudent ! heurter tant de trophées ?
    De ce bronze, forgé de foudres étouffées,
    Chaque étincelle est un éclair !
    Est-ce Napoléon qu'il frappe en notre armée ?
    Veut-il, de cette gloire en tant de lieux semée,
    Disputer l'héritage à nos vieux généraux ?
    Pour un fardeau pareil il a la main débile :
    L'empire d'Alexandre et les armes d'Achille
    Ne se partagent qu'aux héros.
    Mais non : l'Autrichien, dans sa fierté qu'il dompte,
    Est content si leurs noms ne disent que sa honte.
    Il fait de sa défaite un titre à nos guerriers,
    Et, craignant des vainqueurs moins que des feudataires,
    Il pardonne aux fleurons de nos ducs militaires,
    Si ce ne sont que des lauriers.
    Bronze ! Il n'a donc jamais, fier pour une victoire,
    Subi de tes splendeurs l'aspect expiatoire ?
    D'où vient tant de courage à cet audacieux ?
    Croit-il impunément toucher à nos annales ?
    Et comment donc lit-il ces pages triomphales
    Que tu déroules dans les cieux ?
    Est-ce un langage obscur à ses regards timides ?
    Eh ! qu'il s'en fasse instruire au pied des Pyramides,
    À Vienne, au vieux Kremlin, au morne Escurial !
    Qu'il en parle à ces Rois, cour dorée et nombreuse,
    Qui naguère peuplait d'une tente poudreuse
    Le vestibule impérial !
    IV
    À quoi pense-t-il donc, l'étranger qui nous brave ?
    N'avions-nous pas hier l'Europe pour esclave ?
    Nous, subir de son joug l'indigne talion !
    Non ! au champ du combat nous pouvons reparaître.
    On nous a mutilés ; mais le temps a peut-être
    Fait croître l'ongle du lion.
    De quel droit viennent-ils découronner nos gloires ?
    Les Bourbons ont toujours adopté des victoires.
    Nos rois t'ont défendu d'un ennemi tremblant,
    Ô trophée ! à leurs pieds tes palmes se déposent ;
    Et si tes quatre aigles reposent,
    C'est à l'ombre du drapeau blanc.
    Quoi ! le globe est ému de volcans électriques ;
    Derrière l'océan grondent les Amériques ;
    Stamboul rugit ; Hellé remonte aux jours anciens ;
    Lisbonne se débat aux mains de l'Angleterre...
    Seul, le vieux peuple franc s'indigne que la terre
    Tremble à d'autres pas que les siens !
    Prenez garde, étrangers : - nous ne savons que faire !
    La paix nous berce en vain dans son oisive sphère,
    L'arène de la guerre a pour nous tant d'attrait !
    Nous froissons dans nos mains, hélas ! inoccupées,
    Des lyres, à défaut d'épées !
    Nous chantons, comme on combattrait !
    Prenez garde ! - La France, où gran*** un autre âge,
    N'est pas si morte encor qu'elle souffre un outrage !
    Les partis pour un temps voileront leur tableau.
    Contre une injure, ici, tout s'unit, tout se lève,
    Tout s'arme, et la Vendée aiguisera son glaive
    Sur la pierre de Waterloo.
    Vous dérobez des noms ! - Quoi donc ! faut-il qu'on aille
    Lever sur tous vos champs des titres de bataille ?
    Faut-il, quittant ces noms par la valeur trouvés,
    Pour nos gloires, chez vous, chercher d'autres baptêmes ?
    Sur l'airain de vos canons mêmes
    Ne sont-ils point assez gravés ?
    L'étranger briserait le blason de la France !
    On verrait, enhardi par notre indifférence,
    Sur nos fiers écussons tomber son vil marteau !
    Ah !... comme ce Romain qui remuait la terre,
    Vous portez, ô Français ! et la paix et la guerre
    Dans le pli de votre manteau.
    Votre aile en un moment touche, à sa fantaisie,
    L'Afrique par Cadix et par Moscou l'Asie.
    Vous chassez en courant Anglais, Russes, Germains ;
    Les tours croulent devant vos trompettes fatales ;
    Et de toutes les capitales
    Vos drapeaux savent les chemins.
    Quand leur destin se pèse avec vos destinées,
    Toutes les nations s'inclinent détrônées.
    La gloire pour vos noms n'a point assez de bruit.
    Sans cesse autour de vous les états se déplacent.
    Quand votre astre paraît, tous les autres s'effacent ;
    Quand vous marchez, l'univers suit !
    Que l'Autriche en rampant de noeuds vous environne,
    Les deux géants de France ont foulé sa couronne !
    L'histoire, qui des temps ouvre le Panthéon,
    Montre empreints aux deux fronts du vautour d'Allemagne
    La sandale de Charlemagne,
    L'éperon de Napoléon.
    Allez ! - Vous n'avez plus l'aigle qui de son aire
    Sur tous les fronts trop hauts portait votre tonnerre ;
    Mais il vous reste encor l'oriflamme et les lys.
    Mais c'est le Coq gaulois qui réveille le monde ;
    Et son cri peut promettre à votre nuit profonde
    L'aube du soleil d'Austerlitz !
    V
    C'est moi qui me tairais. ! Moi qu'enivrait naguère
    Mon nom saxon, mêlé parmi des cris de guerre !
    Moi, qui suivais le vol d'un drapeau triomphant !
    Qui, joignant aux clairons ma voix entrecoupée,
    Eus pour premier hochet le noeud d'or d'une épée !
    Moi, qui fus un soldat quand j'étais un enfant !
    Non, Frères ! non, Français de cet âge d'attente !
    Nous avons tous grandi sur le seuil de la tente.
    Condamnés à la paix, aiglons bannis des cieux,
    Sachons du moins, veillant aux gloires paternelles,
    Garder de tout affront, jalouses sentinelles,
    Les armures de nos aïeux !
  9. Angelique

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    FIN
    Ubi defuit orbis.
    I
    Ainsi d'un peuple entier je feuilletais l'histoire !
    Livre fatal de deuil, de grandeur, de victoire.
    Et je sentais frémir mon luth contemporain,
    Chaque fois que passait un grand nom, un grand crime,
    Et que l'une sur l'autre, avec un bruit sublime,
    Retombaient les pages d'airain.
    Fermons-le maintenant, ce livre formidable.
    Cessons d'interroger ce sphinx inabordable
    Qui le garde en silence, à la fois monstre et dieu.
    L'énigme qu'il propose échappe à bien des lyres ;
    Il n'en écrit le mot sur le front des empires
    Qu'en lettres de sang et de feu.
    II
    Ne cherchons pas ce mot. - Alors, pourquoi, poète,
    Ne t'endormais-tu pas sur ta lyre muette ?
    Pourquoi la mettre au jour et la prostituer ?
    Pourquoi ton chant sinistre et ta voix insensée ?... -
    C'est qu'il fallait à ma pensée
    Tout un grand peuple à remuer.
    Des révolutions j'ouvrais le gouffre immonde ?
    C'est qu'il faut un chaos à qui veut faire un monde.
    C'est qu'une grande voix dans ma nuit m'a parlé.
    C'est qu'enfin je voulais, menant au but la foule,
    Avec le siècle qui s'écoule
    Confronter le siècle écoulé.
    Le génie a besoin d'un peuple que sa flamme
    Anime, éclaire, échauffe, embrase comme une âme.
    Il lui faut tout un monde à régir en tyran.
    Dès qu'il a pris son vol du haut de la falaise,
    Pour que l'ouragan soit à l'aise,
    Il n'a pas trop de l'océan !
    C'est là qu'il peut ouvrir ses ailes ; là, qu'il gronde
    Sur un abîme large et sur une eau profonde ;
    C'est là qu'il peut bondir, géant capricieux,
    Et tournoyer, debout dans l'orage qui tombe,
    D'un pied s'appuyant sur la trombe,
    Et d'un bras soutenant les cieux !
  10. Angelique

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    LE POÈTE
    Muse ! contemple ta victime ! LAMARTINE, L'Enthousiasme.
    I
    Qu'il passe en paix, au sein d'un monde qui l'ignore,
    L'auguste infortuné que son âme dévore !
    Respectez ses nobles malheurs ;
    Fuyez, ô plaisirs vains, son existence austère ;
    Sa palme qui gran***, jalouse et solitaire,
    Ne peut croître parmi vos fleurs.
    Il souffre assez de maux, sans y joindre vos joies !
    Chaque pas qui l'enfonce en de sublimes voies,
    Par une douleur est compté.
    Il pleure sa jeunesse avant l'âge envolée,
    Sa vie, humble roseau, qui se courbe accablée
    Du poids de l'immortalité.
    Il pleure, ô belle enfance, et ta grâce et tes charmes,
    Et ton rire innocent et tes naïves larmes,
    Ton bonheur doux et turbulent,
    Et, loin des vastes cieux, l'aile que tu reposes,
    Et, dans les jeux bruyants, ta couronne de roses
    Que flétrirait son front brûlant !
    Il accuse et son siècle, et ses chants, et sa lyre,
    Et la coupe enivrante où, trompant son délire,
    La gloire verse tant de fiel,
    Et ses voeux, poursuivant des promesses funestes,
    Et son coeur, et la Muse, et tous ces dons célestes,
    Hélas ! qui ne sont pas le ciel !
    II
    Ah ! si du moins, couché sur le char de la vie,
    L'hymne de son triomphe et les cris de l'envie
    Passaient sans troubler son sommeil !
    S'il pouvait dans l'oubli préparer sa mémoire !
    Ou, voilé de rayons, se cacher dans sa gloire,
    Comme un ange dans le soleil !
    Mais sans cesse il faut suivre, en la commune arène,
    Le flot qui le repousse et le flot qui l'entraîne !
    Les hommes troublent son chemin !
    Sa voix grave se perd dans leurs vaines paroles,
    Et leur fol orgueil mêle à leurs jouets frivoles
    Le spectre qui pèse à sa main !
    Pourquoi traîner ce roi si loin de ses royaumes ?
    Qu'importe à ce géant un cortège d'atomes !
    Fils du monde, c'est vous qu'il fuit.
    Que fait à l'immortel votre éphémère empire ?
    Sans les chants de sa voix, sans les sons de sa lyre,
    N'avez-vous point assez de bruit ?
    III
    Laissez-le dans son ombre où descend la lumière.
    Savez-vous qu'une Muse, épurant sa poussière,
    Y charme en secret ses ennuis ?
    Et que, laissant pour lui les éternelles fêtes,
    La colombe du Christ et l'aigle des Prophètes
    Souvent y visitent ses nuits ?
    Sa veille redoutable, en ses visions saintes,
    Voit les soleils naissants et les sphères éteintes
    Passer en foule au fond du ciel ;
    Et, suivant dans l'espace un choeur brûlant d'archanges,
    Cherche, aux mondes lointains, quelles formes étranges
    Y revêt l'Être universel.
    Savez-vous que ses yeux ont des regards de flamme ?
    Savez-vous que le voile, étendu sur son âme,
    Ne se lève jamais en vain ?
    De lumière dorée et de flammes rougie,
    Son aile, en un instant, de l'infernale orgie
    Peut monter au banquet divin.
    Laissez donc loin de vous, ô mortels téméraires,
    Celui que le Seigneur marqua, parmi ses frères,
    De ce signe funeste et beau,
    Et dont l'oeil entrevoit plus de mystères sombres
    Que les morts effrayés n'en lisent, dans les ombres,
    Sous la pierre de leur tombeau !
    IV
    Un jour vient dans sa vie, où la Muse elle-même,
    D'un sacerdoce auguste armant son luth suprême,
    L'envoie au monde ivre de sang,
    Afin que, nous sauvant de notre propre audace,
    Il apporte d'en haut à l'homme qui menace
    La prière du Tout-Puissant.
    Un formidable esprit descend dans sa pensée.
    Il paraît ; et soudain, en éclairs élancée,
    Sa parole luit comme un feu.
    Les peuples prosternés en foule l'environnent ;
    Sina mystérieux, les foudres le couronnent,
    Et son front porte tout un Dieu !

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